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Voile et IT : « Il y a encore pas mal d'empirisme dans la conception d'un bateau »

Voile et IT : « Il y a encore pas mal d'empirisme dans la conception d'un bateau »
Romaric Neyhousser a notamment signé les plans du Multi 50 Arkema skippé par Lalou Roucayrol (Crédit photo : Vincent Olivaud / Team Arkema Lalou Multi)
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°104 !
Voile et IT : un mariage pour la performance

Voile et IT : un mariage pour la performance

Une chose est sûre, l'IT est devenue une composante à part entière du sport quel qu'il soit. La donnée étant étant désormais au coeur de nombre d'activités, les data-scientists travaillent main dans la main avec les sportifs. Mais dans les sports mécaniques, comme la voile, l'IT ne s'arrête pas...

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Architecte naval, Romaric Neyhousser collabore depuis plusieurs années avec différents cabinets d'architecture. Sont passés entre ses mains les plans de nombreuses bêtes de courses. Il revient pour CIO  sur les évolutions apportées par les nouvelles technologies dans son métier. 
Une série d'articles sur l'IT et la voile est publiée sur CIO à l'occasion de la Transat Jacques Vabre, aussi appelée Route du Café.

PublicitéCIO : Est-ce qu'avec l'arrivée des nouvelles technologies, la construction des bateaux est devenue moins empirique ?

Romaric Neyhousser : Il y a encore pas mal d'empirisme dans la construction d'un bateau. Il est vrai que nous pouvons faire beaucoup de choses aujourd'hui avec la simulation. Elle permet d'accélérer les processus de décision. Le problème c'est que nous restons sur des modèles très idéalisés, le milieu marin étant très difficile à modéliser dans son entière complexité. Quand nous travaillons sur des bateaux in-shore [près des côtes, NDLR] voués à naviguer dans des conditions de mer et de vents bien précises, nous pouvons nous approcher de la réalité mais quand il est question de courses océaniques, c'est beaucoup plus difficile. Nous nous appuyons de ce fait encore beaucoup sur l'expérimentation.

CIO : L'augmentation de la puissance des solutions de simulation et leur démocratisation ne permettent pas d'aller de plus en plus loin ?

Romaric Neyhousser : Si, évidemment. Mais les questions de budget restent prépondérantes et nous n'avons pas forcément les moyens de passer des centaines de jours à réaliser des simulations sur ordinateurs. A un moment, nous devons lancer des constructions et aller sur l'eau. Après, il est évident que nous économisons beaucoup de temps et d'argent grâce à ces même solutions. Nous n'avons plus besoin de faire des essais de carènes avec des modèles réduits dans des bassins dédiés. Mais il reste très difficile de faire des études complètes. Entre un IMOCA de 18 mètres et un Mini 6,5 mètres, le travail de l'architecte est sensiblement le même mais les budgets sont 100 fois moindres. Nous devons donc nous adapter.

CIO : Aujourd'hui, les bateaux sont quasiment entièrement connectés. Comment utilisez-vous les données qui en sont issues ?

Romaric Neyhousser : En tant qu'architectes, nous y avons difficilement accès. Ce sont plutôt les bureaux d'études des équipes qui les récoltent et les utilisent. Comme nous pourrions être amenés à développer les bateaux de leurs concurrents, ils ne préfèrent pas les partager avec nous, ce qui est plutôt logique. Après, il est évident que leur analyse peut apporter beaucoup. Elles vont permettre de renforcer l'apprentissage autour des bateaux et des nouvelles solutions que nous testons.

CIO : C'est notamment le cas des foils [plans porteurs immergés qui exercent une force ascendante, NDLR] ?

Romaric Neyhousser : Tout a fait ! Ce sont des appendices qui vont être très sollicités et nous n'avons encore que peu de retour sur leur comportement sur des bateaux océaniques. Sur les monocoques notamment, les contraintes vont être énormes. Avec les premiers retours nous allons déjà pouvoir voir si nous ne nous sommes pas trompés dans la conception et si les structures tiennent le coup. Nous pourrons peut-être revoir les échantillonnages de matières pour les alléger.

PublicitéCIO : Puisque nous abordons le sujet... Qu'en est-il de l'impact des nouvelles technologies sur la course au poids qui a toujours été un des nerfs de la guerre ?

Romaric Neyhousser : Nous avons pu en gagner beaucoup. Que ce soit sur les pièces mécaniques ou les autres, les simulations de résistance des matériaux nous permettent de faire plus léger. Sur la partie composite aussi. Nous pouvons ajuster très finement les échantillonnages de chaque composant dans chaque pièce pour faire évoluer leurs caractéristiques mécaniques et les faire le plus léger possible.

CIO : Qu'est ce que cela a changé sur la conception des bateaux ?

Romaric Neyhousser : Avant, nous partions d'une simple expérience. Aujourd'hui, nous avons des batteries d'analyses. Nous partons de plans de bateaux les plus légers possibles et renforçons les zones qui seront les plus sollicitées d'après les calculs. Les parois sont ainsi de plus en plus fines, les structures de plus en plus complexes et les bateaux de plus en plus chers. Leur construction demande en parallèle plus de savoir-faire. Les chantiers doivent donc être de plus en plus performants.

 
 
 
 

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