TransformationS de la DSI
Après avoir vécu les transformations technologiques, la DSI doit vivre sa révolution copernicienne à cause du cloud et du nomadisme.
PublicitéLa DSI, quoiqu'on en dise, a prouvé depuis les multiples changements survenus depuis 3 décennies qu'elle excellait dans le domaine de la transformation. Elle a en effet présidé à la naissance des ruptures technologiques successives (mainframe, informatique distribuée, puis PC, puis internet, puis le web 2.0, et en même temps le smartphone, etc.). Elle a accompagné les Métiers de l'entreprise dans leurs transformations, avec les partenaires externes (SSII, cabinets de conseil, consultants indépendants, éditeurs, constructeurs) car la DSI est le miroir interne du progrès technologique.
Les méthodes d'antan ne sont plus adaptées car à l'heure du développement des lunettes connectées nous prenons conscience que les architectures du web sont 'politiques'. En effet, une nouvelle répartition des pouvoirs autour de nouveaux acteurs (Google, Amazon, Facebook, Twitter, etc.) promeut la culture numérique collaborative qui moule les comportements et transforme dans la foulée la structure et l'architecture d'entreprise qui deviennent hybrides (les récentes révélations sur les systèmes de surveillance en sont une illustration).
La DSI se trouve confrontée aujourd'hui à la mutation du travail et de l'emploi qui découle de la fin du modèle de l'usine, c'est-à-dire la fin de l'unicité de temps, de lieu et d'espace. Malgré la persistance des mêmes contingences de la DSI, le modèle du gardien du temple est mort, depuis la montée du nomadisme. Le Cloud computing ainsi que le Big data changent la donne. La géolocalisation trace les actions. Les robots machinisent le travail. La réalité augmentée et l'informatique changent notre vie quotidienne.
Tout a une raison dans le contexte de la DSI où il se trouve. Mais la DSI se trouve confrontée aujourd'hui à sa propre transformation depuis la propagation de l'économie numérique connectée. Si le déplacement du centre de gravité de l'action vers le réseau oblige l'entreprise à passer d'une vision géocentrée à une vision héliocentrée, la légitimité d'une décision n'est plus caractérisée par le respect de l'ordre top down. Elle résulte des points de vue contradictoires de millions de personnes co-existant au sein des réseaux, tous connectés 24 h / 24, tous dotés d'un triple pouvoir d'ubiquité, d'omniscience et d'omniprésence et tous égaux sur le plan de l'accès aux données et à l'information.
L'Intérieur et l'Extérieur de l'entreprise se découvrent donc et s'entrelacent alors que durant deux siècles ils se sont ignorés. La question ne consiste donc pas à octroyer plus d'effectif et de moyens de contrôle des comportements nomades, voire les normer à distance, ni à se contenter des relations de cause à effet. Il s'agit d'une nouvelle lecture du devenir. Par exemple, qu'est-ce qui est le plus important : l'It ou l'iT pour définir un nouveau cap ?
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Au-delà de la technique, de nouvelles attitudes et un nouveau regard sont donc nécessaires en même temps qu'un changement de cap. J'avais déjà écris sur ce sujet. (cf. "Changement de cap OU changement d'attitudes" - Gérard Balantzian, Le Monde Informatique, 24 octobre 1988). Mais ce qui change depuis 1988 c'est la condition ET qui remplace la condition OU. Il faut donc un bon questionnement avant les recettes, aussi bien sur le fond que la forme de la trans-formation avant d'agir sur plusieurs plans :
a) développer l'ingénierie de l'information et de la connaissance ;
b) reconsidérer l'IT governance à la lumière de la "cogouvernance de l'information de l'information" (www.cogouvernance.com) pour l'entreprise numérique ;
c) intégrer des relations non binaires dans nos logiques car nous sommes condamnés à gérer des tensions constantes entre l'ordre et le désordre, entre l'industrialisation et l'innovation. De nouveaux mécanismes de liaison et d'ajustement mutuel sont à déployer autour des instances de cogouvernance.
En même temps, des travaux sur les rôles et responsabilités doivent être menés pour la transformation des usages et des échanges en situation mobile et les nouveaux rapports entre le Centre et la Périphérie. La dynamique de la Confiance est le socle de la transformation. N'oublions pas que l'utilisateur interne accepte d'être servi par la DSI, mais en même temps revendique son autonomie. Plus autonome qu'hier et dorénavant nomade, il conquiert de nouveaux pouvoirs : pouvoir de production et de diffusion de l'information, pouvoir d'usage et de développement libre, pouvoir d'échange et de connexion libres. Plusieurs stratégies sont possibles (défensive, offensive, coopérative) en se centrant d'abord sur les Missions.
La transformation des attitudes et des postures du management pour s'adapter à ce nouvel environnement de l'économie numérique connectée est un grand chantier qui ne peut pas uniquement être confié aux sociologues car nous sommes tous concernés. De plus, le facteur temps est discriminant car la transformation du pilotage des processus en environnement mobile nécessite de responsabiliser les individus libérés tout en élargissant le périmètre du S.I. vers un nouveau cap et de nouveaux business models.
Le moment est venu de s'interroger sur l'orchestration d'ensemble de cette Complexité. Le point d'équilibre dynamique à trouver entre d'une part la volonté d'aligner les comportements sur la stratégie d'industrialisation et de rationalisation des activités, des qualifications et des résultats, et d'autre part la libération des énergies créatrices qui nourrissent l'innovation collaborative est un choix politique et stratégique. A cette frontière non fixe entre plusieurs transformations se situe la transformation culturelle car nous devrons, dans les années à venir, accepter de prendre en compte dans les méthodes, les règles du jeu et les relations entre les parties prenantes et les parties concernées une part d'improbable, d'incompréhensible et d'imprévisible.
Article rédigé par
Gérard Balantzian, Auteur et conférencier
Pionnier dans le domaine du management et des systèmes d'information depuis 1982, Gérard Balantzian a initié en France le développement des schémas directeurs, de la cogouvernance® et des pratiques coopératives de transformation des systèmes d'information. Il a dirigé pendant plus de 20 ans l'antenne parisienne de l'Université de Technologie de Compiègne (IMI - Institut du Management de l'Information). Conférencier international, il est également auteur de nombreux articles dans la presse spécialisée.
Livres de Gérard Balantzian :
Aux éditions Masson : Les schémas directeurs stratégiques (1982, 1988, 1992) ; L'évaluation des systèmes d'information et de communication (1988) ; Aux Editions d'Organisation : L'avantage coopératif (1997) : Les systèmes d'information : art et pratiques (collectif) en 2002 ; Tableaux de bord pour diriger dans un contexte incertain, (collectif) en 2005 ; Aux éditions Dunod : Le plan de gouvernance du S.I. (2006, 2007, 2011) ; Aux éditions Hermès Lavoisier : Gouvernance de l'information pour l'entreprise numérique (2013).
Site de l'auteur : www.cogouvernance.com
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