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Traitement des données : « un bond de maturité et de professionnalisation » selon Deloitte

Traitement des données : « un bond de maturité et de professionnalisation » selon Deloitte
Reda Gomery, associé responsable Data et Analytics chez Deloitte, a présenté les data-tendances 2016 en France.

La deuxième édition des « Tendances Data et Analytics » par Deloitte a permis de dégager cinq tendances majeures dans les entreprises françaises.

PublicitéAprès une première édition en 2015, le cabinet Deloitte vient de publier sa deuxième édition (2016, donc) des « Tendances Data et Analytics ». « Après une première édition dominée par les expérimentations, notamment en Big Data et Open Data, l'édition 2016 est marquée par un véritable bond de maturité et de professionnalisation » a jugé Reda Gomery, associé responsable Data et Analytics chez Deloitte, en présentant l'étude.
Les cinq tendances ainsi définies dans son étude par Deloitte se basent sur d'une part des retours terrains récoltés par les consultants du cabinet, notamment au travers de participations dans divers groupes de travail, d'autre part sur une enquête. Comprenant trente questions, cette enquête a reçu soixante réponses traitées de la part d'entreprises avec un chiffre d'affaires de plus de 500 millions d'euros, ce qui implique qu'il convient d'être prudent sur les données chiffrées pour, justement, ne retenir que des tendances.

Un sentiment de plus grande maîtrise

Big Data, Fast Data, Smart Data... L'année 2016 sera bien sous le signe de la Data sans qualificatif. Même si la majorité des répondants déclare comprendre ces termes, même si les Datas sont placées au coeur des enjeux, même si les investissements en matière de traitement des données sont promis à une certaine augmentation, même si la transformation numérique repose largement sur la donnée, il faut bien constater que les répondants sont globalement dans le flou en matière de définitions.
L'Initiative Big Data se retrouverait ainsi plutôt entre les mains d'une entité dédiée directement rattachée à la direction générale (43% des répondants), éventuellement dans celles d'une direction métier largement impliquée (marketing par exemple, 29%) et moins encore entre celles de la DSI (21%). Quand on créé une entité dédiée, est-ce vraiment le signe d'une plus grande maîtrise ou plutôt d'une absence de capacité à rattacher le sujet à une direction existante avec certitude ?

Première tendance : de nouveaux rôles clés dans l'entreprise

Comme le souligne Deloitte, les Chief Data Officers se multiplient dans les entreprises. Plus du tiers des très grands comptes (Axa, PSA Peugeot-Citroën, Ville de Paris...) se sont ainsi dotés d'un tel CDO. Mais le périmètre du rôle et, de ce fait, son rattachement hiérarchique sont très peu normés. Les Data Scientists se multiplient également mais leur rôle est davantage fixé.
Le profil des CDO est vu comme mi-IT et mi-métier alors que la dichotomie entre les deux reste globalement assez forte. La formation et le recrutement de ces CDO, tout comme ceux des Data Scientists, sont donc problématiques. Quelques formations bien repérées ont des étudiants sur-sollicités alors que des viviers prometteurs (notamment des masters en statistique), qui n'ont peut-être pas évolué pour bien coller à la demande actuelle, ne sont pas du exploités.

PublicitéUn CDO flou dépouille nettement le CIO pour la conformité réglementaire

On peut s'étonner également que les entreprises estimant avoir une bonne vision du rôle du CDO soient minoritaires (48%) mais majoritaires (71%) à juger que le rôle du CDO doit se renforcer. Le message semble donc : un CDO, on ne sait pas à quoi ça sert mais c'est de plus en plus important. « C'est la preuve d'un bas niveau de maturité » a soupiré Reda Gomery.
Certes, l'apparition des CDO est parfois motivée par la volonté d'innovation mais plutôt quand les évolutions du modèle économique l'exige, notamment face à un risque d'uberisation. Mais le vrai moteur dans bon nombre de grandes entreprises est réglementaire ! En effet, Bâle II ou Solvency, pour prendre les exemples respectivement de la banque et de l'assurance, exigent un haut niveau de gouvernance et d'auditabilité des données de risques. A cela s'ajoute le futur règlement européen sur les données personnelles. Et le CDO devient évidemment le responsable de la mise en conformité des données du système d'information avec ces règles. La conséquence pour le DSI est qu'il se voit déchargé de sa responsabilité de fait sur les données. Reda Gomery a cependant tempéré : « la France est en retard dans ce mouvement car les organigrammes y sont plus rigides que dans les pays anglo-saxons ».

L'El Dorado des données externes

La deuxième tendance identifiée par Deloitte concerne l'intégration des données externes dans le système d'information en les rapprochant de données internes. Ces données peuvent notamment venir du web et des réseaux sociaux. « La valeur des données externes provient en général du croisement avec les données internes » a soulevé Reda Gomery.
Celui-ci a également expliqué : « quand les entreprises se rendent compte de la valeur de leurs données pour d'autres, elles s'interrogent sur les formes possibles de partenariat, éventuellement sous forme de vente ou d'échange de données ». Un partenariat serait ainsi en réflexion en France entre un opérateur télécom et une banque pour rapprocher les localisations de smartphones et celles des retraits par carte bancaire dans les distributeurs automatiques de billets. Si des retraits se font de manière éloignée du smartphone du titulaire de la carte, la probabilité que la carte ait été volée augmenterait.

Les objets connectés comme producteurs massifs de données

La tendance suivante « aurait pu être sur la première marche du podium » selon Reda Gomery. Il s'agit des objets connectés comme sources massives de données. Ces objets connectés se généralisent, du compteur communiquant Linky d'ERDF (et Gazpar de GRDF) à l'automotive chez les principaux constructeurs automobiles.
Mais les systèmes d'information ne sont pas nécessairement bien adaptés à l'intégration de ces données. Il faut en effet identifier les objets. Il faut capter les données avec la bonne fréquence. Et enfin il faut valoriser les données collectées. Une nette majorité des entreprises juge qu'il faudra accroître leurs capacités à traiter ces données, notamment pour améliorer les services offerts aux clients.
Ces objets réalisant des « accès indirects » aux progiciels de gestion intégrés, le licencing rapace de certains éditeurs (SAP en premier lieu) peut-il être un frein considérable au développement des objets connectés ? « Le plus grand frein est plutôt à chercher dans l'absence de protocole unique de communication, même si des discussions sérieuses devront avoir lieu avec les éditeurs de PGI » a jugé Reda Gomery.

Analytique : diversification et évolution des usages

La multiplication des sources de données va de pair avec la généralisation des usages de ces données dans les entreprises. C'est la quatrième grande tendance isolée par Deloitte. La généralisation implique la simplification. Cette tendance, bien que marquante en 2016, n'est pas nouvelle. La Data Discovery, la Data Visualisation, la diffusion sur terminaux de type tablettes... Tout cela est déjà bien connu des DSI et de leurs entreprises mais qui devrait être renforcé dans plus des deux tiers des entreprises l'année qui vient.
La seule véritable nouveauté en la matière est peut-être l'émergence dans le monde réel de l'entreprise, en dehors des laboratoires et de quelques start-up, de l'apprentissage automatique (machine learning) et de l'analyse cognitive (cognitive analytics). IBM a ainsi conçu son Watson sur ce modèle.

L'éthique au delà des obligations légales

Mais multiplier les traitements de données n'est pas sans poser de problèmes. Déjà, nous l'avons vu, l'émergence des CDO est très liée à la préoccupation de conformité légale des systèmes d'informations, surtout en lien avec la réglementation sur les données personnelles. Au delà des obligations légales, il existe aussi les désastreuses conséquences économiques en lien avec les manquements et les failles, si les clients ou les consommateurs perdent confiance dans l'entreprise concernée. Mais, selon Reda Gomery, plus loin encore, les entreprises ont bien une préoccupation d'éthique dans l'usage des données, sans se focaliser sur les seuls risques financiers encourus.
Deloitte ne cache pas que cette soudaine moralisation est aussi associée à une vision patrimoniale des données. Celles-ci sont ainsi de plus en plus considérées comme un actif à protéger. Mais il faut aussi valoriser ce qui a été laissé à l'écart. Reda Gomery a ainsi cité l'exemple d'un distributeur d'électro-ménager qui se désolait de ne pas disposer d'informations sur ses clients et envisageait de créer un programme de fidélité. Jusqu'au jour où il s'est aperçut qu'il disposait de tout ce dont il avait besoin au service après-vente... Les données cachées seront sans doute en elles-mêmes un jour une tendance.

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