Stellantis pilote sa supply chain sans freiner son SI opérationnel
À Vesoul, Stellantis gère son centre logistique de pièces détachées avec un outil maison. Pour piloter l'activité, le constructeur a déployé une architecture data dédiée.
Publicité665 000 mètres carrés (plus de 90 terrains de football), 300 000 références, 95 000 lignes de commandes par jour. À Vesoul, Stellantis gère ce qui est tout simplement le plus grand centre logistique d'Europe, recevant, stockant et expédiant des pièces détachées pour de multiples modèles de véhicules des marques du groupe (Alfa Romeo, Chrysler, Citroën, Fiat, Lancia, Open, Peugeot...), mais pas uniquement. « Pour gérer ces opérations, nous exploitons un WMS (Warehouse Management System, NDLR) maison, qui a été développé à partir du début des années 2000, avec du code Java, un peu de .Net et un sous-jacent SAP. L'ensemble se traduit par une complexité applicative importante », raconte Mickael Collardey, responsable de programmes IT & innovation pour la supply chain pièces de rechange du groupe automobile, présent lors du salon Big Data & IA qui s'est tenu à Paris fin septembre.
Une structure efficace opérationnellement, mais qui rend le pilotage de l'activité complexe. « Nous pilotions l'activité à J+1, via des traitements en batch », indique Mickael Collardey. Pour améliorer ce volet décisionnel, Stellantis a d'abord mis en place un datalake, permettant de copier la donnée en temps réel pour établir des KPI, mais cette béquille ne fournit pas d'historisation de la donnée, donc pas de capacité à établir des tendances. Pour dépasser ces limites, Stellantis s'est alors tourné vers la société de services OnePoint pour réaliser un premier pilote en 2021. Principale contrainte : ne pas toucher à l'outil opérationnel, qui ne doit connaître aucune perturbation.
Identifier les bonnes données : 50% du temps du projet
« Pour accéder au WMS sans en perturber le fonctionnement, nous avons misé sur des fonctionnalités de Change Data Capture », raconte Frédéric Miszewski, architecte data senior au sein de l'ESN. Les données sont ensuite streamées par un bus Kafka Confluent, qui traite 4 millions de lignes par jour, traitées au fil de l'eau dans HSQLDB et historisées dans MongoDB. « Sur ce socle, nous avons la capacité à réaliser des micro-batchs via des scripts Python, afin de créer des rapports PowerBI sur des fenêtres temporelles bien précises », précise le consultant. Lancé en mai 2021, le projet, mené sur des environnements Azure, est livré en septembre de la même année. « 50% du temps du projet a été consacré à aller chercher la donnée actionnable. Mais cela a aussi permis de travailler avec les responsables fonctionnels et d'amener un réel dynamisme au projet », note Frédéric Miszewski. « Identifier les données dans le nuage applicatif a demandé énormément de temps », reconnaît Mickael Collardey.
De gauche à droite, Mickael Collardey, responsable de programmes IT & innovation pour la supply chain pièces de rechange de Stellantis, et Frédéric Miszewski, architecte data senior chez OnePoint, sur la scène de Big Data & IA Paris. (Photo : R.F.)
PublicitéUn suivi des véhicules immobilisés en concessions
Sur cette base technique, Stellantis a commencé à déployer des cas d'usage analytiques. Comme le suivi du travail accompli et celui de l'évolution des stocks. Ou encore comme le suivi des VOR (Vehicle off-road). « Ce sont des véhicules immobilisés en concessions, faute de pièces pour les réparer. Même s'il ne représente que 200 à 300 lignes de commandes par jour, le sujet a été érigé comme une priorité au sein du groupe. Or, identifier ces pièces à livrer d'urgence au sein du flux de commandes reste difficile », précise Mickael Collardey. Pour améliorer le traitement des VOR, le groupe automobile a mis en place une 'task force' dédiée, qui a permis d'améliorer le situation... avant de voir ses résultats plafonner faute d'outil de suivi adapté. Ce n'est qu'avec la mise en place d'un reporting dédié, en septembre dernier, que le groupe a pu effectuer un nouveau bond en avant, passant au global de 2 jours à une demi-journée de délai de traitement au sein du site de Vesoul. « Sur ces applications, calculer un ROI reste complexe, du fait du grand nombre d'éléments externes à prendre en compte. Le principal gain se situe dans la satisfaction client », dit le responsable de programmes IT & innovation.
Capable de descendre à des niveaux proches du temps réel, soit 10 à 15 minutes - « le vrai temps réel n'ayant aucun sens au niveau métier », selon Mickael Collardey -, l'architecture conçue par OnePoint se veut modulaire et extensible. « Nous avons pensé la solution pour qu'elle soit connectable à tout autre site Stellantis », assure Frédéric Miszewski. De leur côté, les équipes de Vesoul demeurent prudentes : si aucun incident en production n'a été signalé sur le WMS par Mickael Collardey, Stellantis n'en a pas moins étendu le champ des tests sur son outil de production.
Article rédigé par
Reynald Fléchaux, Rédacteur en chef CIO
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