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Préparation des données pour l'IA : le hiatus entre dirigeants et équipes informatiques

Préparation des données pour l'IA : le hiatus entre dirigeants et équipes informatiques
84% des informaticiens, data scientists, data architects et data analysts passeraient au moins une heure par jour à résoudre des problèmes de données, selon une étude Capital One. (Photo : Pixabay/Buffik)

Selon une étude de Capital One, les décideurs sont persuadés que leurs données sont prêtes pour l'IA, mais la réalité du terrain voit leurs équipes IT passer des heures à mettre les data en forme et finalement passer à côté d'opportunités réelles d'automatisation.

PublicitéLes chefs d'entreprise peuvent être convaincus que les données de leur entreprise sont prêtes pour l'IA, mais ce n'est pas du tout le point de vue des équipes informatiques qui passent souvent des heures chaque jour à mettre en forme ces data. Près de neuf chefs d'entreprise sur 10 interrogés dans une récente enquête de Capital One sur l'état de préparation à l'IA, affirment que les écosystèmes de données de leur entreprise sont prêts pour le déploiement de systèmes d'IA à grande échelle. Un point de vue en décalage total avec celui des équipes informatiques. 84 % des informaticiens, data scientists, data architects et des data analysts interrogés passent au moins une heure par jour à résoudre des problèmes liés aux données, plutôt que de travailler sur l'exploitation concrète de l'IA. 70% d'entre eux y passent même entre une et quatre heures quotidiennes et 14 %, plus de quatre heures.

Un malentendu profond

L'enquête met ainsi en évidence un « malentendu profond chez de nombreux décideurs concernant le travail nécessaire sur les data pour déployer la plupart des outils d'IA », comme le précise John Armstrong, directeur technique de Worldly, une plateforme d'analyse des données pour la supply chain durable. « Ils ont l'impression qu'il suffit de jeter des données à manger à l'IA et que cela résoudra tous les problèmes. Un des rôles des experts techniques est bel et bien d'éduquer les décideurs sur ce qu'il est possible ou non de faire pour atteindre son objectif. » Les conséquences de cette perception erronée et persistante sont énormes, selon lui. « Si l'organisation data d'une entreprise n'est pas préparée, elle pourrait dépenser littéralement des millions de dollars pour une solution inadéquate et en sortir de mauvais résultats ».

Pour Justice Erolin, CTO de la société de service Bairesdev, il suffit parfois de projets pilotes réussis ou de la démonstration d'un algorithme performant pour donner de faux espoirs aux dirigeants. « Or, une vision holistique du sujet raconterait une tout autre histoire ! ». Un des clients de Bairesdev aurait ainsi eu la surprise de consacrer 30% d'un projet d'IA à intégrer ses systèmes existants. De façon générale, lorsque les équipes data ou IT doivent quotidiennement s'atteler durant des heures à réparer les données, il s'agit souvent d'un signe d'impréparation de la data de l'organisation aux exigences de l'IA. Les entreprises prêtes à passer l'IA devraient d'ailleurs au moins automatiser en partie la gestion des données, et ne pas employer leurs experts data pour le maintien opérationnel de l'IA et le nettoyage des données.

Le problème de l'existant

Pour Rupert Brown, CTO et fondateur d'Evidology Systems, un fournisseur de solutions de conformité, les systèmes existants qui ne collectent et ne stockent qu'une quantité limitée de données font partie du problème. Certaines entreprises exploitent des logiciels et des middleware anciens qui ne sont pas conçus pour collecter, transmettre et stocker des données de manière adéquate pour alimenter les modèles d'IA modernes. « Dans le futur proche, la non-qualité des données va encore limiter l'intérêt de l'IA, ajoute Rupert Brown. Les systèmes existants qui fonctionnent avec des champs de taille limitée par exemple, ou des numéros de compte également limités, qui doivent être recyclés, sont toujours répandus dans l'industrie, ce qui engendre des corrections que l'IA ne peut pas comprendre. »

PublicitéÉduquer les parties prenantes

Pour pallier ce décalage entre une confiance trop élevée des dirigeants dans la préparation des données et le travail quotidien nécessaire des équipes IT pour maintenir la data, il est essentiel d'éduquer les parties prenantes non techniques aux réalités et aux défis de la mise en oeuvre de l'IA. « Lorsque les dirigeants comprennent les vrais enjeux de l'IA et le temps que les équipes techniques consacrent à y répondre, ils sont davantage susceptibles d'investir dans des pratiques data robustes et d'aligner les attentes des uns et des autres », estime Justice Erolin.

Pour Terren Peterson, vice-président de l'ingénierie des données chez Capital One, le succès de la GenAI pourrait bien aider à engager ce type de démarches. « L'hygiène, la qualité et la sécurité des données sont autant de sujets dont nous parlons depuis 20 ans, explique-t-il. Mais aujourd'hui, le succès de L'IA et du machine learning pourrait bien attirer davantage l'attention sur ces éléments fondamentaux de la gestion de données ! Et la révolution de la GenIA pourrait aider à comprendre que la qualité des données est cruciale. Même si ces sujets sont longtemps restés au fin fond des ordres du jour des DSI, ils vont désormais devenir prioritaires. »

De petits prototypes

Alors que de nombreux chefs d'entreprise se passionnent aujourd'hui pour le déploiement de la GenAI, John Armstrong de Wordly recommande aux responsables informatiques de se concentrer sur les cas d'usage, plutôt que sur des technologies d'IA spécifiques. Dans certains cas, les technologies les plus anciennes, telles que le machine learning ou les réseaux neuronaux, seront plus adaptées et beaucoup moins chères pour l'objectif envisagé. « La GenAI utilise d'énormes quantités d'énergie par rapport à d'autres outils d'IA », note-t-il par ailleurs. Pour lui, les DSI devraient aussi plutôt lancer de petits prototypes pour trouver les meilleurs cas d'usage de l'IA pour leurs organisations, tout en sachant que certaines expériences ne fonctionneront pas. « L'expérimentation n'a pas besoin d'être gigantesque, mais elle suffira à familiariser l'entreprise avec l'IA », poursuit-il.

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