Philippe Roques (Capgemini) : « En adoptant toutes les bonnes pratiques, le budget de la DSI peut être optimisé de 37% »


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DécouvrirEn retraitant l'analyse des porte-feuilles applicatifs de ses clients durant les cinq dernières années, Capgemini a extrait des bonnes pratiques en la matière. Entre les meilleurs et les moins bons, l'écart de coût est considérable. Et l'agilité est aussi un enjeu de l'adoption des meilleures pratiques.
Publicité« Entre les meilleurs et les moins bons, la différence de budget de la DSI est de 37% sur le sujet du porte-feuille applicatif » constate Philippe Roques, responsable Europe pour le marché de l'application portfolio management (APM) chez Capgemini. Ce chiffre considérable est issu du retraitement des analyses opérées chez une centaine de clients très grands comptes ces cinq dernières années. En tout, près de un million de points d'entrées ont été pris en compte dans l'étude réalisée sur les six premiers mois de 2015.
En appliquant toutes les meilleures pratiques repérées chez les uns et les autres, le gain financier n'est pas le seul bénéfice. Il s'agit aussi de mieux maîtriser les risques. Le time to market est également raccourci, passant d'une estimation en mois à une durée exprimée en semaines. Enfin, les meilleures pratiques permettent aussi d'accroître l'agilité. Philippe Roques relève : « il s'agit ici d'agilité dans le sens de la facilité à adapter le SI aux évolutions de l'entreprise. » L'usage de méthodes agiles dans le développement n'est pas incompatible avec l'agilité du SI mais ce sont bien deux sujets différents. La conception trop rapide peut aboutir à un SI devant être refait à chaque évolution notable, ce qui n'est pas du tout, pour le coup, agile au sens donné ci-dessus. Malgré tout, « le time to market est plus important que le coût total de possession pour les meilleurs, les bonnes pratiques permettant de délivrer de nouveaux composants en quelques semaines au lieu de dix-huit mois pour les plus mauvais » souligne Philippe Roques.
Très coûteuses fausses économies
Pour Philippe Roques, « la base est le bon dialogue IT/métier dans le cadre d'une gouvernance globale. » Il dénonce la réduction à marche forcée des budgets, le cost-killing acharné, comme une source de fausses économies. En effet, faute de trouver auprès de la DSI une réponse à leurs besoins, notamment pour soutenir l'innovation, les métiers se tournent vers le shadow-IT. De ce fait, les coûts IT globaux augmentent en même temps que les risques.
Autre très mauvaise idée, la personnalisation de progiciel (customization). Il faut choisir : soit on prend du progiciel, soit on développe du spécifique. Mélanger les deux génère des coûts considérables pour un bénéfice médiocre. « On peut économiser 10% du budget en supprimant la personnalisation de progiciels » indique Philippe Roques.
En la matière, la bonne pratique de base est d'opter autant que possible pour du progiciel sans sortir des processus prévus par l'éditeur. Mais, lorsqu'il y a un vrai différenciateur de l'entreprise sur son marché, il ne faut pas hésiter à développer un logiciel spécifique. Le cas échéant, le DSI doit savoir taper du poing sur la table pour ne pas être embarqué dans la modification mineure d'un écran pour faire plaisir un responsable de service un peu obtus.
PublicitéSe concentrer sur l'essentiel
En moyenne, les entreprises disposent d'un parc de 500 à 1000 applications. Il ne s'agit pas d'examiner une à une chacune d'entre elles : le coût de l'étude deviendrait supérieur au bénéfice possible. Pour Philippe Roques, « les enjeux économiques sont surtout en termes de consommation de ressources humaines pour la maintenance des applicatifs. En dessous de 150 jours.homme par an, il s'agit d'une petite application sans enjeu économique. »
Notons qu'une application peut être vitale ou comporter de nombreux points de fonction sans qu'elle soit ici considérée comme un enjeu essentiel. « Si tout roule, il n'y a pas de sujet » résume Philippe Roques. Une application mature ne donne en général pas lieu à des économies importantes si on cherche à l'optimiser, l'optimisation ne pouvant être que marginale. Or le but de la démarche proposée par Philippe Roques est d'aboutir à des économies importantes en moins de dix huit mois. Pour les applications mures, une évolution doit suivre un cadre plutôt formel. A l'inverse, un projet non-mûr doit pouvoir être conduit en méthode agile.
Un modèle de maturité
Trois thèmes sont à aborder dans le cadre de l'optimisation de l'APM : la gestion de la demande (par les métiers à la DSI), la gestion des actifs logiciels eux-mêmes et enfin la gestion des équipes ayant en charge les applications. Les meilleurs DSI sont des contributeurs de valeurs pour les métiers : ils garantissent une bonne couverture des processus métier, l'innovation et la transformation des SI. Mais ils sont aussi facteurs d'efficience financière, ce qui, nous l'avons vu, n'est pas à confondre avec la coupure à tout va dans les coûts : ils sont ainsi capables de maîtriser les coûts de possession, industrialiser et rationaliser le parc applicatif.
En utilisant les deux axes de la contribution de valeur et de l'efficience budgétaire, Capgemini a défini un graphe permettant d'estimer la maturité de l'entreprise en matière d'APM. Les moins bons s'améliorent en général sur un seul des axes avant de pouvoir s'améliorer sur l'autre. Ceux qui sont bons sur les deux axes ont, le plus souvent, subi une très forte pression de multiples contraintes. Cela dit, la maturité n'est pas le propre des plus grands groupes. Philippe Roques observe : « les meilleurs sont tous leaders mais les leaders peuvent être mauvais, simplement parce qu'ils sont riches et n'optimisent pas. »
Le bon sens n'est pas ce qui est le plus partagé
Quelques corrélations ont pu être remarqués lors du retraitement initial des données par Capgemini. Ainsi, il semble exister un lien criticité-complexité. De même, la démarche de bilinguisme IT-métier, avec un business owner (responsable du processus couvert par l'application) unique et clairement identifié, sera aussi un point important pour l'optimisation.
Et, bien évidemment, des points particuliers semblent concentrer les différences les plus notables entre bons et mauvais. Ainsi, la simple expression de la demande métier et la manière de la gérer focalise un potentiel d'économie de 5% à lui seul. Une application bien conçue va en effet nécessiter ensuite moins d'effort de maintenance, simplement parce que sa maintenabilité sera meilleure et son amélioration agile sera donc moins coûteuse.
Article rédigé par

Bertrand Lemaire, Rédacteur en chef de CIO
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