Tribunes

Les régimes de gouvernance SOA

Les régimes de gouvernance SOA

Les nouvelles architectures du SOA (MDM, BRMS) invitent à revoir la stratégie d'innovation par les systèmes d'information (SI) et appellent une gouvernance de SI différenciée. A cette fin, nous avançons une représentation de la trilogie MOA-MOE-MUE probablement inédite pour les systèmes d'information métier.

PublicitéUne reconfiguration d'une entreprise en processus (business process re-engineering) est couplée le plus souvent avec la mise en oeuvre d'un progiciel de gestion intégré (« PGI »). Un PGI propose des processus préconfigurés d'après les meilleures pratiques en organisation qu'il suffit de paramétrer suivant le contexte de l'entreprise. Initialement beaucoup plus facile qu'un développement partant d'un cahier des charges fonctionnelles, ce paramétrage s'est malheureusement complexifié pour répondre à une diversité de contextes de plus en plus grande.

On a vu alors apparaître vers 2005 [1] le concept de système d'information à architecture orientée services applicatifs (Service Oriented Architecture, « SOA »). L'idée était de retrouver cette simplicité de mise en oeuvre tout en gardant la faculté de capitalisation des pratiques.

Dès lors, un processus n'est plus exécuté par un appel unique à une série d'instructions programmées mais par une suite d'activation de services élémentaires produits par des modules d'instructions autonomes. Egalement, les données intégrées dans les instructions sont séparées et regroupées dans des modules en contrôlant l'accès, les fameux « objets métier », dont le design est étroitement associé à leur efficience. Ce mécanisme doit apporter la souplesse requise. Quand à la capitalisation, celle-ci doit être assurée par ajout de services ou de modules supplémentaires. Pour évoquer les avantages de cette approche, on parle de chorégraphie de services.

Cinq ans après, il semble que l'approche SOA n'ait pas totalement rempli ses promesses : être un bon designer ou chorégraphe requiert savoir-faire, expérience et talent.
Alors, pour assister les premiers, on voit apparaître dans les plateformes SOA des programmes spécialisés (Master Data Management, « MDM ») qui aident à concevoir des objets métier dont le design garantit la réusabilité et la versatilité. Pour les seconds, ce sera d'autres programmes spécialisés (Business Rules Management System, « BRMS ») qui définissent les règles pour appeler les différents services.

Nous pensons que ce renouvellement des pratiques d'architecture de SI appelle une mutation de la gouvernance de système d'information. Une chorégraphie de services est une création conjointe entre le fournisseur de studio SOA et le chorégraphe, ce qui pose directement la question de propriété intellectuelle de cette co-création.
Or, le modèle Maîtrise d'Ouvrage-Maîtrise d'oeuvre (MOA-MOE) qui encadre en France la gouvernance de SI est impuissant à représenter la séparation entre le propriétaire d'un ouvrage intellectuel et son usager, pré-requis pour adresser une problématique de propriété intellectuelle.

Pour instruire cette séparation, nous introduisons aux cotés de la MOA et la MOE la maitrise d'usage [2], une notion issue de l'aménagement du territoire et que certains désignent par MUE dans des projets internet [3] et intranet [4]. Tout en faisant muter le modèle MOA-MOE en modèle MOA-MOE-MUE [5], nous avançons trois régimes désignés respectivement par « Régime IT », «Régime IS » et «  Régime JI».
Dans Régime IT, la maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'usage sont portées par le chorégraphe tandis que la maîtrise d'oeuvre l'est par le fournisseur du studio SOA. En Régime IS, la maîtrise d'ouvrage change de main et passe au fournisseur qui cumule alors la maîtrise d'oeuvre et la maîtrise d'ouvrage, la maîtrise d'usage restant au chorégraphe. Dans la dernière, la maîtrise d'ouvrage est portée conjointement par le chorégraphe et le fournisseur.

PublicitéCes régimes sont institués par des dispositifs relationnels. En Régime IT, le fournisseur s'engage vis-à-vis du chorégraphe à des niveaux de qualité de service. En Régime IS, en sus de ces engagements, le fournisseur et le chorégraphe déterminent des objectifs de performances pour les ressources qui produisent ces services. Enfin, en Régime JI les deux partenaires s'arrangent sur des dispositifs de gouvernance de service. Pour désigner respectivement ces « engagements de qualité de service » et ces « objectifs de performances de ressources », nous réutilisons tout en les réinterprétant  [6] la notion de SLA qui désigne classiquement un contrat de service passé entre un utilisateur et un prestataire de SI, et celle de OLA  qui désigne le plus souvent un contrat de service entre entité internes à un prestataire. Pour les arrangements de gouvernance de service, nous les désignerons par SGA.

L'instauration d'une gouvernance différenciée propre à adresser la problématique de propriété intellectuelle permet de mettre en oeuvre une véritable stratégie d'innovation par un système d'information orienté SOA.

Références
[1] IBM SOA Executive Summit, Paris, 12 juin 2006, IBM SOA Technology Summit, Paris, 13 juin 2006.
[2] Maîtrise d'usage, une notion innovante, Tru Dô-Khac, CIO-online, 23 août 2010.
[3] Le Portail des Métiers de l'Internet, Délégation aux usages de l'Internet, 2009.
[4] Management des nouvelles technologies et e-transformation, Michel Germain, éd. Economica, 2006.
[5] Mutation du modèle MOA-MOE, Tru Dô-Khac, Bestpractices-SI, N°44, avril 2010.
[6] L'externalisation des télécoms d'entreprise, Tru Dô-Khac, Hermes Lavoisier, 2005.


Partager cet article

Commentaire

Avatar
Envoyer
Ecrire un commentaire...

INFORMATION

Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.

Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire

    Publicité

    Abonnez-vous à la newsletter CIO

    Recevez notre newsletter tous les lundis et jeudis