Stratégie

Le Cloud privé souligne les faiblesses de la DSI

Le Cloud privé souligne les faiblesses de la DSI

En France, les DSI privilégient le Cloud privé afin de conserver la maîtrise de l'informatique. Mais ils ne vont pas jusqu'au bout du modèle. Le DSI ne s'assume pas encore en tant que marchand de services. Les compétences attendues des informaticiens évoluent également.

PublicitéLes DSI choisissent la voie du Cloud privé mais la majorité n'applique pas le modèle jusqu'au bout. Il leur faut s'accrocher pour continuer de piloter une informatique qui commence à être gérée directement par les métiers avec le succès du Cloud public et du Saas.  Il faut dire que les métiers sont pressés et n'ont pas le temps d'attendre la DSI.

Ce sont quelques uns des enseignements que l'on peut tirer de la table ronde organisée à l'initiative du Club de la presse informatique B2B, le 23 janvier.

En ouverture, Mathieu Poujol, analyste chez PAC, a rappelé qu'il n'y a pas de doute, « la France et l'Allemagne sont les pays du Cloud privé. » L'information est remontée dans le cadre d'une enquête menée auprès de 350 DSI. A la question « Quel type de Cloud utilisez-vous dans votre entreprise ? » 73% des DSI français répondent utiliser du Cloud privé et 27% du Cloud public.

Pour l'analyste, l'explication est simple, les DSI ne vont pas scier la branche sur laquelle ils sont assis. Le Cloud privé leur permet de conserver la maîtrise de l'informatique. Dans le futur, le Cloud va progresser à petite vitesse, poids de l'héritage oblige, puisque seulement un quart de l'informatique sera faite en Cloud dans sept ans ! L'évolution est très lente. Et dans ce cadre, le Cloud Public ne représentera que 7% des dépenses.

Pour Patrice Duboé, responsable de la communauté des architectes de Capgemini au niveau mondial, « 10% du Système d'information est passé au mieux dans le Cloud aujourd'hui. Les clients passent au Cloud sur les nouvelles applications. »

Les cahiers des charges demandent explicitement du Cloud hybride ...

Photo : de gauche à droite, Karine Brunet, de Steria, Jean-Marc Defaut, de HP France, et Patrice Duboé, de Capgemini, en débat sur le cloud privé. (crédit photo : D.R.)




Les cahiers des charges demandent explicitement du Cloud hybride

Ceci dit, le Cloud privé pourra être hébergé chez un infogérant et l'on verra des Cloud hybrides, associant une infrastructure privée et des services publics.

« Nous voyons arriver aujourd'hui des cahiers des charges émis par les entreprises avec une demande explicite de création de Cloud hybride, avec la base de données dans l'entreprise et les services Web à l'extérieur », pointe Jean Marc Defaut, directeur de l'activité Cloud chez HP France.

Ce type d'infrastructure permet notamment de répondre à une demande de « Burst » (débordement) par exemple pour des sites Web de e-commerce lors du pic des soldes, afin de tenir les SLA (niveaux de service).

Toutefois, le modèle du Cloud privé n'apporte rien de réellement nouveau et n'est pas poussé jusqu'au bout de son modèle. « La virtualisation, tout le monde en fait depuis longtemps » constate Karine Brunet, directrice des lignes de services industrielles chez Steria. De plus, les mécanismes d'un vrai Cloud privé ne semblent pas être au rendez-vous, avec la possibilité de provisionner des machines à la hausse comme à la baisse et en mode self-service.

Publicité « La promesse du Cloud, ce n'est pas le Cloud privé, ça c'est de l'infrastructure » résume Karine Brunet. Elle pense même que  « le Cloud privé est le plus gros ennemi du Cloud. » C'est que via le Cloud privé, le DSI s'emploie à conserver la main sur le système d'information face à des métiers qui ont tendance à s'émanciper et à acquérir seuls leurs propres solutions.

La question qui fâche les DSI ...



La question qui fâche les DSI 

Face aux services de Cloud public, Karine Brunet demande alors aux DSI d'être plus indulgents. « On ne peut pas demander aux Clouds publics de délivrer des niveaux de service que les informatiques internes n'atteignent pas » pointe-t-elle. Et de rappeler que la question qui fâche les DSI est « Combien de récupération de données depuis vos sauvegardes avez-vous réussi ces derniers temps ? »

Jean Marc Defaut veut relativiser : « certains de mes clients réalisent du provisionnement en 5 minutes. » L'intérêt du Cloud privé c'est de disposer de serveurs de développement et de test et de pouvoir répondre aux pics de trafic. Or, il indique que « la moyenne en France de livraison d'une machine virtuelle est de 6 semaines aujourd'hui, cela ne convient pas ! »  

Il reconnaît qu'un vrai Cloud privé doit intégrer des processus automatisés de bout en bout, depuis la commande d'un environnement de travail jusqu'à son déploiement. « Soit on est 100% automatisé, soit on ne l'est pas. Si on n'est pas 100% automatisé alors ce n'est pas du Cloud » martèle-t-il. Cependant, « Monter une infrastructure as a service ne sert à rien. Il faut penser application » pense-t-il. Or, les DSI ne sont pas encore devenus des marchands.

« Publier un catalogue de services pour le DSI c'est l'amener en permanence à se justifier » relève-t-il. Dans l'entreprise, le DSI se voit alors interrogé sur le coût de ses services par rapport aux tarifs des prestataires extérieurs. Pour autant, Jean Marc Defaut pense que le DSI doit s'assumer en tant que broker de services et délivrer selon le triptyque « Prix, Valeur, Délai», sans oublier la notion nouvelle de Plaisir!

Un plaisir dont le DSI doit en tenir compte avec l'arrivée des smarphones grand public dans l'entreprise. Quant à Patrice Duboé, il constate l'écart entre les directions métiers qui ont recours au Cloud public et les DSI partisans des infrastructures privées.  « Le business vient me voir en direct pour aller vite, pour une mise en service en 7 semaines » note-t-il. Jean Marc Defaut confirme cette accélération demandée des mises en production. Une demande qui est même maximale pour les applications mobiles.

Le développeur devient responsable de ses SLA ...



Le développeur devient responsable de ses SLA

Cette accélération des demandes, pousse vers un modèle d'informatique dans laquelle le développeur devient responsable de ses SLA, estime Jean Marc Defaut. Il cite en exemple les propos du CTO de Netflix, une société qui diffuse des films en streaming sur internet, qui prêche pour une organisation de type « DevOp » s'appuyant sur un catalogue de services.

Le code programmé doit être propre car c'est de lui que tout dépendra à l'heure où l'infrastructure est pour sa part maîtrisée via un Cloud privé et son catalogue de services et de SLA associés.  

Cet aspect est critique. Pour Jean Marc Defaut, il faut gérer la zone grise des mises en production. Trop souvent, celle-ci se déroule mal alors que l'application a été bien développée et que l'infrastructure fonctionne. Cette nouvelle complexité rebute les responsables informatiques au point qu'ils veulent éviter de se pencher de façon trop poussée dans les « stacks techniques » relève Mathieu Poujol. Ils préfèrent négocier sur les prix.

Par exemple, l'analyste a récemment discuté avec un directeur des infrastructures d'un grand groupe qui a finalement opté pour un poste de travail à 40 € dans le Cloud sans vouloir décortiquer les composants techniques. Cette évolution rapide des technologies et des services via le Cloud fait d'ailleurs apparaître des manques de compétences chez les informaticiens. « Les tâches d'administration baissent, et de nouveaux métiers apparaissent » confirme Karine Brunet. En exploitation, les compétences en middleware deviennent critiques.

Elle estime que l'on manque aussi d'Enterprise Architect, des gens capables d'appréhender l'architecture complète des systèmes d'information depuis les applications jusqu'à l'infrastructure. Il faut également des architectes Cloud et des gens capables de comprendre ce qu'est la Supply Chain de l'informatique depuis le développement jusqu'à la mise en production sur des environnements hybrides.  « Il y a moins besoin d'administrateurs, confirme  Patrice Duboé, « et il faut maîtriser le bus interapplicatif au coeur des échanges », conclut-il. 

Partager cet article

Commentaire

Avatar
Envoyer
Ecrire un commentaire...

INFORMATION

Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.

Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire

    Publicité

    Abonnez-vous à la newsletter CIO

    Recevez notre newsletter tous les lundis et jeudis