Le cloud privé, accélérateur de transformation de la DSI
Après près d'une décennie de gestation, jalonnée d'annonces prématurées, de faux-départs, mais aussi, fort heureusement, de nombreuses expérimentations concluantes, le cloud computing est désormais engagé dans une irrésistible marche en avant. Parmi les variantes de ce nouveau modèle de mise à disposition des ressources informatiques, le concept de cloud privé suscite un engouement particulier auprès des DSI.
PublicitéPlusieurs études le confirment, les entreprises, notamment les plus grandes, font de la mise en place d'un cloud privé une priorité (Par exemple, selon Gartner : « Top Five Trends for Private Cloud Computing », Février 2012). Cela contraste avec leur prudence vis-à-vis du cloud public. Cette préférence se comprend aisément. Les bénéfices du modèle cloud en général ont été largement décrits : agilité accrue du SI, amélioration de la qualité de service ou encore optimisation des dépenses - soit sous la forme d'une réduction des coûts globaux, soit par un rééquilibrage en faveur des dépenses de fonctionnement, aux dépends du capital immobilisé. Mais pour nombre d'entreprises, le cloud computing originel, le cloud public, prête le flanc à de trop nombreuses objections, par exemple sur la sécurité et le contrôle des informations sensibles. Il ne peut donc constituer une réponse universelle à leurs besoins. Les entreprises se retrouvent donc tiraillées entre un intérêt réel pour ce paradigme nouveau dont elles discernent bien le potentiel, et leur souhait de conserver la maîtrise des services et des informations qu'offrent les approches traditionnelles. Conçu comme un compromis entre ces deux aspirations en apparence contradictoires, le cloud privé trouve naturellement un espace pour se développer.
Deux critères: l'exclusivité des ressources et la maîtrise du catalogue de services
Derrière le concept de cloud privé se cachent en réalité plusieurs cas de figure. Il suffit pour s'en rendre compte de croiser les possibilités en matière de localisation (l'infrastructure peut se trouver dans les locaux de l'entreprise ou dans ceux d'un fournisseur de services), et celles en matière de sourcing (l'infrastructure peut être opérée par les équipes de l'entreprise ou confiée à un prestataire). Mais au bout du compte, ce n'est ni la propriété des moyens de production, ni l'appartenance des équipes en charge de l'exploitation qui définit ce qu'est un cloud privé. Qu'il soit IaaS, PaaS ou SaaS, le cloud privé se distingue avant tout par le caractère exclusif des ressources mobilisées et des services offerts, ainsi que par la maîtrise qu'exerce la DSI sur l'offre de services. Dans un cloud privé les moyens sont dédiés et les services sont produits pour le bénéfice exclusif d'un donneur d'ordre, qui a toute autorité pour décider de ce qui figure au catalogue. C'est tout le contraire d'un cloud public, où un opérateur propose des services standardisés à partir d'un catalogue conçu par ses soins, dans le but de les vendre au plus grand nombre, afin de maximiser l'utilisation de ses ressources.
L'état de l'art en matière d'infrastructures d'entreprise
La mise en place d'un cloud privé est un exercice complexe et ambitieux, mais parfaitement réalisable à condition de suivre une démarche structurée.
PublicitéAu cours des dernières années, de nombreuses entreprises ont initié d'ambitieux programmes de rationalisation de leurs infrastructures: standardisation, mutualisation, consolidation et virtualisation. Ces étapes constituent les bases de la construction d'un cloud privé, et présentent en elles-mêmes un intérêt, y compris lorsque le cloud privé n'est pas la finalité explicitement visée.
Cela dit, même lorsqu'une telle rationalisation a été menée, l'essentiel reste à faire. Car l'objectif «cloud privé» ne peut être atteint qu'au bout d'une transformation bien plus complète. On voit trop souvent des infrastructures tout juste consolidées et virtualisées, certes dans les règles de l'art, mais rebaptisées avec un peu trop d'empressement et d'enthousiasme «cloud privé», alors qu'elles ne disposent ni d'un catalogue des services couplé à un système de self-service, ni du provisionning automatisé des ressources, ni d'une véritable industrialisation des processus de gestion, ni d'un système de mesure et de reporting de la consommation, ni d'un modèle de facturation à l'usage. Autrement dit, il leur manque l'essentiel de ce qui fait la spécificité du cloud computing.
Des capacités optimisées
Entre autres, le cloud privé permet de rompre avec la fâcheuse habitude d'associer à chaque nouveau service un nouvel appendice (ou silo) au système d'information. Souvent, chaque silo de ce type est constitué de machines dédiées, d'instances de système d'exploitation et de stockage, réservé. Parfois, il inclut aussi des gestionnaires de bases de données, un annuaire et des middlewares spécifiques. Ces ressources, sous-utilisées la plupart du temps, nécessitent une gestion spécifique, et contribuent à complexifier davantage le SI.
Dans un cloud privé, tout ce qui peut être mutualisé et réutilisé l'est, les machines comme les services logiciels utiles aux applications. L'infrastructure de l'entreprise forme donc un tout, cohérent, organisé en couches plutôt qu'en silos. A chaque niveau, les ressources sont partagées et allouées dynamiquement aux applications en fonction de leurs besoins. Sans aller jusqu'à la promesse d'une «capacité infinie» comme dans les clouds publics, il est possible de s'en rapprocher considérablement, en partant du principe que toutes les applications ne connaissent pas leur pic d'activité en même temps. Dans tout les cas, les surcapacités propres à l'approche classique en silos sont ici largement réduites.
Un nouveau positionnement pour la DSI
L'effort de mise en place d'un cloud privé pousse la DSI à industrialiser davantage son fonctionnement et à accélérer son orientation «services», au bénéfice de ses clients.
L'idée de piloter la DSI comme une entité business à part entière, chargée de fournir des services de qualité à un prix compétitif n'est pas nouvelle. Mais elle s'avère le plus souvent difficile à mettre en oeuvre. Parmi les écueils figurent les difficultés à déterminer les véritables coûts de revient des services, à valoriser l'offre de la DSI auprès de ses clients et à mesurer la contribution du SI à l'avantage compétitif des métiers sur leurs marchés respectifs. Une autre difficulté usuelle réside dans l'exécution réussie d'un modèle de gouvernance approprié, autorisant selon la nature des décisions à prendre, le bon niveau d'implication de la direction générale et des métiers, ou un fonctionnement autonome de la DSI.
Par définition, le cloud privé favorise une plus grande transparence des coûts de production, car il intègre au coeur de son modèle la mesure de l'usage des ressources et le reporting vis vis-à-vis des utilisateurs. D'autre part, parce qu'il impose de rendre compréhensible et accessible l'offre de services, il oblige la DSI à penser intelligemment son interface avec sa clientèle, de la même manière que le ferait un opérateur de cloud public. Il accentue également le besoin de la DSI en collaborateurs exerçant un rôle purement relationnel vis-à-vis des métiers, et appelle un renforcement de ses compétences financières - pour affiner les modèles de calcul des coûts et de refacturation des services. Ensuite, la réorganisation des rôles des acteurs de la DSI autour du cloud privé peut aider à fluidifier la collaboration entre les études et la production, et de raccourcir les délais de mise sur le marché de nouvelles applications.
Enfin, en ramenant les «couches basses» du SI à leur juste place, c'est-à-dire celle d'éléments qu'il faut certes maîtriser, mais sur lesquels on doit pouvoir compter sans avoir à s'en préoccuper en permanence, le cloud privé ouvre la possibilité d'un dialogue entre l'IT et les métiers centré sur les services requis, leur contribution aux objectifs de l'entreprise et leur time to market - et non plus englué dans les détails techniques.
Ainsi, à l'occasion de la mise en place d'un cloud privé, peu d'aspects du fonctionnement de la DSI sont épargnés: gouvernance, architecture, modèle de gestion de la demande, modèle économique, ressources humaines, etc. Il faut avant tout y voir une opportunité. De la même façon que les grands acteurs historiques de l'informatique ont compris qu'il faut se réinventer dans un monde qui bascule à toute vitesse vers le cloud, les DSI peuvent trouver dans leur cloud privé un fil conducteur et un moyen se transformer pour rester compétitives et mieux servir leur entreprise.
Article rédigé par
Guy-Michel Pambi, Associé chez Logica Business Consulting
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