Le Cese préconise la création d'un grand ministère du Numérique
Le 8 juillet 2020, le Cese (Conseil économique, social et environnemental) a présenté son avis intitulé « Services publics, services au public et aménagement des territoires à l'heure du numérique ». Afin de favoriser l'inclusion numérique, il propose une douzaine de recommandations, dont la création d'un grand ministère du Numérique.
PublicitéTroisième assemblée constitutionnelle française, avec un rôle consultatif, le Cese (Conseil économique, social et environnemental) a présenté le 8 juillet un avis intitulé « Services publics, services au public et aménagement des territoires à l'heure du numérique », accompagné d'un rapport plus détaillé. Cet avis vise à répondre à trois défis : garantir l'inclusion numérique, mener la transformation des organisations avec l'ensemble des acteurs et usagers, et enfin développer l'acculturation au numérique. Il a été adopté en plénière avec 168 voix pour et 3 abstentions.
En ouverture de la présentation, le Défenseur des droits Jacques Toubon a rappelé le rôle essentiel des services publics dans la République Française, tout en pointant que « depuis 20 ou 30 ans l'implantation territoriale, les effectifs humains et les compétences associées à ces services subissent une réduction qui pose de vrais problèmes ». Il a également insisté sur la nécessité d'assurer une véritable égalité d'accès à ces services pour tous, quelles que soient les voies d'accès, physiques ou numériques. Eveline Duhamel, Présidente de la section sur l'aménagement durable des territoires, a ensuite souligné à quel point le projet d'avis montrait que « le numérique était indispensable au service public, en permettant d'offrir des services nouveaux et de qualité ». Cependant, préserver l'égalité d'accès passe aussi par des services de proximité, a-t-elle rappelé, tous les services publics n'étant pas numérisables. Pendant la présentation, Cédric O, Secrétaire d'État au Numérique de l'ancien gouvernement, est également intervenu. Il a évoqué la persistance de fractures liées au numérique, à la fois au niveau de l'accès aux droits - avec des inégalités marquées entre les territoires connectés en très haut débit et ceux qui ne le sont pas, ainsi que sur la maîtrise même de la « grammaire numérique » dans la population. Pour lui, le développement des compétences numériques pour les 13 millions de citoyens en difficulté nécessite un effort particulier.
Une Agence du Numérique et de l'Intelligence artificielle
Le rapport associé à l'avis dresse un état des lieux des services publics en France, puis s'intéresse à l'impact du numérique à la fois sur le fonctionnement des organisations et sur la relation aux usagers. Enfin, il examine les différentes options pour que la transition numérique en cours s'effectue au bénéfice de la totalité des citoyens.
Pour faire du numérique une priorité, l'avis suggère notamment la création d'un grand ministère du Numérique, ainsi que d'une Agence du Numérique et de l'Intelligence artificielle, regroupant le Conseil National du Numérique, l'Agence du Numérique, l'Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d'Information (ANSSI) et la Délégation interministérielle du Numérique (DINUM). Lors de la présentation, Patrick Molinoz, co-rapporteur du projet, a regretté que cette préconisation demeure sans écho à l'heure actuelle, le gouvernement de Jean Castex n'ayant désigné ni ministre ni secrétaire d'État en charge du sujet à ce jour.
PublicitéConstruire des services numériques responsables
Patrick Molinoz a détaillé les grands principes qui ont conduit cette réflexion, cherchant à la fois à éviter « les travers de la nostalgie, en regrettant des services publics idéalisés », et « les promesses béates d'un monde d'après totalement technologique, confondant les moyens et la fin, qui est la satisfaction des usagers. » Selon lui, l'un des travers des services numériques actuels est qu'ils sont « trop souvent pensés par des experts qui oublient les usagers. » Yves Kottelat, l'autre rapporteur du projet, a évoqué le rôle majeur des services publics en situation de crise, regrettant l'affaiblissement de leur présence territoriale au fil des ans. Il souligne que les collectivités territoriales se retrouvent aujourd'hui en première ligne pour améliorer et densifier l'offre de services publics. Ce constat est à l'origine de plusieurs préconisations de l'avis, qui portent sur la formation des agents et des professionnels de proximité, notamment les associations.
Parmi les autres préconisations, l'avis rappelle la nécessité d'accélérer le déploiement du très haut débit (fibre et/ou 4G), « l'un des enjeux les plus faciles à résoudre » selon Cédric O, pour qui « la question devrait être réglée d'ici 2022 ». Le Cese souligne également la nécessité de bâtir des services numériques responsables, en mettant notamment en place des outils pour mesurer la contribution écologique du numérique. La question de la donnée doit également figurer dans les priorités, en travaillant sur la souveraineté nationale et européenne et en développant une culture de la cybersécurité à l'échelle des collectivités locales. Le Cese recommande aussi d'associer les usagers à la conception des outils, et de prévoir dans chaque service numérique des fonctionnalités permettant aux usagers d'interagir directement avec les agents. Enfin, il suggère la création d'un label officiel pour empêcher que des opérateurs privés ne se positionnent en intermédiaires, faisant payer l'accès à des documents officiels.
Article rédigé par
Aurélie Chandeze, Rédactrice en chef adjointe de CIO
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