Stratégie

La croissance des budgets IT est absorbée par les hausses de prix des fournisseurs

La croissance des budgets IT est absorbée par les hausses de prix des fournisseurs
En ce début 2025, même quand leurs budgets augmentent, les DSI sont sous contrainte. En cause : l’inflation des tarifs chez les fournisseurs, en particulier dans le cloud et le SaaS. (Photo : Steve Buissinne/Pixabay)

Les investissements dans l'IA seront en partie à l'origine d'une hausse prévue de 10 % des dépenses informatiques cette année, mais les hausses de prix de près de 9 % dans le cloud et dans d'autres domaines vont peser sur les budgets. Imposant à de nombreux DSI des choix difficiles.

PublicitéDe nombreux DSI s'attendent à des augmentations significatives des prix du cloud et d'autres produits et services IT en 2025, ce qui obligera ceux dont les budgets stagnent à prendre des décisions difficiles en matière de dépenses informatiques.

Les DSI interrogés par le cabinet Gartner à la fin de 2024 s'attendent à une augmentation des coûts de 8,9 %, en moyenne, pour les produits et services informatiques. Ces hausses de prix, ainsi que les investissements dans l'IA, entraînent une augmentation prévue de 9,8 % de la dépense IT mondiale, toujours selon le Gartner. Pour atteindre un total de 5 620 Md$, contre 5 110 l'an dernier. Jusqu'à présent, le cabinet prévoyait une augmentation de 8,2 % de cette dépense pour 2025.

Les DSI s'attendent à des augmentations de coûts pour leurs dépenses informatiques récurrentes, notamment les services managés, le SaaS et les achats de PC et de mobiles, explique John-David Lovelock, vice-président et analyste au Gartner.

L'IA intégrée... et dûment facturée

Dans certains cas, les hausses de prix des produits et services informatiques s'accompagneront d'améliorations des caractéristiques ou d'extension des fonctionnalités, mais les DSI seront également contraints de payer plus cher pour certaines offres à iso-fonctionnalités, estime l'analyste. Par exemple, certains fournisseurs intègrent des fonctionnalités d'IA dans leurs produits et services et les facturent plus cher, même si les clients ne l'ont pas demandé, ajoute-t-il.

« D'ici deux ans, il sera pratiquement impossible d'acheter un PC, une tablette, un ordinateur portable ou un téléphone mobile sans IA, affirme John-David Lovelock. Que vous le vouliez ou non, on vous la vendra. »

Les fournisseurs ont également commencé à intégrer l'IA dans les logiciels et, dans de nombreux cas, à faire payer les clients pour cette fonctionnalité supplémentaire. Et les services de conseil ajouteront également des services basés sur l'IA à leurs portefeuilles.

Les prix du cloud montent en flèche

Mais les plus fortes hausses de prix attendues concernent les services cloud, alors que l'on s'attendait depuis des années à ce que ces tarifs n'augmentent pas de manière significative. « Pendant de nombreuses années, les DSI ont appris qu'avec le cloud, soit les prix baissaient, soit ils obtenaient plus de fonctionnalités, parfois les deux, et que les économies d'échelle réalisées par les fournisseurs permettaient au moins des prix stables, voire des baisses ou une expansion fonctionnelle, explique John-David Lovelock. Il a fallu attendre la crise énergétique post-Covid, suivie de l'augmentation des coûts de personnel, pour que cette situation s'inverse. »

PublicitéFaiz Khan, fondateur et Pdg du fournisseur de services multicloud Wanclouds, reconnaît que les prix des services cloud vont probablement augmenter cette année, « sans que cela ne signifie nécessairement que la plupart des entreprises augmentent la quantité de stockage cloud dont elles ont besoin ». « Le Gartner a raison de dire que l'inflation des coûts informatiques se poursuit dans des domaines tels que le stockage, de sorte que les entreprises paient plus cher cette année que l'an passé pour le même type de service », reconnaît Faiz Khan.

En outre, la demande augmente pour les GPU accessibles via le cloud et utilisés pour l'entraînement des modèles d'IA. « Nous constatons que les entreprises dépensent davantage pour des configurations coûteuses de GPU et qu'elles ont également besoin de plus d'heures de calcul avec ces GPU, reprend Faiz Khan. Il s'agit donc indubitablement d'une dépense supplémentaire, s'ajoutant à des coûts unitaires qui ne font qu'augmenter. »

Investissements dans l'IA, attentes plus réalistes

Outre les hausses de prix, les dépenses en matière d'IA sont un autre facteur expliquant l'augmentation des dépenses informatiques au niveau mondial, selon John-David Lovelock, même si l'IA générative se dirige vers le fameux 'creux de la désillusion', une des étapes du hype cycle de Gartner. Les attentes concernant la portée de l'IA générative diminuent, mais de nombreuses organisations continueront d'augmenter leurs investissements dans des projets ou du matériel d'IA.

« Toute technologie destinée à changer le monde doit passer par le creux de la vague, explique l'analyste. Les PDG ne parlent plus de licencier tout le monde et de gérer l'ensemble de l'entreprise avec l'IA générative, ni de doubler leurs revenus et de transformer leur secteur, mais ils parlent maintenant d'améliorations de la productivité et de la qualité grâce à cette technologie. »

De leur côté, les responsables IT sont de plus en plus éclairés sur la manière d'atteindre leurs objectifs en matière d'IA générative, car ils commencent à mieux en comprendre son potentiel, ajoute Rakesh Sancheti, directeur de la croissance chez Tredence, un fournisseur de solutions de Data Science. « Nous n'y voyons pas le signe d'une baisse des attentes, mais d'une évolution vers une utilisation responsable et ciblée de l'IA générative », dit-il.

Des budgets en hausse simplement pour rester à flot

Plusieurs responsables IT déclarent s'attendre aux augmentations de dépenses prévues par le Gartner, l'IA inspirant certains de ces nouveaux investissements. Mais les augmentations de prix sont également « un moteur important » de l'augmentation des budgets, souligne Dmytro Romanchenko, Pdg de l'éditeur Syndicode. « Les fournisseurs augmentent leurs prix de manière générale, ce qui oblige les entreprises à mieux gérer leurs budgets, dit-il. Les dépenses informatiques ne servent plus seulement à financer l'innovation, mais aussi à rester à flot face à l'augmentation des coûts. Les entreprises consacrent plus d'argent au maintien du statu quo tout en cherchant à rentabiliser chaque dollar. »

Pour contrer les augmentations de prix, certains clients de Syndicode ont renoncé à des plans de transformation IT ambitieux et se tournent vers une rationalisation de leurs services actuels, explique Dmytro Romanchenko. « Un client a ainsi automatisé des processus avec l'IA, mais a dû réduire d'autres projets pour financer cet effort », note-t-il. Certaines entreprises réévaluent les services 'nice to have' pour se concentrer sur le 'must have'.

Cloud et SaaS : des renouvellements de contrats qui font mal

« Les services cloud, les licences logicielles, le matériel - tout augmente peu à peu, dit Dmytro Romanchenko. « Les fournisseurs justifient cette hausse par des éléments tels que des coûts énergétiques plus élevés ou des fonctions de sécurité renforcées, mais tout cela s'additionne pour les entreprises ».

Selon Rakesh Sancheti de Tredence, certaines entreprises dépensent davantage pour l'informatique aujourd'hui afin de réduire les coûts à long terme. Les outils d'automatisation, la migration vers le cloud et les systèmes économes en énergie sont des exemples de dépenses à court terme visant à réduire les coûts futurs.

Mais les hausses de prix sont également un facteur d'augmentation des dépenses, reconnaît-il, avec le coût du matériel pour l'IA et des experts en IA et en Data Science qui font grimper les prix. En outre, les renouvellements de contrats cloud et SaaS font grimper les prix, alors que de nombreuses organisations avaient initialement souscrit à des tarifs réduits.

Il a récemment vu certaines organisations reporter des transformations numériques à grande échelle ou des refontes d'infrastructure parce qu'elles n'ont plus les fonds nécessaires après avoir couvert leurs coûts de cloud et de logiciel. D'autres organisations se concentrent sur l'optimisation de leurs actifs IT actuels ou sur la renégociation des contrats avec les fournisseurs. « Les DSI sont confrontés à un difficile exercice d'équilibriste, résume Rakesh Sancheti. D'une part, ils doivent investir dans des technologies de transformation telles que l'IA pour rester à la pointe du progrès. D'autre part, ils sont aux prises avec des coûts croissants qui grèvent ces budgets. »

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