Projets

La Chambre des Notaires de Paris veut construire une usine à blockchains

La Chambre des Notaires de Paris veut construire une usine à blockchains
De gauche à droite, Cédric Cefber et Cyril Mallet (Chambre des Notaires de Paris) :

Accompagnée par DigitalBerry, la Chambre des Notaires de Paris est en train de déployer plusieurs cas d'usages autour de la blockchain. Une façon pour les notaires de proposer de nouveaux services à leurs clients et de les renforcer dans leur rôle de tiers de confiance.

PublicitéLa Chambre des Notaires de Paris regroupe plus de 1 700 notaires et 6 000 collaborateurs. En 2016, alors que la blockchain gagne en popularité, celle-ci est parfois présentée comme une menace pour la profession. « La Chambre a voulu explorer ces technologies pour comprendre ce qu'elles recouvraient », témoigne Cyril Mallet, chef de projet à la DSI de la Chambre des Notaires de Paris. « Très vite, les notaires ont constaté que la blockchain pouvait leur permettre de proposer de nouveaux services à leurs clients. »

La Chambre des Notaires de Paris monte alors un groupe de travail réunissant des notaires, la DSI et des prestataires externes, afin d'étudier des cas d'usage pertinents dans le cadre de leurs activités. Un premier usage identifié concerne le renforcement de la sécurisation des Datarooms électroniques, et particulièrement celles gérées par l'application « Espace Notarial » développée par Paris Notaires Services (structure créée par la Chambre pour proposer des services aux notaires). Ces Datarooms qui concernent des cessions d'actifs immobiliers, sont fréquemment constituées de milliers de documents et doivent être accessibles avec un respect strict de la confidentialité et de la sécurité. En 2018, la DSI de la Chambre fait appel à DigitalBerry, société spécialisée dans les solutions de confiance numérique, pour expérimenter une intégration de la blockchain dans cette application. Les résultats sont probants : « La blockchain nous sert à tracer l'empreinte numérique des documents déposés dans une Dataroom », décrit Cédric Cefber, également chef de projet à la DSI de la Chambre. « Cela nous permet d'avoir une photographie précise de l'état de la Dataroom à un instant T, et de prouver en continu que les documents n'ont pas été modifiés entre le moment où ils ont été déposés et le moment où ils sont consultés », explique-t-il. Après ce premier Proof of Concept (POC) réussi, la blockchain va désormais être intégrée nativement dans la prochaine version du service, prévue pour début 2020 et disponible pour l'ensemble des notaires de France.

Tracer tout le cycle de vie des fichiers

Un second POC est ensuite lancé autour d'un service qui permet aux notaires d'échanger des fichiers volumineux avec leurs clients. Les notaires peuvent enregistrer dans une blockchain l'empreinte des fichiers transférés. Grâce à celle-ci, les clients peuvent ensuite vérifier la conformité des documents qu'ils téléchargent à travers une interface publique. « L'empreinte stocke un certain nombre de métadonnées sur le document : horodatage, émetteur, destinataires, office notarial concerné, etc. », détaille Cyril Mallet. « Alors que la signature électronique garantit l'intégrité des documents, la blockchain va permettre en plus de tracer tout leur cycle de vie, sans limite dans le temps. »

PublicitéActuellement, la Chambre des Notaires de Paris explore d'autres cas d'usage. Parmi ceux-ci figure notamment un projet conjoint avec la Chambre des Notaires du Nord Pas-de-Calais, concernant le suivi des cessions d'actions pour les sociétés non cotées. « Celles-ci doivent maintenir un registre de leurs actionnaires », indique Cédric Cefber. « En utilisant la blockchain pour la tenue des registres, les différentes opérations associées sont facilitées, comme la convocation aux assemblées générales. »

Une blockchain privée basée sur Hyperledger

Pour ces différents projets, la Chambre des Notaires de Paris a mis en place une infrastructure propriétaire avec l'aide de DigitalBerry. L'objectif est de construire une « usine à blockchains », pour pouvoir déployer de nouveaux cas d'usage rapidement et constituer un écosystème applicatif autour de la blockchain notariale. « Nous avons déjà installé des mineurs dans une douzaine d'offices notariaux, et nous en compterons prochainement une vingtaine », relate Cyril Mallet. La Chambre s'appuie sur une blockchain privée, basée sur le système de registre distribué Open Source Hyperledger Fabric. « La technologie Hyperledger est largement supportée par les grands éditeurs, et beaucoup d'entreprises françaises qui mènent des projets autour de la blockchain ont également choisi cette implémentation », souligne Cédric Cefber. Après une phase de spécifications fin 2018, la plateforme était opérationnelle début 2019. Entre six et huit mois ont ensuite été nécessaires pour adapter les applications notariales.

La blockchain a été rapidement adoptée par les notaires. « L'évangélisation a été faite en amont », raconte Cyril Mallet. « Tous les projets technologiques de la Chambre sont initiés et suivis par la Commission Technologie présidée par Me Stéphane Adler et animée par Jacques Binard, notre DSI. La Commission regroupe une trentaine de notaires. Dès 2017, elle s'est intéressée à la blockchain, en invitant des experts qui ont permis de vulgariser cette technologie complexe. Les notaires ont vite compris la valeur ajoutée que celle-ci pouvait apporter ». Tous les notaires de la Commission se sont d'ailleurs proposés pour être mineurs, signe du fort intérêt de la profession.

Un système de gouvernance pour encadrer les usages

A la différence des blockchains publiques, gérées de façon décentralisée, la blockchain notariale possède sa propre gouvernance : « Une charte, signée par chaque notaire mineur, décrit les exigences techniques qu'il doit respecter. Il faut notamment installer un serveur dédié, veiller à ce que celui-ci soit alimenté en permanence et connecté au réseau », explique Cédric Cefber. Une autre charte a été mise en place pour les applications qui utiliseront la blockchain. Signée par les propriétaires des applications, elle détaille les prérequis techniques et les conditions d'usage de la blockchain, comme le mode d'interfaçage et de minage. Une Politique de Confiance (PC) et une Déclarations des Pratiques de Confiance (DPC) de la Blockchain sont par ailleurs en cours de finalisation.

Partager cet article

Commentaire

Avatar
Envoyer
Ecrire un commentaire...

INFORMATION

Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.

Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire

    Publicité

    Abonnez-vous à la newsletter CIO

    Recevez notre newsletter tous les lundis et jeudis