Interviews

Jean-Christophe Lalanne (Air France) : « Le parcours client, priorité n°1 de la DSI »

Jean-Christophe Lalanne (Air France) : « Le parcours client, priorité n°1 de la DSI »
Le budget de la DSI d'Air Fance, dirigée par Jean-Christophe Lalanne, augmente de 2% en 2017
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°133 !
Le DSI doit évoluer comme son entreprise

Le DSI doit évoluer comme son entreprise

La transformation s'applique non seulement à l'entreprise, non seulement à ses directions et notamment à la direction des systèmes d'information mais aussi au DSI lui-même. Il doit changer, évoluer, notamment lorsque le périmètre de ses fonctions évolue. Et le coaching peut être un moyen de réussir...

Découvrir

Un DSI Groupe comme Jean-Christophe Lalanne, vice-président exécutif et CIO d'Air France KLM, se préoccupe avant tout du parcours de ses clients en bâtissant une plateforme de vision à 360°.

PublicitéCIO : Comment la DSI répond aux demandes internes des métiers ? Qu'est-ce qui a changé, qu'est-ce qui va changer dans ce traitement des demandes internes ?

Jean-Christophe Lalanne : Un élément me paraît très clair, aujourd'hui les membres du Comex et tous les partenaires métiers ont intégré le digital et savent ce qu'ils peuvent en attendre. L'IT n'est plus considérée seulement comme un centre de coûts, même si les investissements demeurent importants. Beaucoup plus de complicité ou d'alliances objectives s'installent entre la DSI et ses clients internes. Je ressens la complémentarité et le besoin de travailler ensemble.
L'IT est aussi devenu un point de stabilité et de référence. La DSI doit se montrer plus ouverte, accepter l'interactivité et faire preuve de pédagogie. Nous sommes  les premiers partenaires, et de vrais partenaires, pour les autres directions. Au GEC (Group Executive Committee), j'avais autrefois des opposants potentiels non convaincus de la valeur apportée par l'IT ; aujourd'hui, j'ai beaucoup de sponsors, et ils le sont tellement que je sens une pression positive.
CIO : On a beaucoup parlé de relations tendues entre les DSI et les directions marketing, quelle est votre analyse ?

Jean-Christophe Lalanne
: Les relations avec la direction marketing ne posent pas de problème particulier. Je ne parle pas d'affrontement, il peut y avoir des incompréhensions, et aussi une volonté d'aller plus loin, plus vite, de manière plus innovante. Tous les efforts sont intéressants. Et nous, à l'IT on est pleinement d'accord : les méthodes évoluent, en particulier avec l'arrivée des méthodes agiles et tout cela contribue à des relations fructueuses.
A l'IT, nous avons aussi une autre perspective, celle de garantir le fonctionnement et la performance opérationnelle. Nous devons aussi tenir compte de nos 30 ans d'expérience dans le service aux métiers.  Je prends un exemple, celui du cloud où il y a une possibilité d'affrontement ?  L'IT veillera à la mise en oeuvre du cloud avec prudence, sans vouloir le ralentir.  Le marketing lui, veut que ce soit rapide et efficace, c'est tout.



CIO : Vous parlez de précautions à prendre pour aller vers le cloud. Pouvez-vous préciser ?

Jean-Christophe Lalanne
: Pour moi, en matière de cloud computing, les précautions  à prendre portent essentiellement sur l'architecture. D'un côté, nous devons repenser l'architecture des données clients en interne et offrir des services d'accès pour l'ensemble de nos systèmes. De l'autre il faut s'ouvrir aux solutions cloud sans recréer un « datalake » clients sur le cloud.   Nous devons aussi veiller à l'aspect économique et à la sécurité.  Et il nous appartient de gérer les partenaires et l'existant.
Aujourd'hui, avec mes grands partenaires métiers, je vois beaucoup de demandes émerger en matière de cloud computing. Elles sont plus court-terme, avec un budget limité. Mais ce qui est déterminant, c'est l'architecture de référence d'un domaine Métier et ce qu'on intègre en termes de cloud dans cette architecture. Ce ne peut être l'inverse : l'intégration de notre architecture dans le cloud.
Actuellement nous travaillons sur plusieurs sujets cloud. Le CRM par exemple qui se construit à la fois en SaaS et « on premise ».  Nous aimons les fournisseurs qui nous laissent le choix du « on premise » avec les technologies du cloud. On regarde aussi le PaaS privé (ou public) et l'hybridation. Petit à petit, différents services vont passer en cloud, qu'ils soient techniques ou métier, corporate ou core-business. Nous utilisons plusieurs plateformes pour le IaaS. On teste Amazon Web Services et Azure.
Ma conviction, c'est qu'une plus grande maturité des fournisseurs comme des clients, s'installe. A terme, une hybridation très flexible existera entre DataCenter « client » et plate-formes fournisseurs, avec beaucoup de modèles possibles.


PublicitéCIO : Quelles sont vos priorités d'investissements pour 2017 ?

Jean-Christophe Lalanne
: Nous avons notre propre cloud avec trois datacenters doublés, qui fonctionnent en temps réel. On travaille à les remodeler, pour en faire un datacenter virtuel distribué unique. Nos trois plateformes sont dupliquées en actif / actif et interopérables à haut débit. Air France KLM fait également évoluer ses datacenters sur un plan physique, pour améliorer leur efficacité énergétique et leur empreinte environnementale.
Concernant les plateformes, nous sommes  très Linux et Windows. Le but est de sortir nos plateformes historiques sur mainframes et solutions propriétaires. Nous avons aussi une stratégie de PaaS privé. C'est à la fois complexe et stratégique.

« Le parcours client est pour nous le système majeur. »

CIO : Quelle est la place du parcours client dans les réflexions du DSI d'Air France KLM ?

Jean-Christophe Lalanne
: Le parcours client est pour nous une ambition majeure. J'y suis à fond, sans aucun doute ! C'est notre priorité n°1, devant l'efficacité opérationnelle et la réduction des coûts. L'objectif est d'être au meilleur niveau d'excellence possible. On peut lister tous les projets d'investissements, le but c'est toujours l'excellence. La performance opérationnelle  permet d'être au niveau des meilleurs, d'engager notre transformation sur nos deux grands hubs d'Amsterdam et de Charles de Gaulle. Ces projets sont très complexes et très industrialisés.
On mobilise tous les moyens digitaux et d'organisation pour être au niveau des meilleurs, obtenir par exemple un taux de retard des avions plus faible. Nous sommes attentifs à tous les points de relation client : salons, salles d'embarquements, centres d'appel, réseaux sociaux, bornes dans les aéroports.   L'idée est que tous ces capteurs  donnent de l'information et permettent de restituer un maximum de possibilités pour optimiser notre offre de voyages.
Nous allons aussi vers une personnalisation réelle, une plus grande dynamique dans la relation client. une proposition exclusive par client. C'est notre objectif de performance commerciale. Celle qui nous amène à gérer toutes les « next best action », celles qui suivent tout contact identifié avec le client. Pour cela, il faut de l'innovation, du digital, des solutions du marché et fédérer.
L'évolution du marché de l'aérien est une autre raison très forte. Les connexions client se font sur de multiples canaux. Et nos ventes directes passent par Internet à 35%, mais le reste provient de multiples acteurs, comme les agences de voyage et les agences en ligne. Nous devons veiller l'évolution rapide des modèles de distribution sous la pression du Digital et innover.
Pour libérer du temps afin de favoriser la relation clients, notamment en cas de problèmes, il faut favoriser les self services. Fin 2017, nous aurons déployé 45 000 tablettes auprès de tous les agents opérationnels, navigants ou commerciaux.
Nous allons vers le client, là où il se trouve, pour faciliter son voyage et ses démarches, améliorer aussi  la relation client à bord, par le digital. En fait, dès qu'un client réfléchit à son voyage, quel qu'en soit le canal, nous devons le suivre. C'est le « customer street system ».


« Dès qu'un client réfléchit à son voyage, quel qu'en soit le canal, nous devons le suivre. »

CIO : Comment fait la DSI ?

Jean-Christophe Lalanne
: Nous avons une plateforme à 360° pour la vision du client. On doit savoir en dix secondes où le client a  exprimé un mécontentement ou une demande, quel que soit le moyen et le lieu où il les a formulés.  Cette plateforme s'appuie sur nos back ends, ceux du legacy, qui sont neufs. On a refait, lors de la fusion Air France et KLM, plusieurs parties du SI et nous poursuivons ce travail de fond.
C'est sur ce socle qu'on bâtit la partie « données clients ». Imaginez un client qui exprime une insatisfaction sur Facebook, elle doit se retrouver interconnectée avec la base clients, dans notre architecture. Nous sommes aussi très attentifs à tous les indicateurs de satisfaction client.  Par exemple, notre appli mobile AirFrance obtient 4 à 5 étoiles sur l'AppStore. Le Net Promoter Score, lui, est trop bas. Il mesure la satisfaction du client dans la mesure où celui-ci va recommander le produit ou le service. C'est un objectif partagé par tous que de le faire croître et l'IT et le Digital doivent jouer un rôle clé.
N'oublions pas que le parcours client s'il est majeur pour nous, se fait dans un métier où, par nature, existent des « disruptions » : les pannes, la météo, les grèves.  On passe notre temps à gérer ces alinéas, si on les gère bien, on peut augmenter le Net Promoter Score de 20 points.
 


CIO : Vous travaillez beaucoup la relation client et l'efficacité opérationnelle, comment les conjuguer aux contraintes budgétaires ? Et quel est votre budget ?

Jean-Christophe Lalanne
: Air France KLM est comme toutes les entreprises. La réduction des coûts se retrouve dans notre sélection de l'investissement. L'IT est engagée dans cette réduction  par sa recherche de performance opérationnelle qui s'accroît d'année en année.
Quant au budget de l'IT, entre 2015 et 2016, il a augmenté de 3%, entre 2016 et 2017 de 2%. C'est un énorme effort de la compagnie en faveur de l'IT. J'ai de la chance par rapport à d'autres directions. Le budget IT dont j'ai la responsabilité est de 650 M€ environ.

Partager cet article

Commentaire

Avatar
Envoyer
Ecrire un commentaire...

INFORMATION

Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.

Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire

    Publicité

    Abonnez-vous à la newsletter CIO

    Recevez notre newsletter tous les lundis et jeudis