Stratégie

Françoise Mercadal-Delasalles (Société Générale) : « Pour réaliser la transformation numérique, il faut incuber toute l'entreprise »

Françoise Mercadal-Delasalles (Société Générale) : « Pour réaliser la transformation numérique, il faut incuber toute l'entreprise »

Françoise Mercadal-Delasalles est Directrice des Ressources et de l'Innovation du groupe Société Générale. Elle supervise notamment la DSI et a co-piloté le programme PEPS. En exclusivité pour CIO, elle détaille l'avancement de la transformation numérique du groupe qui fête cette année ses 150 ans.

PublicitéCIO : En quoi la transformation numérique est-elle à ce point importante pour la Société Générale ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Il faut être conscient qu'une banque comme la Société Générale repose sur un énorme système d'information. Et ce système d'information évolue en permanence. Par nature, il est soumis à la transformation numérique.

Je veux défendre l'idée que le SI d'une banque n'est pas un vieux machin qui ronronne. les jeunes ingénieurs en ont cette idée trompeuse, préférant de ce fait s'orienter vers des start-up ou des entreprises de type Amazon et Google. Or, nous recrutons ! nous avons ouvert plusieurs centaines de postes dans la filière IT (600 CDI, 250 alternants, 100 stages et une quinzaine de VIE).

Nous avons récemment mené un hackaton avec l'Ecole 42 pour changer l'image de la banque auprès des jeunes développeurs. Et les parrains que nous avons envoyés à cette occasion ont d'ailleurs impressionné plus d'un jeune. Les étudiants ont dû admettre que, même avec une longue expérience, ils savaient ce qu'était coder à l'ère du numérique.

CIO : Pour orienter votre révolution numérique, vous avez organisé l'an passé le PEPS (Projet Expérimental Participatif et Stimulant). Que sont devenues les initiatives définies à l'époque ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Frédéric Oudéa, PDG du groupe Société Générale, a déclaré : « il y a un avant et un après PEPS ». Pour nos 148 000 collaborateurs et nos 33 millions de clients dans le monde, nous avons entamé notre révolution numérique. Mais après l'enthousiasme de PEPS, il a fallu passer à l'exécution. Nous avons défini un plan en quatre thématiques : les terminaux, le cloud, les données / le Big Data et enfin la sécurité / la lutte contre la cybercriminalité.

De fonction support, l'IT se transforme en première interface de la relation client. Et cela change tout.

CIO : Commençons par les terminaux. En quoi vont-ils contribuer à cette transformation numérique de la Société Générale ?



CIO : Commençons par les terminaux. En quoi vont-ils contribuer à cette transformation numérique de la Société Générale ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Pour transformer l'entreprise, il faut incuber toute l'entreprise. Il faut que tous les collaborateurs aient cette culture digitale au quotidien. Pour atteindre cet objectif, nous avons annoncé « la mise en oeuvre en cours d'un partenariat stratégique avec Microsoft qui marquera une avancée majeure dans la transition numérique du Groupe. Le partenariat portera sur le déploiement d'applications digitales innovantes et la promotion de la mobilité au sein du Groupe. Les détails et modalités de l'accord seront communiqués ultérieurement, après sa finalisation. »

PublicitéCIO : L'actualité a récemment remis l'accent sur une affaire qui vous a coûté environ cinq milliards d'euros. Qu'est-ce que cette affaire a changé dans votre appréhension de la sécurité ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Six ans après les faits, la Société Générale a tiré toutes les leçons de cette affaire et poursuivi avec détermination sa stratégie de transformation.

Aujourd'hui, notre monde est de plus en plus complexe. Les systèmes sont de plus en plus complexes. Les connexions et interactions entre systèmes sont de plus en plus complexes. Et cette complexité est en lien avec une nécessaire ouverture croissante de nos systèmes d'information.

Nous ne pouvons faire disparaître ni cette complexité ni cette ouverture. Mais nous devons savoir les gérer en assurant la sécurité de nos processus et de nos données. La réglementation comme les contrôles que nous opérons sont de plus en plus lourds. Mais nous devons malgré tout nous assurer de laisser une liberté suffisante pour bénéficier de la créativité de nos collaborateurs.

Savoir gérer ces paradoxes, en les assumant comme des paradoxes, est indispensable.

CIO : Un autre aspect de la sécurité vous concerne directement en tant que banque : la cybercriminalité. Quelle est votre approche en la matière ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Bien entendu, des équipes sont en permanence sur le sujet. Comme chacun le sait, la question n'est pas de savoir « si » nous serons attaqué mais « quand » nous l'avons été ou le serons. De ce fait, il faut définir les modalités de réactions en cas d'attaque.

Je considère que, dans un univers digital, notre capacité à résister à des attaques sur le système d'information est un facteur de différenciation concurrentiel.

CIO : La plupart des attaques visent à récupérer des données confidentielles de vos clients. Les données constituent d'ailleurs un de vos quatre chantiers. N'est-ce pas un terrain à la fois prometteur et miné ?



CIO : La plupart des attaques visent à récupérer des données confidentielles de vos clients. Les données constituent d'ailleurs un de vos quatre chantiers. N'est-ce pas un terrain à la fois prometteur et miné ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Nous avons en effet une responsabilité extrêmement forte vis-à-vis de nos clients. Nous ne pouvons pas nous permettre la même posture qu'un Amazon ou un Google. Notre activité économique repose sur la confiance que nos clients nous accordent, notamment au sujet des données qu'ils nous confient directement ou indirectement (via toutes les informations sur les paiements effectués par exemple).

Ces données, qui appartiennent à nos clients, peuvent aussi être retraitées pour être encore plus utiles à ces mêmes clients. C'est le sens de notre stratégie Big Data. Nous avons déjà une appliquette sur le budget familial par exemple.

Mais nous avançons très prudemment, avec beaucoup de réflexion à chaque étape, notamment au sein de la Banque de Détail. Si l'on fait quelque chose des données, il faut de toutes les façons que le client donne à chaque fois son accord. La banque est par nature un tiers de confiance et doit le rester.

CIO : Le dernier des quatre chantiers que vous avez évoqué est le cloud. Que comptez-vous faire ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Nous avons mis en place un cloud privé interne, toujours pour des questions de sécurité et de confiance. Ce projet vient dans le cadre d'une mutualisation totalement achevée des infrastructures. Nous attendons du cloud une hyper-agilité dans le développement et, partant, une très forte réactivité métier. 30 à 40% de nos développements sont d'ailleurs à ce jour réalisés en mode agile.

CIO : Enfin, l'un de vos concurrents est devenu opérateur télécom et en a fait un axe fort de sa communication commerciale. Est-ce que c'est une évolution que vous envisagez ?

Françoise Mercadal-Delasalles : Chacun trace sa route comme il l'entend... Tout bouge et tout le monde se cherche. Nous sommes un tiers de confiance pour nos clients. Si nous nous mettons à vendre des téléphones, je pense que cela risque de perturber notre relation avec eux.

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