Face à la résistance au changement, Latécoère automatise la documentation de son projet SAP
Alors que seule une de ses deux activités travaillait sur SAP, l'équipementier aéronautique Latécoère a tenté à partir de 2016 de l'imposer à l'ensemble de l'entreprise, se heurtant à une forte opposition. Après un diagnostic de la situation, l'industriel a identifié un problème majeur autour de la documentation du projet, qu'il a décidé d'automatiser.
PublicitéL'équipementier aéronautique Latécoère est organisé en deux branches. L'entité historique Aérostructures (55% du CA), créée il y a près de 100 ans dans le sillage de l'aérospatiale, construit essentiellement aujourd'hui des portes et des fuselages d'avion. Plus récente, la branche Systèmes d'interconnexion (45% du CA) conçoit et déploie le câblage électrique des appareils. Les deux entités ont évolué longtemps sur des environnements applicatifs différents, comme l'a expliqué le DSI de l'industriel, Frédéric Tanguy, à l'occasion de la convention USF 2023 d'octobre dernier. « Aérostructures s'appuie sur SAP depuis 15 ou 20 ans. La branche Systèmes d'interconnexion a, quant à elle, préféré faire reposer ses processus sur la GPAO Sylob. » Même si cette solution a tout à fait répondu à la demande dans un premier temps, elle a montré ses limites au fur et à mesure du développement de la seconde activité de Latécoère. Sylob considère ainsi les entreprises comme des entités globales et n'intègre pas de notion de divisions, ce qui a contraint l'industriel à paramétrer ses usines dans le logiciel comme s'il s'agissait de magasins. Mais, surtout, Latécoère souhaitait disposer d'une solution stratégique homogène pour l'ensemble du groupe.
Il a donc décidé d'opter pour SAP avec un projet qui a duré 4 ans, jusqu'en 2021. Il était sur le point d'entrer en production courant 2020, lorsque la pandémie et les confinements l'ont interrompu. De plus, la DSI de Latécoère a constaté que le changement de solution imposé à la branche Systèmes d'interconnexion rencontrait une forte opposition et affichait un fort déficit d'appropriation. Le constat a poussé la DSI à chercher de l'aide extérieure pour comprendre très concrètement la situation et mieux accompagner le changement. L'industriel a ainsi fait appel à la société de conseil en transformation numérique Inovi, originaire de la région toulousaine tout comme lui.
Un diagnostic pour rebâtir la communauté SAP
La DSI et son prestataire ont d'abord réalisé un diagnostic de la situation, afin de disposer rapidement d'éléments concrets pour étayer le constat de déficit d'appropriation. Inovi a organisé des ateliers avec un échantillon de chaque catégorie de population concernée (managers, référents métiers, key users) sur 9 sites dans 5 pays différents. Objectif : mesurer le niveau d'appropriation ressenti par les équipes et identifier des leviers d'action comme la qualité de la formation, la documentation, l'animation ou la clarté de la définition des rôles. Le dispositif a été décliné en parallèle dans 10 directions métier.
Le diagnostic visait également à reconstituer une communauté SAP et, une fois la solution en production, à en suivre la vitalité et à en identifier les difficultés. Après les ateliers, Latécoère et Inovi se sont attelés à définir clairement les objectifs de la communauté, à clarifier les rôles de ses membres et à les accompagner, à expliquer les rôles indirects et enfin, à les outiller. « Il s'agit de définir des rendez-vous rituels, les agendas de ces derniers et les sujets à aborder, de créer des modèles pour ces réunions, d'en définir la fréquence ou les temps d'échange, d'animer et de produire ces documents méthodologiques, » comme l'a précisé Arnaud Fouquet, DG fondateur d'Inovi.
PublicitéL'épineux sujet de la documentation du projet
Le diagnostic a en particulier révélé la difficulté de la communauté SAP de Latécoère à produire et rendre accessible facilement et de façon homogène la documentation du projet.
Pour pallier le problème, l'industriel a décidé d'automatiser le plus possible la création et la mise à jour de cette dernière et de la rendre facilement accessible. Pour cela, il a opté pour le module SAP Enable Now. Non sans réticences, cependant. Et au plus haut niveau. « J'étais frileux. C'est le moins que l'on puisse dire, a ainsi avoué sans ambages Frédéric Tanguy. J'étais rebuté par les sollicitations incessantes de SAP en la matière. Et surtout, j'avais testé une des premières versions dans mes fonctions précédentes chez Safran. Je n'étais pas du tout impressionné par la facilité d'installation ni d'utilisation. Je craignais que cela reste l'apanage d'un cercle restreint d'utilisateurs clés. »
C'est la démarche de conduite du changement qui a provoqué le changement d'avis du DSI. Il a en effet travaillé au sein de la communauté SAP interne avec des business project leaders et des key users des deux branches d'activité. Le constat était sans appel. « Je me suis rendu compte dès le premier atelier que la documentation, même la plus récente, n'était souvent plus à jour et était difficile à trouver pour les utilisateurs. Ce qui génère un problème majeur, car quand ils ne la trouvent pas, ils la créent. Le résultat est alors beaucoup moins cadré et il est stocké dans des endroits divers, des Sharepoint, des répertoires partagés, etc. »
Un accompagnement à la création de documents et de formations
SAP Enable Now gère aussi bien du contenu statique (Word, PDF, Powerpoint) que dynamique. Il peut capturer les flux exécutés par les utilisateurs, réaliser des captures d'écran ou enregistrer des séries de clics pour en extraire les actions et ainsi aider à réaliser un tutoriel. Les utilisateurs sont directement prévenus lorsqu'un nouveau contenu est susceptible de les concerner, et ont un accès direct à la documentation dont ils ont besoin, sans sortir de leur travail en cours. La solution permet aussi de construire des parcours de formation personnalisés avec des quiz et autres outils de mesure de l'acquisition des connaissances.
Latécoère déploie le module en 5 étapes. En février 2023, il a d'abord défini les fonctions de l'outil à prioriser. Puis il s'est attelé à rendre accessible la documentation existante, avant de donner aux membres de la communauté l'accès à la création de contenu proprement dite. Inovi a ensuite formé une équipe de key users 'auteurs' à la création de tutoriels, par exemple. Aujourd'hui, 4e étape, l'industriel organise un réseau des créateurs de contenus qu'il anime (échange de bonnes pratiques et normalisation de la production des contenus). « Cette démarche va faciliter la création et la mise à jour des contenus, la laisser libre d'accès aux responsables de business process, conclut Frédéric Tanguy, mais dans un cadre, avec un processus de sauvegarde et d'archivage sécurisé. »
Article rédigé par
Emmanuelle Delsol, Journaliste
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