Business

Externalisation : les SSII délaissent la gestion de parcs

Externalisation : les SSII délaissent la gestion de parcs
Stéphane Clément est PDG de Manpower Proservia, un des acteurs de la recomposition du marché.
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°118 !
Les fournisseurs des DSI bousculés

Les fournisseurs des DSI bousculés

La vie n'est pas un long fleuve tranquille pour les DSI. Mais cet adage est également vrai pour leurs fournisseurs, bien bousculés ces derniers temps.Pour commencer, ils se bousculent entre eux. La recomposition du marché est parfois évidente sur des tâches jadis souvent confiées aux SSII...

Découvrir

Le temps est révolu où les DSI pouvaient tout sous-traiter, ou presque, auprès des SSII qui préfèrent les marges plus fortes du cloud ou de l'analytic à la gestion de parcs.

PublicitéDSI et SSII ont divorcé sur un point, l'externalisation de la gestion de parcs, devenue moins rentable pour les sociétés de services qui se voient préférer de vrais spécialistes, issus d'autre univers comme l'intérim ou la prestation à domicile. Manpower a racheté et consolidé Proservia, Adecco possède Modis, mais en fait une vraie SSII ; Solutions 30, jamais avare d'ambitions, se structure pour s'adresser aux DSI. Econocom peut les regarder de loin (mais pas de haut), elle qui a depuis longtemps sû se développer dans la gestion des utilisateurs, en l'associant à la location de matériels.

Signe du changement, plusieurs SSII ont vendu une partie de leurs activités, pas la plus spectaculaire et probablement l'une des moins rentables.  Atos a par exemple cédé il y a dix-huit mois son activité support à Manpower, 900 salariés étaient concernés, mais la vente s'est conclue pour un euro symbolique. Symbolique à tous les sens du terme. Visiblement cette activité n'entre plus dans les plans de Thierry Breton et de son état-major. Le projet de vente était connu des syndicats depuis plusieurs mois, mais pas le prix, qui les a pour le moins étonnés.

L'activité, savamment nommée WSDS (Workplace and Service Desk Services) générait tout de même 53 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel.  Et en 2010, déjà, Atos et Manpower avait tenté de négocier une première fois mais la vente avait échoué. Atos, comme la plupart de ses consoeurs, fait clairement d'autres choix, investissant dans Bull, Canopy, pour le cloud ou rachetant Xerox ITO. Cette dernière activité est pourtant elle aussi dans l'externalisation, mais ouvre plus largement à Atos le marché nord-américain. 

La longue histoire d'HR Access

Autre exemple, tout aussi spectaculaire, celui d'IBM qui a revendu son activité HCM à Sopra en avril 2014. Une activité support du logiciel Sigagip, développé par CGI (à la fois éditeur, intégrateur et infogéreur), racheté par IBM, qui le revend à Fidelity. Une longue histoire. Fidelity est repris par Sopra, qui veut récupérer le support du logiciel (rebaptisé HR Access) auprès d'IBM. Sopra reconstitue la synergie entre l'activité d'éditeur et celle d'intégrateur. Sauf que la convention collective chez IBM est celle de la métallurgie, et chez Sopra (devenu Sopra-Stéria) celle du Syntec. Les reventes multiples et les contrats d'externalisation sont toujours confrontés aux charmes  de la législation française.

Les fournisseurs, que ce soit des SSII, comme Atos, ou un constructeur comme IBM avec ses activités services, sont confrontés à la question du prix de leurs prestations, et tentés de tenir compte de leurs coûts internes. Dans ce cas, l'activité n'est pas jugée rentable. Surtout comparée à celle de nouveaux entrants et à leurs activités nouvelles comme le cloud.

PublicitéEn fait deux types d'activités sont concernées, les SI externalisés dans leur presqu'intégralité et la partie gestion de parcs élargie. Dans le premier cas, on observe des recours importants à la sous-traitance, toujours pour des raisons de coûts, les projets étant menés dans des délais de plus en plus  courts. En début d'année, le groupe automobile Volvo a par exemple vendu sa SSII interne à l'indien HCL. Elle compte 2 600 salariés. De source syndicale, on parle de 160 salariés en France dans Renault Trucks, la filiale camion de Volvo. Mais d'autres entreprises, en dehors du groupe Volvo, sont concernés puisque sa SSII interne couvrait aussi les besoins de H&M et ceux de SJ, la SNCF suédoise.

La maintenance c'est pour les spécialistes

D'autres types d'externalisation concernent le seul parc informatique et font l'objet d'un retrait de la part des SSII et de l'arrivée de nouveaux acteurs. C'est particulièrement net en France. Les SSII concentrent leur stratégie sur les nouveaux secteurs, surtout les grandes qui préfèrent quelques investissements spécifiques à des stratégies globales. IBM se concentre ainsi sur Watson, son logiciel d'intelligence artificielle. Pour Atos, c'est le cloud, les services et les grandes infrastructures. La maintenance devient un métier de spécialiste, avec quelques fonctions : le support aux utilisateurs et la gestion du poste de travail. Et ce secteur évolue, avec une industrialisation plus forte des activités par des spécialistes.

« Les nouvelles technologies constituent pour les SSII un nouveau marché où elles veulent  se développer en embauchant des ingénieurs très spécialisés » nous explique Stéphane Clément, PDG de Manpower Proservia, la SSII filiale du groupe Manpower, issue du rachat par le groupe d'intérim d'une SSII nantaise renforcée par d'autres rachats. « Ce n'est pas du tout le même marché que celui de l'assistance utilisateur et de la gestion de parcs » note Gianbeppi Fortis, le PDG de Solutions 30. Pour Stéphane Clément, les marges varient entre 10 et 15% sur les nouvelles technologies où se concentrent les SSII et de 7 à 8% sur l'assistance aux utilisateurs où vont d'autres acteurs spécialisés comme Proservia et Solutions 30.  Une rentabilité inférieure et surtout une activité trop éloignée. « Les SSII se retirent parce que les rentabilités ne sont pas les mêmes mais surtout parce que les métiers sont différents » observe Gianbeppi Fortis.

Le métier exercé par Proservia et Solutions 30 est celui de la massification et de l'humain. Rien d'étonnant dans un groupe dominé par les RH comme Manpower qui veut capter toutes les tendances nouvelles du marché de l'emploi. Ce nouveau concurrent a un peu effrayé les SSII lors de son arrivée, non seulement il mettait les moyens, mais surtout il rappelait aux SSII l'image de placement de main d'oeuvre d'intérim qu'elles veulent justement fuir à tout prix. Les grandes SSII se concentrent sur les purs ingénieurs, les métiers liés à la gestion de parcs restent des métiers de « bras armés », de compétences, de techniciens très réactifs vis-à-vis des clients.

Industrialiser et diversifier

Solutions 30 a suivi un tout autre chemin. Avant de sonner à la porte des DSI pour externaliser la gestion de leurs parcs, la société de Gianbeppi Fortis a commencé par les particuliers et les TPE pour des problèmes simples d'assistance utilisateur. En industrialisant ses méthodes, en diversifiant les compétences de ses équipes, Solutions 30 s'est déployée sur l'assistance utilisateur, l'infogérance, le help desk. « Tout ce qui touche de façon large aux utilisateurs en entreprise » note  Gianbeppi Fortis. « Du coup, nous nous sommes intéressés depuis longtemps à la mobilité sous toutes ses formes et maintenant aux objets connectés, d'autres manières d'élargir notre périmètre ».

Le monde de l'intérim ne se limite pas à Manpower. Randstad n'a jamais manifesté de velléités intrusives dans le monde informatique. Adecco, en revanche, détient avec Modis une filiale informatique. Attention, il ne s'agit en aucun cas, nous précise la société d'intérim, d'un acteur identique à Proservia ou Solutions 30, mais d'une SSII à part entière : Modis fait d'abord du développement et tous les métiers de la SSII.

Philippe Colas, directeur opérationnel de Modis nous précise bien que le business model dépend de chaque marché au sein du groupe Adecco. « Modis, filiale de services informatiques pour la France assure des activités liées à la transformation digitale, la sécurité, la mobilité, l'analytic et accompagne ses clients sur les applicatifs, les infrastructures, l'assistance utilisateur ». La société reste sur des métiers qu'on peut qualifier de « commodités » et veut les transformer : « on va être dans une pression sur l'efficacité du service, et beaucoup moins dans une pression sur les prix ». 

Inventer son propre métier

Reste évidemment Econocom, l'inventeur d'un modèle qui n'a pas varié en quarante ans, celui de la gestion de parcs, mais en location. Et le mot de location fait toute la différence. On n'est plus seulement dans la prise en main à distance, dans la réparation ou le  remplacement des terminaux, mais en même temps en mode locatif. Donc, avec une possibilité pour le client de placer son parc non plus en dépense d'investissement, mais de fonctionnement, en externalisant non seulement l'entretien mais l'achat et l'évolution de son parc, ce qui lui garantit la qualité permanente de celui-ci et une économie d'ensemble.

Econocom a évolué avec d'autres types de prestations comme les télécoms ou encore les objets connectés et a pris pied dans les services informatiques avec le rachat d'Osiatis. Avec plus de 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires, plus d'un tiers issu de l'ex-Osiatis, c'est à la fois la gestion de parcs avec un mode locatif, les services et d'autres produits et services. La taille permet au groupe d'avoir des activités à marges différentes, contrairement aux spécialistes et aux SSII qui veulent exercer des métiers différents.

Partager cet article

Commentaire

Avatar
Envoyer
Ecrire un commentaire...

INFORMATION

Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.

Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire

    Publicité

    Abonnez-vous à la newsletter CIO

    Recevez notre newsletter tous les lundis et jeudis