Expérience digitale : sept erreurs qui déçoivent les clients


Digitalisation des process : des bonnes idées aux erreurs à éviter
L'expérience digitale sans couture, efficace et efficiente est attendue par tous les utilisateurs, internes comme externes, employés comme clients ou partenaires. Mais attention aux erreurs à ne pas commettre ! Face aux attentes considérables, la déception peut aussi être considérable. A...
DécouvrirLa crise sanitaire n'a fait qu'accentuer la nécessité de fournir des services numériques qui plaisent aux consommateurs. Malheureusement, beaucoup d'organisations IT n'y parviennent pas. Cet article initialement publié sur CIO.com pointe sept erreurs de stratégie digitale qui font fuir les clients.
PublicitéAvec la pandémie, la pression sur les DSI, sommés de fournir des expériences digitales attractives et de porter la transformation, s'est fortement accrue. Disposer de solides capacités digitales est devenu vital pour permettre aux entreprises d'avancer et de sortir de la crise. Les clients le confirment : 84% des consommateurs interrogés lors de la récente enquête State of the Connected Customer de Salesforce ont déclaré que l'expérience qu'ils avaient avec une organisation comptait autant que ses produits et services, et 73% s'attendent à ce que les entreprises comprennent leurs besoins. Les dirigeants ont bien reçu le message. La société de services TEKsystems a interrogé 510 décideurs métiers et technologiques pour l'édition 2020 de son rapport State of Digital Transformation, et a constaté que 72% d'entre eux considéraient l'amélioration de l'expérience et de l'engagement client comme une priorité de leur stratégie digitale, placée en tête de liste dans leurs objectifs de transformation.
Malgré tout, les organisations échouent à concrétiser cette vision. L'étude Salesforce a révélé que seulement 51% des clients estimaient que les entreprises répondaient à leurs attentes, tandis que 54% affirmaient qu'elles devaient transformer la manière d'engager la relation. « Nous ne dirigeons pas là où il nous faut aller », constate Peter Bendor-Samuel, PDG du cabinet d'études Everest Group. « Pour un DSI, il y a là un enseignement à tirer s'il souhaite que sa transformation digitale réussisse : vous devez définir vos objectifs en fonction des résultats souhaités par le client, et ensuite aider l'entreprise à accomplir le changement de modèle opérationnel nécessaire pour y parvenir. » Le défi est de taille, et il existe de nombreux pièges auxquels les organisations peuvent se heurter. Voici sept façons de décevoir les clients à l'ère du digital, et ce qu'il faut faire pour éviter ces écueils.
1. Échouer à penser comme le client
Agero est l'un des principaux fournisseurs de services d'assistance aux conducteurs aux États-Unis, où l'entreprise revend ses solutions en marque blanche à de grandes marques d'automobiles, à des assureurs et à des entreprises de services financiers. Agero reçoit près de 12 millions d'appels par an et accompagne 115 millions de conducteurs. « Dans des situations d'urgence, notre rôle est de déterminer qui sont les personnes concernées et où elles se trouvent, pour leur fournir rapidement une assistance et leur permettre de reprendre la route », explique Bernie Gracy, chief digital officer d'Agero. Pendant des décennies, cette mission est restée le principal objectif, mais depuis quelques années, Agero cherche à créer une expérience pour les conducteurs en phase avec celle que ses propres clients souhaitent offrir. Selon Bernie Gracy, cela a poussé Agero à accélérer ses initiatives digitales.
PublicitéAu début toutefois, Agero a dû inverser sa façon de penser - un processus qui n'a rien de naturel. Bernie Gracy mentionne d'ailleurs de précédentes tentatives d'offrir une expérience digitale, racontant qu'alors les conducteurs s'étaient empressés d'aller voir un agent, car ils ne voyaient pas l'intérêt d'utiliser les services numériques. « Nous étions un centre d'appels, une entreprise BtoB, et nous avons dû devenir une entreprise BtoC, qui s'adresse directement aux consommateurs, alors que ce n'était pas dans notre ADN. Il nous a fallu développer cette vision et commencer à penser comme une entreprise de e-commerce », raconte Bernie Gracy. « Nous avons dû devenir des experts de l'expérience client. »
Les équipes d'Agero ont disséqué l'expérience client, exploré jusqu'où les conducteurs pouvaient aller dans le processus avant d'entrer en contact avec un véritable agent, déterminé ce qui les éloignait de la plateforme digitale et conçu des solutions pour rendre l'expérience globale plus fluide. Ensuite, elles ont mis ces leçons en application pour réinventer l'expérience. « Maintenant que nous sommes davantage digitalisés, nous répondons plus rapidement aux demandes et nous avons des indicateurs de satisfaction (Net Promoter Score) plus élevés », souligne Bernie Gracy.
2. Concevoir l'expérience de façon limitée
Les entreprises peuvent aussi décevoir leurs clients en adoptant une définition trop restreinte de l'expérience digitale. « Beaucoup de personnes pensent que le digital, ce sont les canaux mobiles et les applications de discussion, mais les clients sont omnicanals. Ils veulent des messages instantanés, du téléphone, des e-mails. Les clients souhaitent pouvoir escalader et passer d'un canal à l'autre, et ils veulent une expérience fluide à travers l'ensemble de ces canaux », pointe Bernie Gracy.
Celui-ci raconte qu'Agero a appris cette leçon au moment où l'entreprise atteignait une certaine maturité digitale. C'est alors qu'elle a commencé à admettre que chaque conducteur avait ses propres préférences sur la manière d'engager la relation et pouvait vouloir s'engager de différentes manières au cours de l'interaction. Agero a alors construit une plateforme capable de supporter l'ensemble des interactions qu'un conducteur peut souhaiter. « Les clients peuvent commencer par téléphone puis basculer vers une application mobile, passer ensuite à un échange de messages textuels qui peut parfois redéboucher sur un appel téléphonique. Ils ne veulent pas répéter toutes les informations à un nouvel agent à chaque étape. Les clients souhaitent que l'échange reprenne là où il en était sur le précédent canal », affirme Bernie Gracy.
3. Négliger les vieux processus
Sunil Kanchi, DSI et directeur des investissements chez UST, une société de services et de conseil sur la transformation digitale, a travaillé avec un industriel américain sur les conséquences d'une initiative digitale ratée, qui a échoué à un tel point que l'investissement a été entièrement perdu. L'entreprise avait cherché à digitaliser le processus grâce auquel les clients configurent et envoient des commandes personnalisées. Mais l'équipe initiale de l'industriel s'était concentrée en priorité sur l'interface utilisateur de l'application, sans s'occuper du système legacy qui traitait les commandes en aval ni du processus de workflow lui-même. De ce fait, l'application n'a pas changé l'expérience de l'utilisateur et n'a donc apporté aucune réelle valeur aux clients. « Ils n'ont jamais vraiment examiné l'ensemble du processus pour construire un outil plus simple à utiliser. Et même si les ventes n'ont pas chuté, les utilisateurs boudaient le nouvel outil », raconte Sunil Kanchi. Beaucoup d'organisations ont vécu des expériences similaires d'après Sunil Kanchi, car elles tentent souvent de digitaliser des processus existants sans les refondre au préalable. « Quand vous procédez ainsi, en poussant la transformation sans améliorer les processus existants, vous finissez par aboutir à des niveaux élevés d'insatisfaction », avertit Sunil Kanchi.
Pour éviter cet écueil dans sa propre organisation, celui-ci exige que chaque projet de transformation digitale apporte une amélioration d'au moins 30% sur des indicateurs clefs - par exemple en réduisant le nombre d'étapes requises dans un processus ou le nombre d'approbations nécessaires. Il dispose également de collaborateurs chargés de supprimer les points de friction rencontrés par les utilisateurs dans les processus, qu'ils soient remontés ou pas. « Le digital, ce n'est ni de jolis écrans ni la dernière technologie à la mode que les individus aiment utiliser dans leurs applications mobiles ; il ne s'agit pas de donner aux utilisateurs la possibilité de swiper (glisser) à gauche ou à droite », affirme Sunil Kanchi. « C'est s'assurer que vous apportez de la satisfaction. Il n'y a qu'ainsi que vous pouvez créer une expérience qui séduit l'utilisateur final. C'est de cette façon que vous encouragez l'adoption. » Sunil Kanchi a mis cette approche en application quand il a travaillé avec l'industriel sur une deuxième tentative de digitalisation du processus de prise de commandes. Ils se sont concentrés sur des améliorations de processus qui éliminaient ou automatisaient certaines étapes, afin d'aller plus vite et de faciliter l'expérience du client qui utilisait l'outil. L'expérience digitale qui en a résulté a débouché sur un taux d'adoption de 90%.
4. Croire que la technologie est la solution - ou le problème
« Nous voyons rarement la technologie comme un problème, mais se contenter d'ajouter davantage de technologie apporte rarement le succès », fait remarquer Peter Bendor-Samuel. Celui-ci cite en exemple le cas d'un client qui cherchait à améliorer sa fonction de vente interne afin d'améliorer son chiffre d'affaires et sa part de marché. L'entreprise avait investi de façon importante dans la technologie, notamment en lançant une nouvelle application, mais elle n'obtenait pas de bons résultats. Peter Bendor-Samuel relate que son équipe a travaillé avec les dirigeants de l'entreprise, d'abord pour redélimiter le problème sous-jacent, puis pour réfléchir à la solution technologique. « Ils dépensaient des millions en technologie pour résoudre les problèmes, mais ce qu'ils voulaient vraiment, c'était de parvenir au point où quand un client les contacte, ils peuvent entièrement résoudre son problème en 45 minutes », explique-t-il. « Au lieu de mesurer si les clients utilisaient une application, ils devaient réfléchir à l'expérience qu'ils proposaient quand quelqu'un les contactait. C'est seulement quand ils ont changé de prisme, en se demandant comment prendre en compte l'expérience dans son ensemble et s'assurer que tout était résolu, qu'ils ont pu réfléchir à la solution technologique et la rebâtir de façon à atteindre cet objectif. »
L'entreprise s'est concentrée sur la mise en place d'une expérience où elle anticipait les besoins du client et complétait ses requêtes, le tout au bon moment - trois points que Peter Bendor-Samuel résume sous l'acronyme ACT (Anticiper, Compléter, Timing). Ensuite, elle a pu se mettre en quête des technologies adaptées pour répondre à ces trois enjeux - un projet qui a débouché sur une hausse de 7% de la part de marché.
5. Percevoir le monde du client de façon faussée
« L'IT doit être bien plus en phase avec le client, c'est un pivot très important. Vous devez comprendre quelle expérience le client a de vos produits et services dans son propre contexte - quel est son workflow, à quoi s'apparente son expérience. C'est ainsi que vous pourrez concevoir pour eux une expérience incluant des éléments qui vont réellement les aider » explique Aamer Baig, senior partner dans le cabinet de conseil en management McKinsey & Co. Pour y parvenir, les équipes techniques doivent se rapprocher des clients, comme c'est le cas chez les grands acteurs de la technologie, souligne Aamer Baig. « Dans l'IT, vous avez typiquement un responsable produit, des équipes de vente et ensuite le client. Il existe au moins trois intermédiaires entre l'IT et le client, là où il n'en faudrait au mieux qu'un, voire un contact direct », observe-t-il, ajoutant que les DSI qui obtiennent de bons résultats travaillent avec le métier pour adopter des principes agiles et d'autres changements structurels visant à réduire le fossé séparant la technologie des clients. Aamer Baig cite l'exemple d'une entreprise, un fabricant d'équipements BtoB, dont le département IT a enrôlé des clients dans une équipe produit. Cette dernière était chargée de développer une nouvelle plateforme logicielle pour optimiser la performance des équipements. « Les clients sont devenus des bêta-testeurs », explique Aamer Baig - une approche à laquelle l'entreprise attribue le haut niveau d'adoption du produit et les importants revenus associés.
L'IT doit également collecter et analyser les données pour pleinement comprendre les clients, leurs environnements et leurs besoins - une tâche que beaucoup d'organisations ne sont toujours pas capables de faire, selon Aamer Baig. « Vous avez besoin d'un système simple pour suivre les interactions avec les clients sur l'ensemble des transactions. C'est un travail difficile, qui nécessite d'importantes refontes et prend du temps, mais les bénéfices sont considérables », ajoute-t-il.
6. Créer des expériences sans cohérence
Les entreprises peinent parfois à intégrer toutes les expériences digitales offertes par leurs différentes entités, ce qui limite la capacité de l'organisation à anticiper les besoins des clients. Par exemple, dans le cas d'une banque, son département chargé des prêts peut avoir des capacités digitales qui ne sont pas intégrées avec la banque d'investissements ni la banque de détail. Cela crée de facto des silos d'engagement client plutôt qu'un unique service digital unifié, dans lequel toutes les relations de la banque avec un client sont représentées, qu'il s'agisse de relations existantes ou potentielles. « Pour anticiper les besoins du client, vous devez penser en stratège, en considérant l'ensemble des actions possibles et tous les canaux à travers lesquels quelqu'un est susceptible de s'engager, de façon à avoir une vision du client à l'échelle de l'entreprise et non pas simplement une vue par ligne de métier », conseille Bernie Gracy.
Pour y parvenir, Bernie Gracy a récemment créé un nouveau poste, celui de vice-président de l'expérience client. Celui-ci est chargé de s'assurer que l'entreprise s'engage avec les clients de façon holistique. Il surveille tous les engagements digitaux entre l'entreprise et ses clients, pilote des focus groups et travaille avec les équipes IT pour livrer de nouveaux produits qui fourniront la prochaine génération de services numériques d'Agero.
7. Laisser des préoccupations de sécurité freiner les projets
En tant que CIO du jeune cabinet de conseil en management Guidehouse, Chas Shaffer reçoit de nombreux retours de la part des utilisateurs internes comme des clients de l'entreprise, concernant ce dont ils ont besoin pour être productifs et efficients. C'est particulièrement le cas avec les plateformes de collaboration et les outils qu'ils souhaitent utiliser. Mais Chas Shaffer explique que les besoins de cybersécurité, déterminés à la fois par les standards de l'entreprise et les exigences réglementaires, impliquent qu'il ne peut pas déployer toutes les technologies préférées des utilisateurs. « C'est un défi pour nous. Nous souhaitons autoriser et fournir la technologie qu'ils veulent, pour leur permettre d'être plus efficaces, mais nous nous heurtons au problème de la sécurité des données », indique Chas Shaffer. « Toutefois nous évitons de prendre position et de dire que nous n'allons pas le faire à cause de la sécurité. »
Chas Shaffer reconnaît qu'il ne peut pas déployer l'outil de collaboration préféré de chaque utilisateur, mais lui et son équipe se battent pour créer l'expérience recherchée par chaque client, en commençant par déterminer ce dont ils ont besoin puis en regardant les technologies qui peuvent concrétiser cette vision. Pour y parvenir, Chas Shaffer constitue un groupe de collaborateurs venant de différents métiers (ce groupe s'appelle « connexions »), qui partagent avec l'IT ce qu'ils souhaitent, de même que ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Il ajoute également que son équipe fait en sorte de maintenir la technologie à jour tandis qu'elle évolue, de façon à mieux répondre à l'expérience souhaitée par le client sans sacrifier la sécurité. « C'est toujours un défi pour nous de trouver comment adresser les enjeux de sécurité tout en permettant à nos employés de travailler de façon libre et efficace », pointe-t-il. « Plutôt que de nous focaliser sur la mise à disposition d'une solution en particulier, nous nous concentrons sur la manière de répondre à leurs besoins. »
Article de Mary K. Pratt / CIO États-Unis (Adaptation et traduction par Aurélie Chandèze)
Article rédigé par

La rédaction de CIO Etats-Unis,
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