Edito - Changer les habitudes, défi n°1 de l'environnement numérique de travail
Bien souvent, la mise en place d'indicateurs pour mesurer l'usage réel d'une application révèle des surprises. Malgré la facilité d'utilisation vantée par les fournisseurs, même les solutions collaboratives récentes peinent souvent à être adoptées. Il faut en effet du temps (ou de l'énergie) pour détrôner les outils dont les utilisateurs étaient familiers.
PublicitéQui n'a jamais entendu un de ses collègues pester contre un logiciel qui ne fonctionne pas comme il le voudrait ? Quoi de plus frustrant qu'un moteur de recherche peu pertinent (nous en savons quelque chose) ? Les environnements collaboratifs, en particulier, cristallisent les tensions. En témoignent les débats récurrents à la rédaction, où chacun défend sa messagerie préférée. Bien sûr, les solutions des autres méritent toutes de finir aux oubliettes.
C'est un fait connu de tous les DSI : l'utilisateur déteste être bousculé dans ses habitudes. Le moindre bouton déplacé, une interface subtilement différente de celle à laquelle il est accoutumé suffisent à le priver de précieux repères, suscitant irritation et rejet.
Ce mécontentement est compréhensible. Nul n'aime devoir réapprendre sans cesse à utiliser des outils censés l'aider à être plus efficace dans son travail quotidien. Pourtant, nous y sommes bien obligés. La technologie évolue, et c'est tant mieux. Des fonctionnalités aussi pratiques que la coédition de documents, la messagerie instantanée ou le transfert de fichiers volumineux via le cloud ont d'autant plus vite été adoptées qu'elles font gagner du temps. Encore faut-il savoir que ces possibilités existent, et se les approprier. Submergés par une avalanche de nouveautés, les utilisateurs n'ont en effet plus le temps, la curiosité ni même la volonté de se former.
Parfois aussi, la technologie n'évolue pas assez vite, générant des stratégies de contournement. Quelle DSI n'a pas un peu de Shadow IT dans ses angles morts ? Si ces solutions « non-déclarées » soulèvent des enjeux de sécurité et de dispersion des données, d'un autre côté, des solutions d'entreprise trop datées, des écrans trop chargés et figés peuvent faire fuir les talents.
Les différences d'âge et de culture, mais aussi notre formation et notre parcours professionnel ont modelé nos usages : personne ne travaille exactement de la même façon que son voisin. Comment alors réconcilier les attentes de populations très hétérogènes d'utilisateurs avec les solutions actuelles ?
Nous sommes encore loin de solutions véritablement universelles, à l'intuitivité telle que nulle formation ne serait nécessaire pour l'utiliser. Ce fameux outil fédérateur, s'il émerge un jour, sera très probablement capable de s'adapter dynamiquement aux préférences, à la langue et aux besoins de l'utilisateur, à travers des interfaces graphiques, mais aussi vocales, tactiles, voire même neurologiques.
En attendant, un vrai accompagnement au changement reste indispensable. Des approches comme les tests d'utilisabilité peuvent également apporter de précieux enseignements, qu'il s'agisse de concevoir ou de choisir une solution, et à condition d'avoir un panel représentatif de vos utilisateurs. Dans tous les cas, plus un outil est destiné à être utilisé sur grande échelle, plus il doit être simple : à défaut d'être intuitif, au moins la formation sera rapide.
PublicitéNous laisserons la conclusion de cette chronique au sociologue Stéphane Hugon, co-fondateur d'Eranos : « La technologie qui marche, c'est celle que l'utilisateur s'approprie, celle qui lui donne le sentiment de maîtriser les choses », a récemment déclaré celui-ci lors d'un événement, appelant à construire la technologie autour de l'usage, plutôt que d'une liste sans fin de fonctionnalités.
Article rédigé par
Aurélie Chandeze, Rédactrice en chef adjointe de CIO
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