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Dix stratégies pour retenir les meilleurs talents IT

Dix stratégies pour retenir les meilleurs talents IT
Loralie Thostenson, SVP, responsable des talents technologiques chez Liberty Mutual Insurance : « Nous cherchons avant tout à identifier des candidats chez qui l’histoire de notre entreprise résonne. »

Le télétravail a rendu la compétition pour les talents techniques plus féroce que jamais. Pour les DSI, la rétention des talents est devenue une priorité. Dans cet article de CIO États-Unis, des recruteurs confient leurs bonnes pratiques pour fidéliser ces talents très courtisés.

PublicitéLa rétention des employés est en train de devenir rapidement un élément différenciateur clef. La capacité d'une entreprise à conserver ses talents - en particulier sur les marchés où le recrutement est difficile - influence durablement son aptitude à opérer à haut niveau, sans subir les perturbations qu'entraîne le turnover des salariés. Les départements IT en particulier ont redoublé d'efforts pour retenir les employés de valeur dans un contexte où les pénuries de talents persistent. En effet, la croissance des emplois IT ne s'est pas accompagnée d'une hausse équivalente du nombre de profils techniques capables de répondre aux besoins, selon les DSI et les chargés de recrutement des entreprises.

« Il existe une pénurie de talents, qui va sans doute s'aggraver. De nombreuses études montrent que le recrutement de talents techniques devient de plus en plus difficile. La compétition est plus féroce que jamais », constate Nancy Parsons, PDG de CRD Companies, un cabinet d'évaluation, de gestion et de développement des talents. De ce fait, les DSI doivent tout autant s'attacher à retenir leurs collaborateurs en place qu'à en recruter de nouveaux, s'ils veulent disposer des talents dont ils ont besoin. « Vous ne pouvez pas toujours empêcher d'autres entreprises de débaucher vos talents, mais vous pouvez faire réfléchir ceux de votre équipe qui envisagent d'eux-mêmes de partir », affirme Grayson Williams, vice-président des applications d'entreprise chez l'éditeur de logiciels open source Red Hat.

Pour Grayson Williams et ses pairs, cela implique de créer une culture d'entreprise adaptée, avec des compensations compétitives et des options de travail flexibles - autant d'éléments essentiels maintenant que les employés du secteur technologique n'ont pas besoin de déménager pour décrocher leur prochain poste. « Notre priorité est de faire en sorte d'être une entreprise où on se sent bien », souligne Grayson Williams. Comme l'indique celui-ci, la rétention des employés demande du travail et de multiples stratégies pour augmenter les taux de rétention. Dans cet article, lui et d'autres dirigeants IT partagent pour CIO États-Unis leurs pistes pour être du côté des gagnants dans la guerre des talents actuelle.

1. Être conscient que la rétention des talents démarre dès le recrutement

« La rétention commence dès le début, lors du processus de traitement des candidatures où l'on choisit quels candidats faire venir en entretien », estime Dan Pickett, ancien PDG de l'entreprise de services informatiques Nfrastructure. « Cela commence par l'identification des aspects culturels et stratégiques que vous voulez mettre en avant, et par la recherche de ces derniers parmi vos candidats. » Dan Pickett a mis cette approche en oeuvre avec succès chez Nfrastructure, qui affichait un taux de rétention supérieur à 97% - quasiment inédit dans le secteur IT. « C'est un modèle où les bénéfices sont croissants. Plus les salariés restent longtemps dans l'entreprise, plus ils deviennent productifs au fil du temps. Vous devez voir cela comme une stratégie de long terme et vérifier que vous êtes sur la bonne voie en vous assurant que chaque employé est totalement engagé et participe pleinement au succès de l'entreprise », explique Dan Pickett.

Publicité2. Identifier les candidats qui resteront à bord

Comment choisir les candidats les plus susceptibles de rester ? Les CV donnent des indicateurs clefs, indique Dan Pickett. Il conseille d'abord de chercher des candidats ayant une certaine longévité dans leurs postes précédents. « Il faut regarder au-delà de ce qui est écrit sur le CV. Ces candidats ont-ils travaillé pour une entreprise pendant plusieurs années, à travers ses hauts et ses bas ? C'est signe de loyauté, de persévérance et d'engagement », observe Dan Pickett. « Vous devez aussi chercher des candidats qui font des sports d'équipe, du bénévolat ou d'autres activités extra-professionnelles - cela peut vous aider à voir s'ils sont investis dans une cause, une équipe, un sport, mais cela révèle aussi que leur état d'esprit est d'être fidèle à ce qui compte pour eux », poursuit-il. Selon lui, les candidats qui enchaînent les postes représentent un pari. S'ils peuvent simplement être en quête de la bonne entreprise où rester, Dan Pickett estime qu'un candidat « qui a occupé dix postes différents en douze ans sera très difficile à retenir pour toute entreprise ».

3. Et identifier les candidats qui partagent votre vision

Les salariés ont tendance à rester plus longtemps dans les organisations dont ils partagent les valeurs, la vision et la mission ; aussi identifier ces éléments durant le processus de recrutement peut procurer des bénéfices durables en termes de rétention. « Nous cherchons avant tout à identifier des candidats chez qui l'histoire de notre entreprise résonne, plutôt que de nous limiter uniquement à des critères de longévité. Quand les meilleurs talents sentent qu'ils ont des valeurs communes avec leur employeur, cela augmente leurs chances de rester plus longtemps dans l'organisation », affirme Loralie Thostenson, vice-présidente senior et responsable des talents technologiques chez Liberty Mutual Insurance.

4. Offrir une formation continue et des trajectoires de carrière claires

La promotion interne n'offre pas seulement un bon moyen de progresser en termes de salaire et de responsabilité, elle permet aussi aux employés de se sentir valorisés et de voir leur rôle dans le succès de l'entreprise reconnu. La formation des employés et le développement des talents sont donc essentiels. « Il faut tout d'abord proposer des opportunités professionnelles et de progression de carrière adaptées à chaque individu », conseille Nancy Parsons. « Cela commence par une évaluation et un retour par un coach, et par la compréhension des forces, des facteurs de risques et des motivations intrinsèques spécifiques à chacun. Une fois que les spécialistes de la formation et du développement IT sont au fait de ces éléments, et que les salariés en ont pris conscience grâce à un coaching, la trajectoire de développement doit être adaptée pour correspondre aux besoins, aux profils et aux objectifs de chaque collaborateur. » Selon Nancy Parsons, des études montrent que les générations nées avec le digital sont très demandeuses en matière de carrière et de développement professionnel : certains rapports indiquent que 80% d'entre eux quitteraient une entreprise n'offrant pas d'opportunités de développement personnel.

« La formation ne peut être une réflexion après-coup, elle doit être une préoccupation centrale de toute organisation solide », affirme de son côté Kevin Griffin, consultant IT chez Falco Enterprises et ancien DSI de GE Capital. « Quand la formation fait partie de votre culture, elle n'apparaît pas comme quelque chose d'inhabituel. » Il ajoute qu'un engagement sur la formation est perçu par les employés comme un investissement dans leur valeur et une réelle incitation à rester dans l'entreprise. « Investir dans la formation de vos collaborateurs peut aider à conserver les talents et la propriété intellectuelle, dans une époque où la compétition est rude dans les deux domaines », poursuit Kevin Griffin. « Les nouvelles compétences et les rôles qui évoluent sont des demandes en augmentation rapide, aussi laisser un salarié sur une trajectoire de carrière sans aucun espace de développement est non seulement limitant pour l'employé, mais aussi pour l'activité de l'entreprise. »

5. Conserver des possibilités de télétravail

Grayson Williams a récemment eu deux employés qui ont déménagé à près de 3000 km du siège de Red Hat, mais tous deux ont conservé leurs postes. « L'un de nos leviers pour retenir les collaborateurs est de les laisser choisir le travail à distance : nous privilégions la flexibilité », indique le vice-président des applications d'entreprise. De façon générale, les employeurs devront adopter cette attitude s'ils veulent garder leurs salariés, selon les experts. « La pandémie a démontré que le télétravail était possible sur le long terme », observe John Dooney, consultant en ressources humaines à la Society for Human Resource Management (SHRM). « En termes de recrutement et de rétention des talents, offrir une flexibilité accrue pour les horaires et la localisation du travail contribue à augmenter la satisfaction des employés, ce qui favorise la rétention, ainsi que la compétitivité d'un employeur et sa capacité à attirer les meilleurs talents », poursuit John Dooney.

6. Proposer des packages salariaux compétitifs

Pour Grayson Williams, le télétravail sur grande échelle implique aussi que tous les employeurs sont en compétition les uns avec les autres, y compris les géants de la technologie, aussi « les salaires s'ajustent sur les plus hauts offreurs. » Cette situation conduit les dirigeants IT à revoir leurs échelles salariales pour s'assurer qu'elles sont suffisamment compétitives pour garder les talents, selon les spécialistes des ressources humaines. Selon ceux-ci, les salariés loyaux s'attendent à être récompensés pour rester en poste - de façon parfaitement légitime - et n'acceptent pas que tous les bonus et primes n'aillent seulement qu'aux nouveaux collaborateurs. Grayson Williams confie qu'il évalue régulièrement les salaires des collaborateurs en place pour être certain que ceux-ci sont justes et compétitifs, ainsi qu'équitables au sein de son organisation, « une façon de s'assurer que chaque individu est payé pour le rôle qu'il occupe, indépendamment de tout attribut individuel qui lui est propre. »

Cependant, le salaire ne constitue que l'un des éléments dans l'équation, nuancent Grayson Williams et d'autres. « La rémunération, les bénéfices, l'environnement de travail, les opportunités de développement, les différentes formes de récompenses, tout compte », selon Nancy Parsons. « Par exemple, dans la Silicon Valley, si un salarié du secteur technologique très doué n'est pas pleinement satisfait, il ou elle peut pratiquement traverser la route pour trouver une meilleure opportunité. Cela est particulièrement vrai dans un monde virtuel, post-Covid, dans lequel il n'y a plus de limitations géographiques », observe-t-elle.

7. Répondre aux attentes des employés

Pour les experts, il faut savoir ce que veulent les salariés et être prêt à répondre à ces attentes. « Il est juste de dire que les attentes des candidats sont en train de changer », estime Loralie Thostenson. « Par exemple, les travailleurs cherchent des organisations qui peuvent leur apporter de la flexibilité en accord avec leurs besoins individuels et préférences. C'est vrai qu'il s'agisse de candidats ou d'employés. Si une organisation ne parvient pas à fournir cette flexibilité, celle-ci peut avoir du mal à attirer ou retenir les talents. » Loralie Thostenson relate que Liberty Mutual cherche à « reconnaître le caractère multidimensionnel des individus - qu'il nous faut accompagner dans leur totalité, que ce soit à travers de la flexibilité, un vaste ensemble de bénéfices, une stabilité financière ou des projets ayant du sens pour maintenir leur engagement. »

8. Rester à l'écoute des collaborateurs

Les DSI devraient se connecter avec leurs collaborateurs, pour les tenir au courant de l'organisation et de sa direction tout comme pour recueillir leur feed-back. « Les CIO pourraient découvrir que la manière dont leurs managers ont interagi avec les employés techniques durant la pandémie a pu impacter la façon dont ceux-ci perçoivent l'entreprise, leur rôle et leur satisfaction professionnelle », illustre John Dooney. « Comme beaucoup d'employés quittent leur poste pour des raisons d'insatisfaction par rapport à leurs managers, s'il y a eu des problèmes de management ou qu'un employé estime que son employeur a mal géré et accompagné les salariés pendant la pandémie, il y a plus de risques qu'ils partent. » Il ajoute : « les employeurs peuvent avoir envie d'organiser des entretiens pour retenir les employés, afin de mieux comprendre les problématiques que ceux-ci rencontrent et de proposer des moyens d'y répondre. »

De son côté, Nancy Parsons suggère d'organiser des réunions régulières pour faire le point, trimestrielles ou à minima bisannuelles, pilotées par des dirigeants seniors désignés au préalable ou qui changent à chaque fois. « Tous les employés devraient être invités à ces sessions », indique-t-elle, notant qu'il peut y avoir plusieurs de ces rencontres afin que les groupes ne soient pas trop larges. « Les salariés techniques veulent savoir où en sont la stratégie, la concurrence, les résultats financiers et les prévisions pour l'entreprise. Incluez-les et demandez-leur leurs idées. Ils apprécient de se sentir des partenaires de l'entreprise. » Une autre approche encore consiste à réaliser des enquêtes auprès des employés afin de prendre le pouls et 'évaluer comment les salariés se sentent par rapport à leur travail et à la vision globale de l'organisation.

9. Exploiter les données (et l'intelligence artificielle)

Les organisations ont des quantités incroyables de données disponibles sur les employés, qu'elles peuvent utiliser pour identifier ceux les plus susceptibles de partir et les raisons pour lesquelles ils pourraient quitter le navire, et prendre ensuite des mesures pour prévenir ces départs, observe Dave Weisbeck, CSO de l'éditeur de logiciels analytiques RH Visier. « Je suis tombé sur ce sondage Glassdoor selon lequel janvier est le mois au cours duquel le plus de salariés sont susceptibles de quitter leur entreprise », relate Dave Weisbeck. « Mais contrairement à ce que cette enquête indique, de nombreuses données de nos clients montrent que ce n'est pas nécessairement vrai. Nous avons examiné nos données - sur environ un million d'employés - et nous avons trouvé un schéma trimestriel très net, où le troisième trimestre est le plus important en termes de démissions. »

Comment cela s'explique-t-il ? En se basant sur les données, Dave Weisbeck a raconté que l'équipe de Visier avait extrapolé que le moment de ces démissions n'est pas nécessairement défini par le calendrier, mais par des processus et structures internes, comme le versement de primes. D'après lui, les employés voient plutôt les choses ainsi : « C'est bon, j'ai reçu ma prime et maintenant je peux partir », plutôt que « Tiens, c'est la nouvelle année, il est temps de trouver un nouveau poste. » Il poursuit : « Comme beaucoup d'organisations prévoient le versement de primes aux environs de Noël et de la fin d'année, l'exode de janvier est logique. Le salaire et les bonus - ou l'absence de ces derniers - ne sont pas les seules raisons pour lesquelles les employés partent ; souvent ils ont décidé de partir des mois plus tôt, mais ont attendu le temps de recevoir l'argent. »

Regarder les données de façon plus approfondie permet de déceler des schémas dissimulés, qui contredisent parfois la perception conventionnelle. L'IA et le machine learning peuvent aider à identifier et à prendre en compte ces enjeux avant qu'ils ne provoquent attrition et turnover. « Le temps passé dans les transports par exemple n'est pas un facteur aussi important que le fait d'être loin de sa famille pour l'engagement, l'épanouissement professionnel et les risques de quitter son poste », affirme Dave Weisbeck. « Si vous avez une heure et demie de transport par trajet et que vous vivez en famille, vous n'êtes pas forcément insatisfait à cause de la durée de transport, mais parce que c'est un temps que vous ne passez pas avec votre famille. Pour y remédier, les organisations peuvent autoriser davantage de flexibilité, du télétravail, tout ce qui peut adresser cette problématique. »

10. Rester préparé au turnover

Bien entendu, dans certains cas le turnover est inévitable, aussi les organisations doivent être préparées à perdre des talents précieux. « C'est difficile quand nous perdons quelqu'un qui est une rock star », affirme Dan Pickett. « Cependant, c'est l'un des événements auxquels il faut être prêt - en particulier dans le secteur IT, si compétitif, mais c'est aussi quelque chose de sain. Vous ne voulez plus un salarié qui n'a plus envie d'être chez vous. »

Sur cet aspect, le planning de succession peut être clef, en particulier pour les postes haut placés ou sur lesquels le recrutement est difficile. Soigner son profil peut également être essentiel. « Soyez actif auprès des universités, des organisations technologiques et professionnelles, des chambres des métiers locales, dans la presse et sur les événements », recommande Nancy Parsons. « Montrez une présence forte et positive. Soyez visible et devenez l'employeur favori. »

Article de Sharon Florentine, Mary K. Pratt / CIO États-Unis (Adaptation et traduction par Aurélie Chandèze)

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