Stratégie

Dix enseignements de la crise sanitaire pour bâtir une IT résiliente (1/2)

Dix enseignements de la crise sanitaire pour bâtir une IT résiliente (1/2)
Safia D'Ziri (Loire-Atlantique) : « le recours au développement agile a permis d'assurer la continuité de certaines missions clefs du département. »
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°181 !
Ce que le Covid-19 a appris aux DSI

Ce que le Covid-19 a appris aux DSI

Pendant la crise sanitaire, le business continue. Indubitablement, la crise sanitaire du Covid-19 aura eu et va continuer d'avoir un impact, probablement durant plusieurs années, sur l'économie. Plutôt que de se replier sur soi, c'est le moment de remettre à plat les processus. C'est le moment...

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Durant la pandémie de Covid-19, certaines organisations se sont révélées mieux armées que d'autres pour affronter la crise, en particulier celles qui avaient bien avancé sur leur transformation digitale. Leur expérience peut servir d'inspiration pour bâtir des entreprises et des collectivités plus résilientes. Un défi où l'IT a un rôle majeur à jouer. [Deuxième partie]

PublicitéLe coronavirus a mis à rude épreuve les entreprises, qui ont dû s'adapter en urgence à des situations sans précédent, en particulier durant le confinement. Dans ce contexte, l'IT s'est mobilisée pour assurer la continuité des activités. Ainsi mise en lumière, la fonction est souvent sortie revalorisée de cette crise, montrant qu'elle était prête et prouvant sa capacité à répondre rapidement aux besoins. Maintenant que le pic semble passé, quelles leçons retenir de cette période ? Cette synthèse regroupe dix enseignements issus des nombreux témoignages recueillis par CIO.

1. La transformation numérique n'est pas une option

La pandémie a joué le rôle de révélateur, mettant en évidence les faiblesses, mais aussi les forces des organisations. Sans surprises, les plus résilientes sont celles qui s'étaient préparées en amont. Dans le cadre de la transformation digitale, beaucoup avaient ainsi mis en place un certain nombre de fondamentaux, qui le moment venu ont grandement facilité le passage au télétravail.

« La transition a été facilitée par des choix effectués en amont, dans le cadre de la transformation numérique que nous avons engagée il y a un peu plus de quatre ans », estime ainsi Youssef Tahani, CTO du groupe Engie. Le fournisseur d'énergie a notamment bénéficié du déploiement massif de plusieurs solutions cloud, dont Office 365 de Microsoft ou la plateforme de gestion des identités d'Okta. Même vécu chez des entreprises aussi diverses que Chronopost ou CNP Assurances. Pour Antonio De Faria, Directeur Gouvernance et programmes de Chronopost et DSI de Biologistic, le passage au travail à distance « n'était pas un gros défi côté IT ». Tous les collaborateurs étaient équipés d'ordinateurs portables et de Google Meet, et « tout était prêt pour le télétravail, tant au niveau des infrastructures que des équipements. » De son côté, Frank van Caenegem, CISO groupe de CNP Assurances, n'a eu qu'à s'appuyer sur ce qui existait déjà, l'assureur ayant déjà mis en place le télétravail depuis plusieurs années. « Nos collaborateurs et partenaires disposaient déjà des outils et infrastructures nécessaires quand le confinement a été instauré : ordinateurs portables, VPN, etc. », observe le CISO, précisant que beaucoup de ces solutions ont été mises en place dans le cadre de la transformation digitale du groupe.

De fait, l'impact d'une telle crise sur le fonctionnement des entreprises aurait sans doute été bien différent si celle-ci était survenue 20 ans plus tôt, comme l'évoque en plaisantant Yannick Puget, chargé de mission innovation auprès de la DG de iMSA (Mutualité Sociale Agricole) : « heureusement, nous sommes en 2020 et pas en 2002 ». L'expérience vécue avec le confinement a même permis de faire prendre conscience de l'intérêt de certaines démarches de transformation, comme le souligne Stéphane Jullien, DSI d'In Extenso. « Pendant cinq ans, des sujets sur lesquels travaillait l'IT, comme la certification ISO 27001, la mise en place de l'authentification multifactorielle étaient perçus comme des coûts. Mais avec le confinement, beaucoup d'entreprises ont été forcées de se mettre au goût du jour sur l'infrastructure, les réseaux ou la sécurité », relève-t-il. Chez In Extenso, ces fondamentaux étaient déjà en place, ce qui a permis de faire face sereinement à la situation. « Maintenant, les directions savent pourquoi ces investissements ont été faits. »

Publicité2. Le Zero Trust réinvente la sécurité

Avec le confinement, l'entreprise sans bureaux est devenue une réalité pour énormément de salariés. Pour protéger le système d'information, tout en lui permettant d'être accessible de partout, l'approche Zero Trust a démontré tout son intérêt. Si les VPN ont été et restent encore largement utilisés, certaines entreprises ont également mis en oeuvre des solutions Zero Trust basées sur le Cloud, plus faciles à déployer et plus flexibles. C'est le cas par exemple d'Engie, qui a largement déployé les solutions de ZScaler pour le proxy, mais aussi pour le « private access », afin de permet l'accès sécurisé aux ressources dans ses datacenters.

De son côté, le Groupe Hospitalier Universitaire (GHU) Paris Psychiatrie et Neurosciences a opté pour Systancia Gate, mis à disposition gratuitement pendant la crise sur les infrastructures d'OVHCloud. Si l'établissement avait commencé à se préparer au télétravail avant l'annonce du confinement, la soudaineté de la crise a nécessité des mesures d'urgence. Par ailleurs, l'accès au poste physique restait absolument nécessaire pour un certain nombre de professionnels dont les données sont soumises à de fortes contraintes, comme l'explique Amré Abou Ali, RSSI du GHU Paris P&N. Avec la solution Systancia, il suffit que le poste de travail professionnel physique soit connecté au réseau et allumé pour qu'il soit disponible dans un simple navigateur sur le poste personnel de l'agent concerné, chez lui, sans devoir paramétrer ou installer quoique ce soit sur les deux postes (notamment pas de VPN). La même solution a été mise en place pour les 3000 agents de la Communauté Urbaine de Grand Besançon Métropole, la ville et le Centre Communal d'Action Sociale de Besançon, avec un avantage, sa légèreté. En effet, selon Alain Mercier, Directeur Adjoint au sein de la Direction des Systèmes d'Information de Grand Besançon Métropole, beaucoup d'agents ne disposaient pas à domicile d'une connexion Internet avec un débit suffisant pour l'accès à distance classique à des applications lourdes, notamment avec des données importantes.

3. L'urgence facilite le changement

Pour l'IT, qui peine souvent à faire accepter de nouveaux outils, de telles situations, qui heureusement relèvent de l'exception, offrent une opportunité unique de changer les pratiques. En témoigne une boutade qui a largement circulé sur les réseaux sociaux, présentant le COVID-19 comme le véritable leader de la transformation digitale.

Dans beaucoup d'organisations, la pandémie a ainsi agi comme un véritable levier pour la transformation digitale, l'impossibilité des réunions en présentiel favorisant l'adoption d'outils collaboratifs. Benoît Moraillon, Directeur des systèmes numériques du département d'Ille-et-Vilaine, le reconnaît bien volontiers : « la crise a été un accélérateur. Nous avons lancé dans le grand bain de la collaboration en ligne, sur Teams ou avec NextCloud, des utilisateurs alors que ces solutions étaient, pour nous, encore en expérimentation. » Dans la ville de Bouguenais, un besoin impératif est apparu durant le confinement : permettre aux réunions indispensables, dont celles du Conseil Municipal, de se tenir. « Nous avons donc ouvert Teams pour tout le monde et le conseil municipal a pu se réunir en visioconférence par ce moyen », indique Éric Haulot, DSI de la ville de Bouguenais. Au sein du groupe Engie, le confinement a popularisé la fonctionnalité Live Event de Teams, en particulier pour répondre aux besoins de certains PDG ou DRH d'entités locales, qui devaient communiquer largement. « Certaines sessions ont grimpé à 1500-2000 participants, notamment au niveau Corporate, d'autres au Chili, au Brésil ou en Amérique du Nord avoisinaient 1000 participants » illustre Youssef Tahani.

Avec l'urgence, les habituelles résistances au changement fondent comme neige au soleil. À la MAIF, le projet de basculer sur Teams était dans les tuyaux, mais la crise l'a accéléré. « Une telle crise facilite les projets de transformation. Les collaborateurs sont très ouverts, car ils n'ont pas le choix », constate Nicolas Siegler, Directeur Général Adjoint MAIF en charge des Solutions et Systèmes d'information. Au CHRU de Nancy, le déploiement de Teams a été réglé en l'espace d'un week-end. « Personne ne connaissait la solution, et deux jours après, tout le monde avait compris le fonctionnement des fils de discussion », décrit Jean-Christophe Calvo, Chef du Département territorial de la Transformation numérique et de l'Ingénierie biomédicale au CHRU. Même topo chez In Extenso, où Stéphane Jullien a observé que « le confinement a levé des résistances face aux nouveaux outils », comme Project Monitor, solution de gestion de projet de Virage Group. « Aussi bien l'entrée que la sortie du confinement ont été gérées en mode projet, notre président ayant créé un projet sur Project Monitor pour suivre les différents événements liés à la crise. Maintenant, il est un utilisateur averti. Cette expérience a introduit de nouveaux usages, plus aucun projet ne peut exister s'il n'est pas décrit dans la solution » témoigne le DSI.

4. La culture agile porte ses fruits

Plus que jamais, les DSI ont dû faire preuve de souplesse avant et pendant la période de confinement. Pour répondre aux besoins des salariés comme des clients, le contexte exceptionnel a imposé de revoir les priorités avec une exigence : livrer vite. Comme le relève Safia D'Ziri, directrice solutions numériques de Loire-Atlantique, le recours au développement agile a joué un rôle clef pour assurer la continuité de certaines missions du département. « Des collaborateurs qui travaillaient sur d'autres projets ont été mobilisés pour développer très rapidement des outils demandés par la cellule de crise. Il était par exemple impératif que les sessions de délibération et de vote des budgets puissent se poursuivre sous forme dématérialisée. Mes équipes ont conçu un système de vote en ligne très rapidement et accompagné les élus pour la prise en main. »

À la MAIF aussi, cette culture de l'agile s'est révélée un atout précieux. « Cette orientation vers l'agile était un pari, mais tout ce travail nous a clairement permis de réagir très vite face à la pandémie », estime ainsi Nicolas Siegler. « L'agile nous a apporté une décentralisation des décisions au sein de petites équipes aux responsabilités clairement établies, des modes de fonctionnement favorisant les interactions au quotidien au sein des équipes (ce qui a permis d'éviter les phénomènes d'isolement lié au télétravail) et la collaboration aisée entre équipes différentes », détaille-t-il. C'est aussi grâce à ce fonctionnement que l'assureur a été en mesure de monter en deux semaines le système d'information nécessaire pour supporter une opération de redistribution de 100 millions d'euros à ses sociétaires, à la suite de la diminution drastique des accidents de la route.

5. Moins de dispersion profite aux projets IT

Nombre de projets qui étaient dans les cartons des DSI ont progressé bien plus vite durant le confinement. Un phénomène que les décideurs IT interrogés expliquent à la fois par l'habitude des équipes IT à travailler en mode agile et par le temps libéré grâce à la suspension de certaines tâches habituelles. En effet, hormis les deux ou trois premières semaines, où l'IT s'est fortement mobilisée pour mettre en place le télétravail, la période s'est traduite ensuite par des gains de temps pour les équipes, mis à profit pour avancer sur certains sujets de fond. Jean-Christophe Calvo raconte par exemple que « le temps libéré pendant le confinement nous a permis de lancer des expérimentations qui étaient dans les cartons depuis 1 à 2 ans. »

De son côté, Chadi Mraghni, DSI d'O2, groupe spécialisé dans les services à domicile, dresse le constat suivant : « avec le télétravail, nous avons gagné en productivité et en efficacité. Chacun, à domicile, bénéficie d'une sorte de war-room individuelle et n'est plus perturbé par les à-côtés. Il n'a plus qu'un seul sujet : le projet ». Ses équipes ont ainsi pu livrer deux gros projets durant la crise sanitaire, la refonte du module des visites commerciales et le nouveau site web d'O2. Le DSI identifie cependant plusieurs grandes conditions pour que les projets continuent d'avancer à distance : faire confiance aux équipes tout d'abord, mais aussi guider le travail par un cadre d'action et des objectifs précis. Ainsi, les « cérémonies de projet » ont toujours été respectées : « daily meetings, points hebdomadaires et réunions de comité de pilotage ont été maintenus, en virtuel au lieu d'être en présentiel, mais sans changement sur le fond, ce qui est encore plus important lorsque tout le monde est en télétravail. » Enfin, les collaborateurs doivent être bien équipés : outils collaboratifs (en l'occurrence GSuite et Slack), matériels adaptés (micro et caméra par exemple) et connexions Internet suffisantes.

Lire la suite (points 6 à 10) - 90 crédits.

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