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Dématérialiser l'Etat-Civil pour préparer l'automatisation des services d'Etat

Dématérialiser l'Etat-Civil pour préparer l'automatisation des services d'Etat
Emmanuel Vivé, DG de l’Adico (Association pour le Développement et l’Innovation numérique des Collectivités), a piloté la dématérialisation de millions d’actes d’Etat-Civil.

L'Adico a dématérialisé en un an plus de deux millions d'actes d'Etat-Civil de ses collectivités membres en ayant recours à Numerize, contrat qui se poursuit. Cette démarche vise à l'intégration à Comedec, la plate-forme du Ministère de la Justice, qui alimentera à terme directement tous les services publics sans besoin de la moindre déclaration des administrés. L'État prépare ainsi le passage du « Dites-le moi une seule fois » à « Ne me dites rien, je sais déjà ».

PublicitéCréée il y a une trentaine d'années sous le statut d'une association, l'Adico (Association pour le Développement et l'Innovation numérique des Collectivités) regroupe un millier de communes, essentiellement dans l'Oise mais également, suite à l'accord avec les conseils départementaux concernés, de départements limitrophes (Eure, Somme, Seine-Maritime). « Nous sommes un service informatique mutualisé » explique Emmanuel Vivé, DG de l'Adico. A l'époque, le statut associatif était une habitude pour ce genre de structures, même si beaucoup se sont ensuite transformées en syndicats mixtes ou en GIP. Faute d'intérêt à le faire, l'Adico n'a, elle, pas changé. Emmanuel Vivé ajoute : « Dans l'Oise, il y a 650 communes de moins de 3000 habitants où il serait évidemment absurde d'embaucher un responsable informatique propre. »

Pourtant, les obligations réglementaires et les projets informatiques afférents sont nombreux. Et les collectivités ont donc tout avantage à rejoindre une structure comme l'Adico pour mener à bien les projets nécessaires. A côté de services comme le partage d'un drone de photographie aérienne avec pilote agréé (pour l'inspection des bâtiments par exemple) ou de l'impression 3D, l'Adico propose ainsi de l'accompagnement, de la formation, de la maintenance, du déploiement... de logiciels métiers et des services liés, y compris de la formation aux procédures métiers en amont de celles aux logiciels. Bien entendu, les communes adhérentes ont dû se mettre en conformité RGPD et l'Adico a ainsi été désignée, en tant que personne morale, comme DPO de plus de 700 collectivités locales, même si une personne physique est ensuite choisie lors de la déclaration à la CNIL. Parmi les projets récemment menés, l'un des plus ambitieux et aux conséquences les plus importantes a probablement été la dématérialisation des actes d'Etat-Civil.

Des échanges de données fondamentaux pour chaque individu

Depuis la Révolution Française, les communes gèrent l'État Civil. Ce service est extrêmement réglementé car il est à la base de la gestion de l'identité de chaque personne et de tous les droits que chacun acquerra au fil de sa vie. Chaque commune conserve dans ses murs le registre papier et le reverse au bout d'un siècle aux Archives Départementales. Les données de l'État Civil sont ensuite largement utilisées et donc échangées. Les mairies en ont besoin pour les actes successifs, les Caisses d'Allocations Familiales pour définir les prestations, les notaires pour gérer les successions... « Lorsque quelqu'un se marie ou meurt dans une commune A et qu'il est né dans une commune B, la déclaration faite à A sera envoyée à B qui ajoutera l'information, ce que l'on nomme une 'mention', sur l'acte de naissance » explique Emmanuel Vivé.

PublicitéPour faciliter les échanges relatifs à l'État Civil, le Ministère de la Justice a créé une plate-forme dématérialisée nommée Comedec. Les notaires ont ainsi l'obligation d'y recourir si la commune y est raccordée. Le raccordement est d'ailleurs une obligation pour les communes disposant ou ayant disposé d'une maternité. L'objectif est que, à terme, chaque citoyen n'ait plus aucune démarche à opérer auprès, notamment, de la CAF : la simple déclaration de naissance sera communiquée à la bonne caisse et cela déclenchera automatiquement le versement éventuel des prestations prévues par la réglementation. Les officiers d'État Civil reçoivent du ministère un certificat électronique RGS 3 étoiles pour se connecter à Comedec, certificat parfois distribué par des structures locales, comme l'Adico peut le faire.

Dématérialiser pour améliorer le service rendu

Si le registre papier reste, pour l'heure, une obligation, avec une copie envoyée régulièrement au Procureur de la République du ressors de chacune (sauf si la commune est raccordée à Comedec), les communes utilisent en général un logiciel pour gérer les actes d'État Civil. Deux éditeurs dominent largement le marché : JVS-Mairistem et Berger-Levrault. Lorsqu'une demande d'acte parvient à une mairie via Comedec, il faut rechercher l'acte en question. « Si l'acte n'est pas numérisé, c'est vite un cauchemar » soupire Emmanuel Vivé, d'autant que les mairies sont contraintes par des délais légaux. De nombreuses communes souhaitent donc numériser totalement leur Etat Civil pour réaliser plus facilement leurs tâches.

Fin 2016, un travail est donc initié avec le Ministère de la Justice pour définir un cadre d'action. Six structures s'unissent dans un groupement de commande pour numériser l'État Civil et injecter les données dans les logiciels de JVS-Mairistem et Berger-Levrault : le Sictiam (Nice), le Sidec (Jura), Alpi40 (Landes), e-Vendée, Soluris (Charente Maritime) et l'Adico. Le marché est lancé début 2017 et est confié à Numerize. Alors que la digitalisation d'un acte coûte classiquement 1,2 euro, la numérisation, l'indexation ainsi que l'injection des données dans Comedec et les logiciels métier est facturé, dans le cadre de ce marché, 34 centimes l'acte unitaire (moitié pour la numérisation, moitié pour le traitement). Emmanuel Vivé précise : « chaque mairie paye la numérisation de ses propres actes ».

Deux millions d'actes numérisés la première année

Deux millions d'actes ont ainsi été numérisés la première année, en 2017, et 200 000 en 2018. 300 collectivités de l'Oise ont ainsi représentées 400 000 actes. La numérisation s'est opérée dans dix points de collecte dans dix grosses communes bien réparties et disposant de salles suffisamment sécurisées. Emmanuel Vivé se souvient : « pour sortir les registres d'État Civil des mairies et les faire transporter par les maires eux-mêmes, nous avons dû obtenir les autorisations des Archives Départementales et des quatre procureurs compétents sur l'Oise ». La numérisation prenait, selon le nombre d'actes dans la commune concernée, d'un à quelques jours.

Cette numérisation sous forme de photographies numériques n'est évidemment qu'une première étape. Chaque page est ensuite OCRisée et indexée pour que les données soient injectées dans les logiciels métiers. L'Adico a également formé les personnels des mairies à l'usage de Comedec. Numerize devait bien sûr faire son affaire des difficultés liées à l'opération, notamment sur les actes encore manuscrits. Reste une difficulté : les données d'État Civil sont évidemment d'une sensibilité maximale. Or les logiciels les traitant peuvent être en mode SaaS. Une loi prévoit une obligation d'héberger les données en France dans le fameux Cloud d'État mais le décret d'application n'est pas encore paru.

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