Tribunes

De la DSI silo au Centre de Services Industriel

De la DSI silo au Centre de Services Industriel

Le management des services (ou SLM : Service Level Management) va de pair avec la transformation de la DSI, ou de son département Production, en centre de services industriel.

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Le management des services : une situation aujourd'hui contrasté .
Le développement conjoint en France de l'infogérance et de référentiels de production comme ITIL ont constitué de puissants leviers pour définir, mesurer et contrôler les services fournis aux utilisateurs par la DSI. La définition claire de services de support et de niveaux de qualité associés (SLA) est par nature une caractéristique de base des contrats d'infogérance. Il est vite apparu que ce mode contractuel permettait de progresser plus rapidement que d'autres solutions externes ou internes. De la même façon,la méthodologie ITIL continue à se répandre, et facilite la mise en oeuvre de processus « industrialisés » aptes à garantir la stabilité et l'efficience des services délivrés. Si les progrès accomplis sont réels, ils ne suffisent pas encore à créer une vraie dynamique de management des services, car certains aspects sont ignorés ou peu investis, comparés à d'autres qui concentrent trop exclusivement le temps et l'énergie des managers. C'est ainsi qu'une forte priorité est donnée au support des utilisateurs internes, en « oubliant » les autres parties prenantes (en particulier les clients ou fournisseurs de l'entreprise ayant accès à certaines applications). C'est encore la focalisation sur les SLA dus par les infogérants, au détriment de la définition des engagements de services dus par les organisations internes. C'est enfin le manque de communication avec les utilisateurs, qui se résume au mieux à la traditionnel e enquête annuel e, rarement une source d'information suffisante. Le moment est donc venu, nous semble-t-il, de prendre du recul et de redéfinir une politique de management des services pour faire évoluer la DSI comme le reste de l'organisation du mode silo historique vers une entité plus modulaire ou orientée services. Cela suppose de développer simultanément trois axes complémentaires :
- Un axe « client » qui recouvre la segmentation des utilisateurs du système d'information, la mesure de la qualité perçue par ces différentes catégories et la communication opérationnel e avec chacune d'entre elles,
- Un axe « organisation » qui comporte la définition des missions à remplir, les postes à créer ou à redéfinir et donc l'évolution des compétences au sein de la DSI, nécessaires au management des services conforme aux objectifs fixés,
- Un axe « managérial » enfin où se développe l'analyse de la qualité perçue selon la segmentation « utilisateurs », l'arbitrage des modifications et l'évolution des services et des SLA, la conception et le suivi du plan d'amélioration annuel.
L'axe « client » : segmenter sa base « clients » et mesurer la qualité perçue.
On ne saurait trop insister sur la nécessité pour une DSI de bien connaître ses « clients » ! La précision des « segments utilisateurs » doit permettre de mesurer la qualité par service applicatif et par type d'utilisation : par exemple les utilisateurs « nomades » de l'application « notes de frais » ou bien les 300 utilisateurs des services de l'entreprise concernés par le redéploiement des moyens d'impression, ou bien encore les sociétés de stockage et de transport utilisant les interfaces des applicatifs logistiques de l'entreprise. Développer une base de données « clients du SI » est donc indispensable, autant que de gérer le parc des serveurs et des postes de travail. Une telle base de données peut se constituer, pour les utilisateurs internes, à partir des annuaires d'entreprise.
A partir d'une base de données digne de ce nom, il est alors possible de faire de la mesure de la qualité perçue un indicateur « stratégique », c'est-à-dire un indicateur qui va permettre de mieux manager les niveaux de service et de mieux arbitrer les priorités d'évolution du système d'information. Pour obtenir des informations utiles, il est nécessaire de « sonder » trois dimensions complémentaires :
- Le support à l'utilisateur (en cas d'incident, pour traiter une demande de changement ou d'assistance),
- La valeur ajoutée des changements (après un déploiement, après la mise en oeuvre de correctifs ou d'une nouvelle version d'applicatif, à la suite d'une évolution de processus),
- L'adaptation des services aux besoins et contraintes des métiers et activités des utilisateurs.
Le support à l'utilisateur se mesure facilement « au fil de l'eau », en s'appuyant sur les dossiers traités au service desk.
La valeur ajoutée des changements doit se mesurer après un premier délai de stabilisation, mais pas trop tard...
Concernant enfin l'adaptation des services aux activités, il faut procéder par sondage ponctuel (par exemple deux fois par an).
Pour en faire un processus régulier et professionnel, la mesure de la qualité « perçue » doit être correctement outillée : Il existe des progiciels d'exploitation de questionnaires qui se connectent aux annuaires des entreprises. Pour une exploitation « avancée », il peut être utile d'adopter les approches de l'informatique décisionnelle. Il est également possible de déléguer le projet auprès de sociétés spécialisées. Les bruits de couloir, les correspondants "utilisateurs" ou les conversations autour de la machine à café ne sont-ils pas plus « efficaces » que les enquêtes? Ces différentes sources ne sont pas contradictoires, mais complémentaires ! Tel un directeur commercial, attentif à l'écoute directe des clients qu'il croise, tout autant qu'aux résultats des enquêtes menées par son service marketing ! Il faut par ailleurs étudier les moyens d'adapter les mesures qui précèdent aux autres parties prenantes : clients et fournisseurs, membres du « réseau » (logisticien, distributeur,...) de l'entreprise.
L'axe « organisation » : de nouvelles compétences à développer
Deux types de mission sont à définir : celle consistant à gérer l'évaluation du service auprès des « clients » du système d'information et celle consistant à gérer les relations avec les fournisseurs et sous-traitants. Selon la taille de la DSI et de l'entreprise, il peut être opportun d'al er jusqu'à la définition de deux postes : le « service manager » et le « contract manager ». Ces deux responsables collaboreront avec le manager en charge des opérations et celui en charge des projets. Ils se coordonneront afin que les processus opérationnels soient effectivement transversaux à l'organisation globale : c'est indispensable pour assurer l'efficience de ces processus. La mission du « service manager » va bien au-delà du responsable « support » classique. Il n'y a d'ailleurs aucune nécessité de confondre les deux missions au sein du même poste. Fondamentalement, le « Service Manager » est l'homme marketing du DSI. A ce titre, il a en charge :
- La gestion de la base de données des clients du SI ,
- La mise au point et l'évolution des conventions de service destinées aux utilisateurs et aux métiers
- La mise en oeuvre du contrôle qualité (qualité perçue, SLA, sondages,...) ,
- Le recueil des difficultés rencontrées par les utilisateurs, et les propositions corrélatives d'évolutions.
Il est finalement en charge de mesurer et documenter la perception par les utilisateurs de la productivité, de l'ergonomie, de la sécurité et de l'efficacité des outils et services mis à leur disposition. Sa démarche est délibérément orientée « utilisateurs » avant d'être orientée « métiers », car les collaborateurs de l'entreprise utilisent autant de services communs (par exemple la messagerie) que de services Métier, et leurs différents profils ne se superposent pas aux différents métiers de l'entreprise. La mission du « Contract Manager » va quant à elle au-delà de la gestion des différents contrats passés avec les fournisseurs et sous-traitants de la DSI : elle consiste fondamentalement à aligner les engagements de service de chaque partie prenante avec les conventions de service déterminées par le « Service Manager » et à se porter garant de l'efficacité et de l'optimisation économique de l'ensemble qui en résulte. Il est en cela l'homme «organisation et processus » du DSI. A ce titre, il a en charge :
- La gestion et l'évolution des conventions de service signées avec les fournisseurs, sous-traitants et infogérants,
- La gestion et l'évolution des engagements de service « signés » avec les services internes à l'entreprise,
- Le contrôle économique de ces conventions,
- Le contrôle des processus transversaux résultant des conventions et engagements signés.
Sa mission ne consiste pas à « arracher » le niveau de service maximum de chaque partie prenante, mais de faire en sorte que l'assemblage des différents niveaux de service délivrés donne « in fine » le meilleur rapport qualité/prix pour satisfaire la convention de service établie avec l'utilisateur final. De la collaboration intensive du « service manager » et du « contract manager » doit découler l'optimisation du management des services sur les plans économique et organisationnel, et la détermination des priorités pour améliorer la productivité et l'efficacité des utilisateurs. Il s'agit en particulier de mettre en regard la qualité perçue par les utilisateurs, et le coût des processus et services mis en oeuvre. Ces deux managers vont découvrir ensemble : - Qu'un travail coûteux du mainteneur applicatif pour gagner 2 secondes sur une transaction est passé inaperçu auprès des utilisateurs, alors qu'une simple modification de l'ergonomie d'un écran recueille une approbation massive,
-Que les nouveaux collaborateurs ne sont pas satisfaits du délai d'installation de leur poste de travail, malgré le respect du SLA de 2 jours par l'infogérant...après réception de l'information par le service RH qui ne parvient dans le meilleur des cas que la veille de l'arrivée de ces nouveaux collaborateurs !
-Que les utilisateurs « intensifs » du module de gestion des commandes fournisseurs sont pleinement satisfaits, alors que les utilisateurs occasionnels sont très mécontents.
Ils vont pouvoir ensemble revoir engagements, processus et priorités pour aboutir à un meilleur équilibre organisationnel et économique des services fournis. Ces « nouvelles missions » ainsi définies demandent à l'évidence des compétences spécifiques : les profils aptes à tenir ces « nouveaux postes » se démarquent le plus souvent des profils habituels que l'on trouve au sein des équipes informatiques. D'où la nécessité de faire évoluer les collaborateurs pouvant acquérir ces nouvelles compétences, ou de bien déterminer les recrutements à opérer. Cette gestion prévisionnelle des compétences de la DSI n'est pas le moindre des défis à relever pour aborder une nouvelle étape de management des services.
L'axe « managérial » proprement dit
Il appartient au DSI de prendre en charge cette dernière composante : présider le comité de management des services, prendre les décisions, effectuer les arbitrages, fixer les axes de progrès, et élaborer le plan d'amélioration qu'il commentera auprès de sa direction générale.Pour mener à bien cette mission, il importe de déterminer les indicateurs « clé » qui vont traduire le plus fidèlement possible les performances atteintes par le management des services. En s'inspirant de la démarche « Balance Scorecard », bien adaptée à ce domaine de management, on pourra retenir :
- Des indicateurs représentatifs de la satisfaction des utilisateurs (qualité perçue de la communication DSI utilisateurs, perception des progrès générés par les changements effectués),
- Des indicateurs représentatifs de l'efficacité des processus (taux de résolution des incidents au premier niveau d'intervention, taux de succès des changements mis en place),
- Des indicateurs traduisant les progrès réalisés par les équipes (baisse des incidents récurrents, capacité à regrouper les changements pour en diminuer l'impact sur les utilisateurs). L'essentiel est de choisir les critères qui seront reconnus comme effectivement représentatifs du bon fonctionnement des services et de leur bonne adaptation aux besoins, par les différents interlocuteurs métiers et direction générale de la DSI.

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