Dans quelles conditions peut-on recourir à la géolocalisation de ses employés ?
Sixième épisode d'une série sur les droits et obligations de l'entreprise en matière de données personnelles.
PublicitéDe plus en plus d'entreprises mettent en oeuvre des dispositifs de géolocalisation qui permettent d'identifier la position géographique, à un instant donné ou en continu, de leurs employés, par la localisation d'objets dont ils ont l'usage, notamment les véhicules qui leurs sont confiés par leur employé. Ces dispositifs sont principalement basés sur l'utilisation de la technologie GSM/GPS qui permet de localiser à chaque instant la position d'un véhicule équipé d'un tel système. Les traitements résultant de ces dispositifs permettent de collecter des données telles que la durée d'utilisation du véhicule, le kilométrage parcouru ou les vitesses de circulation. La Cnil considère que cette « mise sous surveillance permanente des déplacements des salariés est disproportionnée lorsque la tâche à accomplir ne réside pas dans le déplacement lui-même mais dans la réalisation d'une prestation pouvant faire elle-même l'objet d'une vérification » (Cnil, Guide pratique pour les employeurs, p. 23). Aussi, a-t-elle entrepris de lancer une consultation auprès des acteurs concernés, notamment des ministères, des organisations syndicales et professionnelles et des intégrateurs de services de géolocalisation, afin de bien encadrer les conditions d'utilisation de ces dispositifs. Cette réflexion a mené à l'adoption, le 16 mars 2006, de deux délibérations n°2006-066 et n°2006-067 portant respectivement recommandation et norme simplifiée « concernant les traitements automatisés de données à caractère personnel mis en oeuvre par les organes publics ou privés destinés à géolocaliser les véhicules utilisés par leurs employés ». Soulignant le caractère intrusif de la mise en place de dispositifs de géolocalisation, la Cnil a dressé une liste des finalités pour lesquelles l'insertion d'un tel dispositif lui semble légitime et donc admissible : sûreté ou sécurité de l'employé ou des marchandises, meilleure allocation des moyens, suivi et facturation d'une prestation de transport de personnes ou de marchandises ou d'une prestation de service directement liée à l'utilisation du véhicule, suivi du temps de travail... Cependant, elle considère qu'un tel dispositif ne doit pas conduire à un contrôle permanent de l'employé concerné. Aussi, a-t-elle prévu un allègement considérable des formalités administratives pour les entreprises se conformant aux conditions envisagées, notamment quant aux types de données collectées et à la durée de leur conservation (norme simplifiée no 51). Elle dresse une liste de finalités auxquelles doit impérativement répondre la collecte d'informations par un tel procédé. Enfin, elle délimite les données qui peuvent être traitées par la mise en place d'un dispositif de géolocalisation. Elle établit également une liste limitative des destinataires de ces données. La Cnil ajoute que les responsables de traitement, souhaitant mettre en place un dispositif de géolocalisation, doivent nécessairement procéder à l'information et à la consultation des instances représentatives du personnel, avant l'établissement d'un tel dispositif. Ce devoir d'information est également dû à l'égard des employés soumis à ce dispositif. Les responsables de traitement doivent également s'assurer que toutes les mesures de sécurité nécessaires ont été prises.
Article rédigé par
Christiane Féral-Schuhl, cofondatrice du cabinet FÉRAL
Christiane Féral-Schuhl est avocate associée du cabinet FÉRAL. Depuis plus de 35 ans, elle exerce dans le secteur du droit du numérique, des données personnelles et de la propriété intellectuelle. Elle est également inscrite sur la liste des médiateurs auprès de différents organismes (OMPI, CMAP, Equanim) ainsi que sur la liste des médiateurs de la Cour d'Appel de Paris et du Barreau du Québec (en matière civile, commerciale et travail). Elle a été nommée seconde vice-présidente du Conseil national de la Médiation (2023-2026).
Elle a publié plusieurs ouvrages et de nombreux articles dans ses domaines d'expertise. Dont, tout récemment, « Adélaïde, lorsque l'intelligence artificielle casse les codes » (1ère BD Dalloz, 16 mai 2024) avec l'illustratrice Tiphaine Mary, également avocate.
Elle a présidé le Conseil National des Barreaux (2018-2020) et le Barreau de Paris (2012- 2013). Elle a également co-présidé avec le député Christian Paul la Commission parlementaire sur le droit et les libertés à l'âge du numérique et a siégé au Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (2013-2015) et au Conseil Supérieur des tribunaux administratifs et des cours d'appel administratives (CSTA CAA -2015-2017).
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