Coûts informatiques : quel standard de pilotage ?
Les DSI manquent d'outils pour mesurer et comparer leurs coûts informatiques. Pourtant, un modèle de benchmarking permet de replacer la DSI dans l'entreprise, de piloter les coûts informatiques et se comparer, en interne et en externe.
PublicitéAujourd'hui, en matière de pilotage des coûts informatiques, il y a incontestablement un manque de normalisation. Pourtant, parmi les dix bonnes pratiques de gouvernance définies par l'IGSI (Institut de la gouvernance des systèmes d'information, créé en 2004 par l'Afai et le Cigref) figure "le budget et le contrôle de gestion du système d'information". Les DSI, supports des intérêts stratégiques de l'entreprise, sont sous pression : la pression des actionnaires se fait de plus en plus forte et le contexte économique exige davantage de réactivité, de flexibilité et d'efficience. Dans le même temps, les DSI manquent d'outils pour évaluer leurs actifs et leurs dépenses, comparer leurs coûts et leurs processus avec leurs pairs, et montrer l'efficacité de la DSI et sa valeur ajoutée. Ces difficultés provoquent le plafonnement des investissements, la contestation des budgets par les directions générales et la méfiance vis-à-vis des projets informatiques aux résultats aléatoires. En réalité, toutes les entreprises gèrent leurs coûts et font du contrôle de gestion mais chacune, ainsi que chaque cabinet de conseil, a créé ses propres normes. Du côté des organismes, le sujet est certes traité, mais il n'est pas normalisé. Le Cigref aborde le sujet de manière récurrente (en dix ans, cinq rapports ont été publiés sur le pilotage des coûts), et l'Afai a mis au point une méthode non normalisée, assez technique pour maîtriser les coûts. Quant aux grands référentiels, ils n'apportent pas de méthode précise : ils proposent des bonnes pratiques mais sans entrer dans les détails. Ainsi, Cobit (Control Objectives for Information and Related Technology) établit une liste des coûts alloués à toutes les ressources informatiques à recenser (matériels, périphériques, frais généraux, assistance aux utilisateurs, maintenance...), mais sans les définir précisément. De son côté, ITIL (IT Infrastructure Library) propose un exemple de catégorisation des coûts informatiques (matériels, logiciels, ressources humaines, locaux, services externes, transferts) et un cost model avec des bonnes pratiques. Quant au CMMI (Capability Maturity Model Integration), il ne fournit pas de bonnes pratiques concernant le pilotage des coûts informatiques qui soient assez précises pour servir lors d'un benchmarking. Pour sa part, l'IGSI a créé un modèle pour normaliser, qui répond à la fois aux besoins des DSI et des auditeurs. Ce modèle est complet dans la mesure où il part de la dépense pour aboutir à l'indicateur. Le suivi et la projection des coûts doivent être faits selon plusieurs axes : - l'analyse par nature, qui est fondamentale. Elle permet le contrôle des engagements, des factures fournisseurs et assure le bouclage avec la comptabilité générale ; - l'analyse par activité, qui est nécessaire au contrôle par centres de responsabilité - centres de coûts ou centres de profits si les coûts sont refacturés aux maîtrises d'ouvrage avec un contrôle budgétaire ; - l'analyse par prestation, qui consiste à mettre en évidence ce à quoi contribue l'informatique dans les activités de l'entreprise. Cette approche est souvent mise en oeuvre dans le cadre de méthodes d'analyse des coûts de revient de type ABC (Activity Based Costing, qui repose sur l'analyse des processus de l'entreprise et non sur l'organisation, pour mesurer les coûts) ; - l'analyse par projet, indispensable en parallèle de tout autre forme de suivi des coûts. Ce type d'analyse est encore loin d'être mise en oeuvre de manière systématique et exhaustive dans les entreprises. En particulier, la notion de pluralité est souvent écrasée par les exigences comptables de l'exercice budgétaire. La mesure des coûts n'est pas un indicateur de performance. Autrement dit, mesurer le coût de son informatique ne suffit évidemment pas à l'évaluer. Il faut, en effet, ajouter les dimensions services (nature et niveau de services) et qualité (immédiate et à terme). C'est la raison pour laquelle le benchmarking ne peut s'appuyer que sur des coûts unitaires ramenés aux volumes gérés, et qualifiés par rapport aux niveaux de services rendus. Le modèle IGSI de benchmarking des coûts informatiques a ainsi plusieurs usages : replacer la DSI dans l'entreprise, piloter les coûts informatiques et se comparer. Cependant, la mise en oeuvre de ce modèle doit respecter quelques prérequis. Tout d'abord, elle doit être précédée d'une mise en place de management par processus. Ensuite, le DSI intervient comme sponsor, pour impliquer les utilisateurs dans la réussite du projet en tant que créateurs de valeur. La fonction informatique joue en effet un rôle transverse de pilotage, en conciliant les priorités parfois contradictoires de la direction métier concernée, de la direction des achats et de la direction financière. Autre prérequis : l'implication des utilisateurs, dans la mesure où les directions opérationnelles doivent pouvoir construire leur propre budget et consolider les données. De fait, la mise en place du modèle ne doit pas être un projet de contrôle de gestion mais un projet d'entreprise. Le premier objectif du modèle est de positionner la DSI dans l'entreprise. Etablir un plan de comptes informatiques commun contribue aux objectifs de base de la gouvernance. Ce plan n'est pas une composante spécifique de la gouvernance, comme les indicateurs ou les processus, mais contribue à la démarche en amont. De même, il s'agit d'assurer la transparence avec les directions métiers et la direction générale. Le benchmarking met en évidence la productivité de l'informatique par rapport aux objectifs de performance. De même, la méthode ABM permet la transparence des composants refacturés et des coûts. Il est ainsi possible de connaître la structure des coûts par ressource et par responsable. Le second objectif concerne le pilotage des coûts proprement dit. Il se décline en trois niveaux : le pilotage opérationnel (charges, indicateurs opérationnels, métrologie), le pilotage économique (indicateurs financiers, coûts unitaires par processus et par activité) et le pilotage global (indicateurs stratégiques, de performance, de satisfaction). Enfin, le troisième usage du modèle est de se comparer, en interne et en externe. La recherche d'économies n'est pas le seul objectif du benchmarking. Pour un DSI, la question est de savoir où il se situe. S'il est encore considéré comme un centre de coûts, c'est probablement parce qu'il lui manque des outils de dialogue avec sa DG qui permettraient de mieux faire valoir sa contribution. Les cinq apports majeurs du modèle de benchmarking des coûts - Un budget de frais par centre de responsabilité - Un coût unitaire de chaque activité (développement, hot-line, maintenance...) - Un coût unitaire des produits/services fournis par l'informatique à ses clients (PC, applications, maintenance évolutive et projets...) - Une facturation pour chaque client - La mise en évidence des éléments de benchmarking (coûts d'acquisition des PC, de traitement d'un appel, de la maintenance, de la page bureautique imprimée, du Go sauvegardé...) Pour en savoir plus Cet article est issu des travaux menés par le Cigref et l'Afai : "Vers un standard de pilotage des coûts informatiques", publié par l'Institut de la gouvernance des systèmes d'information.
Article rédigé par
Georges Epinette, Président du Club Urba-EA
Ancien DOSI du Groupement des Mousquetaires et vice-président du Cigref, Georges Epinette a été élu le 28 janvier 2016 président d'Urba-EA, le club des architectes d'entreprises.
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