Comment l'industriel SKF huile sa transformation numérique
Les responsables IT de l'industriel suédois travaillent en tandem pour s'assurer que développement technologique, automatisation et numérisation de la chaîne de valeur restent toujours en phase avec les attentes des métiers.
PublicitéIl y a trois ans, SKF, dont le siège est à Göteborg, a nommé un nouveau Pdg, Rickard Gustafson, et au fil du temps, un nouveau cadre stratégique a été établi pour faire passer l'entreprise d'une organisation centralisée à une organisation décentralisée. Au coeur de ce nouveau modèle d'entreprise se trouvaient, et se trouvent toujours, le DSI Pedro de Freitas et la responsable de l'ingénierie numérique et de l'innovation, Maria Stranne.
« Nous voyons un intérêt à avoir l'informatique proche des métiers, partout où le support est nécessaire », explique cette dernière. Pour Pedro de Freitas, l'objectif permanent est d'amener l'ensemble de l'entreprise sur un système d'entreprise commun, d'ici à la fin de 2025. Il s'attend à ce que cette plateforme soit introduite dans le monde entier dans le cadre de la mise en oeuvre progressive de S/4Hana, un projet au long cours. « Au cours des 18 derniers mois, nous avons accéléré sur ce programme, souligne le DSI. Nous sommes passés de 20% de nos activités sur SAP à la fin 2022 à 77% aujourd'hui. » La prochaine étape clef réside dans la migration de SKF à la solution SaaS de SAP, Rise.
« C'est un grand pas en avant pour nous, indique Pedro de Freitas. Nous laissons la complexité de l'infrastructure de licensing et des niveaux de service au guichet unique de SAP dans le cloud. Cela nous donne une meilleure position pour bénéficier des nouveautés de l'éditeur et de ses dernières avancées en matière de sécurité, de fonctionnalité et de stabilité technique. »
Des modèles d'IA maison sur les activités coeur
Trouver les bonnes applications de l'IA est également une priorité de SKF. « L'IA appliquée est l'une de nos priorités stratégiques en matière de technologies », souligne Maria Stranne. L'accent est mis sur trois domaines, le premier étant la manière dont l'IA peut être utilisée dans divers outils tels que ceux que SKF peut obtenir via Rise de SAP, mais aussi, par exemple, via Microsoft. « Pour l'instant, nous testons Microsoft 365 Copilot de manière limitée et recueillons les commentaires des utilisateurs afin de comprendre où se situe la valeur pour l'entreprise », ajoute-t-elle. « En même temps, cela signifie aussi que nos employés comprennent ce que l'IA peut apporter aux tâches de leur quotidien. »
Deuxièmement, SKF développe ses propres modèles d'IA dans le cadre de ses activités coeur. Par exemple, au cours des deux dernières années, l'entreprise a travaillé sur le monitoring conditionnel, consistant à vérifier l'état de ses machines en cours de fonctionnement pour savoir quand il faut lancer une opération de maintenance et à s'assurer que les bonnes pièces étaient disponibles pour éviter les interruptions de service. Afin que les employés puissent tester de nouveaux modèles, SKF a mis en place des environnements distincts, dits "bacs à sable", en collaboration avec ses fournisseurs de cloud, afin d'expérimenter en toute sécurité. L'industriel, qui compte plus de 42 000 collaborateurs dans le monde, a également créé une communauté où les employés intéressés peuvent discuter et échanger leurs expériences, ou encore échanger sur des cas d'utilisation similaires.
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La principale usine de SKF en France, à Saint-Cyr-sur-Loire. Le site, qui emploie 1250 personnes environ, produit 60 millions de roulements par an. (Photo : SKF)
Le troisième champ d'exploration concerne la mise en place de stratégies d'IA les plus efficaces pour aller de l'avant. « Sur quoi devrions-nous nous concentrer ? Quels sont les principaux cas d'utilisation à l'échelle mondiale susceptibles d'avoir un impact important ? Nous mettons beaucoup l'accent sur ce point en ce moment », indique la responsable de l'ingénierie numérique et de l'innovation.
Des garde-fous pour l'IA
Maria Stranne et Pedro de Freitas travaillent également en étroite collaboration pour déterminer comment utiliser l'IA au sein de l'entreprise en toute sécurité, et pour définir les garde-fous nécessaires.
« C'est une bonne chose qu'il y ait une telle énergie [autour de la technologie, NDLR], mais nous devons aussi nous assurer de l'efficacité de ces garde-fous, car SKF est une grande entreprise qui doit limiter les risques », explique Maria Stranne. En outre, l'IA est certes un gros consommateur de données, mais elle en génère aussi beaucoup. Il faut donc une bonne infrastructure capable de gérer ces quantités massives d'informations, ajoute le DSI. « Pour nous assurer une bonne compréhension de tout ce que nous avons en production impliquant d'une manière ou d'une autre l'IA, nous avons également créé un conseil de gouvernance de l'IA », dit Maria Stranne.
Les données de la supply chain pour priorité
Mais pour que l'IA crée de réelles différences, encore faut-il des données de haute qualité et un accès à ces données. « Nous sommes loin d'avoir nettoyé toutes nos données, mais nous sommes à mi-chemin de la validation de nos données les plus importantes, indique Pedro de Freitas. En ce qui concerne notre chaîne d'approvisionnement, nous avons presque terminé. » C'est précisément là que le DSI voit le plus grand potentiel pour l'analytique alimenté par l'IA. « Nous y suivons toutes les variables à prendre en compte, depuis l'achat des matériaux jusqu'à la meilleure façon d'expédier nos produits, explique-t-il. Lorsque toutes ces données seront maîtrisées, c'est là que se situe à mes yeux le plus grand potentiel. »
Pour les deux dirigeants IT, ces efforts vont de pair avec le développement des compétences en matière de données au sein de l'entreprise. « Nous devons nous assurer que chacun comprend le type de données qu'il produit et qu'il s'inscrit bien dans les besoins futurs de l'entreprise, explique Maria Stranne. Et ce, à l'échelle de l'ensemble de l'organisation. »
Démocratiser l'analyse de données
Dans son rapport annuel 2023, SKF indique que son ambition de devenir une entreprise data-driven a nécessité des investissements pour produire des informations exploitables tout au long de la chaîne de valeur, à l'aide d'applications analytiques avancées. Aujourd'hui, les employés utilisent Microsoft Power Apps pour optimiser et rationaliser leurs propres flux de travail, et c'est une partie de la démocratisation de la technologie que Maria Stranne appelle de ses voeux. « C'est le coeur de ce que nous voulons faire, et cela recouvre deux aspects, dit-elle. Le premier est la démocratisation pour tous, accompagnée de garde-fous encadrant ce qui peut être fait. En complément, une méthode de contrôle a également été créée, de sorte que lorsqu'une application dépasse un certain nombre de variables et de seuils, elle est considérée comme critique et doit bénéficier d'un traitement spécifique pour assurer son passage à l'échelle. Le second aspect consiste, grâce à cette démocratisation, à mieux utiliser les capacités d'une nouvelle génération qui vit avec la technologie depuis son plus jeune âge ».
Jumeaux numériques pour l'interne et l'externe
Outre l'IA et les applications analytiques de plus en plus poussées, l'utilisation de jumeaux numériques en interne et en externe apparaît également comme une priorité de SKF. « En interne, l'usage est lié à la vérification virtuelle et est utilisé dans notre processus de développement, résume responsable de l'ingénierie numérique et de l'innovation. En externe, il est destiné à nos clients, et nous disposons aujourd'hui de fantastiques possibilités de simulation que nous avons développées au fil des ans. Le potentiel réside dans la capacité à les relier aux données du monde réel pour créer encore plus de valeur. »
La responsable évoque également ce qu'elle appelle l'informatique spatiale, comme la réalité augmentée et la réalité virtuelle, le métavers et la technologie quantique. « Autant de technologies très intéressantes pour nous. Pour les besoins de notre recherche sur les matériaux, nous suivons les ordinateurs quantiques avec beaucoup d'intérêt. »
Article rédigé par
Karin Lindstrom, CIO Sweden (adapté par Reynald Fléchaux)
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