Cinq facteurs clefs qui transforment le rôle de DSI


La transformation numérique est aussi une transformation de la DSI
Des Etats-Unis à l'Afrique en passant par l'Europe, la transformation numérique ne se fait pas sans transformation de la DSI. Il faut repositionner le rôle du CIO et de la DSI. Il faut transformer son fonctionnement. Et ne jamais oublier que les budgets restent limités.
DécouvrirLa révolution digitale, souvent perçue comme une menace pour les organisations, possède en réalité bien d'autres dimensions. Les leaders techniques eux aussi doivent se transformer. Nos collègues de CIO Etats-Unis présentent cinq facteurs clefs qui remodèlent le rôle des DSI, ainsi que les compétences dont ils auront besoin pour s'adapter.
PublicitéQuand les analystes ont commencé à réfléchir aux défis que les DSI affronteraient en 2020, l'incertitude revenait fréquemment. Mais peu d'entre eux avaient imaginé qu'un nouveau coronavirus venu de Chine transformerait les bureaux et les campus en villes fantômes, contraindrait les DSI à muscler leurs systèmes pour permettre le travail à distance d'une majorité d'employés, ainsi qu'à élaborer des plans de continuité plus larges pour un avenir imprévu.
Si répondre à la crise du Covid-19 occupe en ce moment la majorité du temps des DSI, un ensemble d'enjeux globaux de long terme, à la fois économiques et organisationnels, sont en train de bousculer le rôle des DSI et de pousser ces derniers à développer leurs connaissances et leurs capacités.
« Le métier de DSI devient vraiment difficile », constate Irving Tyler, analyste et vice-président chez Gartner. En plus d'assurer leurs missions principales, les DSI d'aujourd'hui doivent être en mesure de comprendre la conception de solutions digitales, d'appliquer des disciplines de gestion de produit à la gestion IT, d'aider à changer la culture de leur entreprise et de penser aux implications des lois sur la vie privée partout dans le monde. « Tous ces sujets représentent des enjeux majeurs, compliqués et complexes, auxquels les DSI n'avaient jamais eu besoin de réfléchir auparavant », souligne Irving Tyler.
Analystes, chercheurs et DSI passent en revue les principaux facteurs qui transforment le rôle des DSI et les compétences qui leur seront nécessaires pour s'adapter.
1. La vitesse du marché qui change
Au-delà de la réponse à la pandémie, les organisations qui réussissent possèdent une grande capacité d'adaptation et peuvent sans cesse et de façon proactive repenser les concepts et les propositions de valeur au coeur de leurs activités, de façon à pivoter rapidement.
« Pour bien des DSI, le défi est de trouver comment utiliser la technologie pour créer une organisation capable de s'adapter et suffisamment flexible pour évoluer avec le marché », indique Brian Hopkins, vice-président et principal analyste chez Forrester, chargé des relations avec les DSI et les leaders techniques. « Pensez à Amazon : vous devez vous positionner soit comme le constructeur d'un écosystème, soit comme un participant à de multiples écosystèmes », ajoute-t-il.
Pour Brian Hopkins, la capacité à s'adapter demande également de construire, d'expérimenter et de faire fonctionner de multiples modèles économiques. Pour les DSI, « demandez-vous comment aider votre DAF à configurer les systèmes comptables et financiers, afin d'être flexible dans la manière de comptabiliser les revenus et d'opérer plusieurs modèles économiques. »
Publicité« Un point central est de bien séparer vos services RH et vos services IT centraux - de façon à pouvoir les adapter et les combiner pour différents besoins et différentes entités, utilisant des modèles économiques différents », poursuit Brian Hopkins. Selon lui, il existe également une manière de gérer les piles technologiques avec souplesse. « Il s'agit pour l'essentiel de privilégier les plates-formes et d'exploiter le Cloud et les technologies exponentielles comme l'IA, en utilisant la technologie pour introduire des innovations de rupture. »
Si le DSI n'est pas le seul à devoir prendre des décisions concernant la capacité d'adaptation de l'entreprise, « celles-ci lui offrent une opportunité de sortir de ses responsabilités classiques et de développer une vision avec le PDG », estime Brian Hopkins. « Ainsi, le rôle du DSI s'apparente plus que jamais à celui d'un consultant. »
2. Les bouleversements géopolitiques
Les changements géopolitiques se répercutent sur Internet, ce qui a des conséquences majeures sur le métier des DSI, selon Irving Tyler. « Nous étions habitués à raisonner dans une perspective universelle. Nous voulions que tout le monde dispose des mêmes systèmes, les utilise de la même façon et nous souhaitions que l'information circule sans limites. Maintenant, nous nous retrouvons avec une segmentation des sociétés digitales - l'Internet américain versus l'Internet européen versus l'Internet russe - et nous devons également composer avec des connotations politiques, religieuses ou des systèmes de valeur différents. » Tout ceci conduit à l'émergence de nouvelles lois et régulations, du Consumer Privacy Act californien au RGPD (règlement européen sur la protection des données).
« Pour les DSI, cela va représenter un défi important », affirme Irving Tyler. « Ils vont devoir déterminer comment fédérer leurs réseaux globaux ». Pour cela, les DSI doivent endosser un rôle d'analyste. « Là où les DSI peuvent apporter le plus de valeur, c'est sur la compréhension des dimensions technologiques, au-delà de la compréhension de la technologie en elle-même ». Concrètement, il s'agit selon l'analyste de voir comment ces technologies sont appliquées, comment elles affectent les systèmes de valeur des différentes sociétés, de quelles façons elles peuvent représenter un danger pour ces systèmes de valeur et quels sont les éléments déclencheurs qui peuvent conduire ces sociétés à mettre en place de nouvelles lois et restrictions en réponse.
« C'est une responsabilité nouvelle pour les DSI, car ils ne peuvent pas simplement fournir la technologie aux décideurs métiers et les laisser se charger de son application sans en saisir les conséquences », ajoute Irving Tyler. « A terme, ce sont en effet les DSI qui devront changer les systèmes pour faire face aux conséquences. »
3. De nouveaux modèles opérationnels dans les entreprises
Bon nombre d'organisations ont créé de nouveaux modèles économiques liés au digital, mais la plupart ne sont pas prêtes à les faire fonctionner, observe Irving Tyler. Les structures de pilotage, de management, les pratiques de travail et les processus de prise de décision restent largement basés sur les modèles économiques traditionnels. « Maintenant, les gens doivent travailler ensemble de façon différente. « Différents modes d'organisation en équipe, une vitesse de travail différente et des exigences d'agilité émergent », complète-t-il.
« Malgré cette pression pour aller vite, il n'est pas possible d'y parvenir si tout le monde n'avance pas rapidement dans la même direction », lance Troy DuMoulin, vice-président de la recherche et du développement de Pink Elephant, un cabinet de conseil IT et d'accompagnement au changement. « Le rôle d'un DSI leader est de créer un sentiment d'identité partagé - un 'nous', des valeurs, une direction commune, en montrant la manière de faire et ce qui est le plus important pour cette communauté. »
Le DSI doit participer à la conception et à l'exécution des modèles opérationnels qui permettront de faire fonctionner l'entreprise de façon efficace, et favoriser les changements dans les pratiques, la prise de décision et la culture, selon Irving Tyler. « La technologie jouera un rôle majeur dans la manière de réaliser tout cela. »
4. Des écosystèmes partagés qui créent de la valeur
Dans le futur, la valeur sera créée et répartie de façon très différente à cause des écosystèmes et des technologies qui les alimentent.
« Dans la plupart des modèles économiques traditionnels, les entreprises étaient très orientées sur elles-mêmes - mes produits, mes clients, mes fournisseurs. Aujourd'hui il faut prendre conscience que nous devons nous connecter aux produits et aux services d'autres acteurs, et coexister au sein d'un écosystème pour mieux réussir », observe Irving Tyler. Cela signifie souvent qu'il faut abandonner des paradigmes tels que la recette secrète d'un produit, car la partager avec des partenaires peut permettre de trouver 100 nouvelles façons d'utiliser ce produit qui bénéficient à chaque organisation. Cela peut aussi impliquer de s'éloigner des approches traditionnelles de mise sur le marché pour explorer de nouveaux canaux numériques.
« Tout le concept de la création et de la distribution de valeur est en train de changer, et l'approche traditionnelle est risquée », ajoute Irving Tyler. « Ce changement d'état d'esprit représente l'un des plus gros défis pour tous les décideurs, pour les DSI en particulier. » Ceux-ci auront besoin de compétences en stratégie, en gestion du risque, ainsi que d'une capacité à évaluer le rapport risques/bénéfices.
5. Des rôles exécutifs qui se recombinent
Aujourd'hui, la stratégie des entreprises repose sur la technologie, « mais dans les organisations traditionnelles, il existe de nombreux rôles adverses, qui ne parviennent pas à se comprendre et ont des attentes divergentes », déplore le Dr Abel Sanchez, directeur exécutif et chercheur au laboratoire Fabrication et Productivité du MIT. C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles les organisations combinent les rôles liés à l'IT, au digital et aux données, laissent la DSI à part ou expérimentent pour savoir qui reporte à qui.
Claus Torp Jensen assume les rôles de directeur du digital et directeur de la technologie (une fonction qui recouvre celle de directeur technique et de directeur des systèmes d'information) au centre de lutte contre le cancer Memorial Sloan Kettering à New York. « La fonction IT est face à un tournant majeur, et les entreprises pionnières intègrent des éléments issus des rôles classiques de directeur du digital, DSI, directeurs techniques, architectes en chef, directeur des données et directeurs de l'innovation dans une nouvelle génération de leaders techniques », écrit-il.
D'autres firmes ont des rôles séparés avec un DSI, un directeur du digital, un directeur clients et d'autres fonctions, et « elles commencent à les mélanger et à les recombiner en jouant avec la hiérarchie pour déterminer qui doit reporter à qui », décrit Brian Hopkins. « D'autres encore prennent les DSI et élèvent leur fonction au sein du comité exécutif à celle de directeur technique/directeur des opérations. »
Irving Tyler conseille aux DSI de se préparer à la transformation de leurs rôles en étant ouverts au changement et en consacrant du temps à se former. « Si vous voulez avoir de la valeur en tant que cadre dirigeant, vous feriez bien de passer beaucoup de temps à apprendre, à poser des questions et à parler à des experts en dehors de votre domaine », suggère-t-il.
Article de Stacy Collett / CIO Etats-Unis (Adaptation et traduction par Aurélie Chandèze)
Article rédigé par

La rédaction de CIO Etats-Unis,
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