Stratégie

Chez H&M, IT et métiers travaillent dans un modèle cousu main

Chez H&M, IT et métiers travaillent dans un modèle cousu main
Le magasin H&M de Soho (New-York), ouvert en début d’année. Des miroirs intelligents dans les cabines d'essayage identifient les produits des clients, et leur proposent des recommandations personnalisées. (Photo : H&M)

Après une cure d'austérité, la DSI de la chaîne de vêtements s'est réorganisée en mode produits, autour de grandes plateformes structurant son activité. Sa DSI et responsable du digital détaille le modèle qui lui permet de rapprocher la tech des métiers.

PublicitéIl y a un peu plus d'un an, le département IT de H&M a été fortement impacté par des restrictions budgétaires. À l'origine, il était question de réduire les effectifs de 3 500 à 1 500 personnes. En fin de compte, la coupe claire n'a pas été aussi sévère. « Le programme de réduction des coûts nous a frappés, et cela s'appliquait à la fois aux employés et aux consultants », indiquen toutefois la CDIO (Chief digital et IT officer), Ellen Svanström. « Nous avons dû faire des coupes », ajoute-t-elle.

Mais avoir traversé cette tempête a permis aussi à la DSI de se repenser et à redéfinir son rôle au sein du groupe d'origine suédoise, qui emploie 143 000 personnes dans le monde et a réalisé un chiffre d'affaires d'environ 21 Md€ sur sa dernière année fiscale. « Nous avons intégré la technologie dans notre entreprise selon un modèle passionnant, ce qui demande beaucoup de travail, de concentration et de force. Nous sommes actuellement sur une courbe de développement très stimulante. » Après avoir travaillé dans une organisation informatique traditionnelle jusqu'en 2019, H&M est passée à l'agilité. Le développement métier et technique est intégré dans ce type d'équipes. Mais, selon la dirigeante, cette approche est rapidement devenue trop complexe. « Il s'est avéré plus difficile à gérer que prévu, car le paysage technologique n'était pas aussi agile que la structure organisationnelle, explique Ellen Svanström. Nous sommes donc entrés dans la phase suivante, où nous nous trouvons actuellement. »

Matrice des chaînes de valeur

Après avoir évalué les besoins, le modèle est devenu hybride, avec des équipes produits agiles structurées autour de grandes plateformes. Les capacités de l'entreprise ont été cartographiées et des chaînes de valeur ont été créés pour former une matrice mêlant métiers et technologie, chacun ayant des compétences et des structures de livraison différentes. « En vertical, vous visualisez les chaînes de valeur provenant des métiers, et en horizontal, les réalisations IT et tech, décrit la CDIO. De cette manière, la feuille de route numérique est réellement partagée entre métiers et IT. »

La structure correspond aux livrables de la plateforme dédiée à la gestion back-office et aux plateformes en ligne et en magasin. Et elle est elle-même organisée en équipe plateforme. Tout comme l'est l'équipe data et IA. « Nous n'en sommes qu'au début de notre transformation, mais nous en voyons déjà clairement les résultats. C'est ma première priorité et, bien que cela ait été difficile, je sens l'engagement et la motivation de chacun, car les avantages commencent à être clairs », assure Ellen Svanström.

L'omnichannel en point de mire

La nouvelle organisation doit supporter l'omnicanal, la priorité du groupe en termes commercial. L'introduction d'outils numériques dans les magasins, à la fois ceux auxquels les clients ont accès et ceux destinés au personnel, devrait permettre d'améliorer sensiblement l'expérience des clients. Ellen Svanström explique que H&M a mis au point un concept digital efficace et désormais utilisé dans deux magasins, l'un à Soho, à New York, et l'autre à Chelsea, à Londres. Le personnel peut notamment servir les clients plus facilement, trouver des produits qui pourraient être en stock dans un magasin voisin ou en ligne et obtenir de meilleures recommandations. Cela signifie également que le magasin lui-même n'a pas besoin d'accroître ses stocks pour améliorer la satisfaction des clients. « Nous sommes très fiers de cette approche 'digiphysique', qui nous permet de nous différencier », indique la CDIO.

PublicitéDans le même temps, le commerce électronique s'oriente de plus en plus vers la fast fashion, une évolution impulsée par le Chinois Shein. Cette tendance se traduit par une forte pression sur les médias sociaux afin d'évaluer l'intérêt pour différents vêtements, qui sont ensuite fabriqués et vendus à des prix extrêmement bas. « On a reproché à cette tendance de favoriser la surconsommation, mais même s'il y a des aspects intéressants dans ce mode de fonctionnement, ce n'est pas une voie durable pour H&M », assure Ellen Svanström.


Ellen Svanström, CDIO de H&M : « Nous n'en sommes qu'au début de notre transformation, mais nous en voyons déjà clairement les résultats ». (Photo : H&M)

« Nous avons suivi cette évolution, ajoute-t-elle. Mais nous constatons que ce qui nous est propre, ce n'est pas de travailler avec des vêtements uniques. Nous croyons en des gammes, pour créer une expérience holistique pour les clients où nous offrons la meilleure combinaison entre la mode, la qualité, le prix et la durabilité. Cela nécessite des processus de création et de planification. Il s'agit ensuite d'optimiser la production afin d'éviter la surproduction. C'est très important car nous avons pour objectif de réduire de moitié notre empreinte carbone d'ici 2030. »

IA : le besoin d'une donnée produits exhaustive

Pour garantir le succès de cette approche, une analyse pointue du marché et un contrôle strict de la production sont indispensables. Deux terrains où l'IA s'avère prometteuse. H&M s'est penché sur l'usage de la technologie relativement tôt ; c'est vers 2018 que l'entreprise a commencé à l'utiliser pour optimiser ses flux de produits. « Nous en avons développé une grande partie nous-mêmes et, il y a deux ans, nous avons investi pour devenir plus modulaires et être davantage capables de passer à l'échelle, explique Elle Svanström. Cela signifie également que nous sommes moins dépendants de nos propres développements et que nous pouvons acheter des produits sur le marché. »

Pour utiliser efficacement l'IA, les produits que vend la marque doivent être connectés et dotés d'autant d'attributs que possible. Et lorsqu'un produit est numérisé, il est possible de le suivre tout au long de la chaîne de valeur, de lire et de comprendre où il est produit, où il se trouve, etc. Le tout en temps réel, un facteur essentiel pour créer de nouvelles opportunités en magasins.

De son côté, l'IA générative fait désormais partie intégrante du service d'assistance interne de H&M, et des avancées sont également réalisées avec la technologie dans la manière dont les clients interagissent avec la marque. « Les résultats sont excellents, assure la CDIO. Nous nous penchons à présent sur l'assistance au développement applicatif et sur des moyens innovants d'utiliser l'IA générative dans le cadre du développement de nos produits et de notre marketing. Mais il s'agit là de démarches plus exploratoires. »

Equilibrer développements maison et partenariats

L'intérêt pour la technologie au sein de l'organisation a également conduit à la formation de forums autour de l'IA générative, car il est important de mettre en place des règles et des structures claires pour limiter les risques auxquels l'entreprise s'expose. « Nous avons également beaucoup investi dans la cybersécurité au cours des deux dernières années et nous avons atteint un niveau que nous jugeons satisfaisant, explique la CDIO. Même si, sur ce terrain, il faut continuer à investir en permanence. »

Si le département technologique de H&M met en avant son programme de développements internes, sa dirigeante insiste également sur le rôle des partenaires externes et des écosystèmes. « Les collaborations innovantes débouchent sur des avantages concurrentiels, explique-t-elle. Il peut s'agir aussi bien de grands acteurs établis que de petites entreprises innovantes. Et cet aspect est crucial pour rattraper notre retard en matière de développement technologique. Nous devons déterminer les domaines dans lesquels nous devons développer par nous-mêmes et ceux dans lesquels nous ne devons pas le faire, mais plutôt apprendre à innover avec les autres. C'est cette culture que je jeux diffuser en interne ».

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