Stratégie

Budget de l'Etat : la Cour des comptes alerte sur le sous-investissement IT à la DGFiP

Budget de l'Etat : la Cour des comptes alerte sur le sous-investissement IT à la DGFiP
Pour la Cour des comptes, l’obsolescence des systèmes d’information de Bercy explique certaines incertitudes pesant sur les comptes d’Etat, par exemple dans le domaine fiscal. (Photo : Loukian/Unsplash)

La juridiction financière publie un référé adressé au ministre du Budget démissionnaire, dans lequel elle souligne la persistance de ses réserves sur les comptes de l'Etat. Une situation qui résulte, notamment, de la faible modernisation des SI de Bercy.

PublicitéAvec un certain sens du timing, alors que la commission des Finances de l'Assemblée nationale enquête sur le dérapage des comptes publics, la Cour des comptes publie le référé que son président, Pierre Moscovici, a adressé, le 1er octobre 2024 dernier, à Laurent Saint-Martin, alors ministre du Budget et des comptes publics. Cette lettre, qui s'inscrit dans le cadre de l'article 58 de la LOLF sur la certification de la régularité et de la fidélité des comptes de l'Etat et la mission d'assistance du Parlement confiée à la Cour des comptes - sujet éminemment inflammable dans le contexte actuel -, pointe la persistance des anomalies et incertitudes entourant les comptes de l'Etat.

Le premier audit des comptes de l'Etat publiés selon les principes de la LOLF, en 2006, s'était attiré treize réserves de la part de la Cour des comptes, réserves qualifiées de substantielles, « c'est-à-dire constituées elles-mêmes de plusieurs constats significatifs », rappelle Pierre Moscovici. Même si ce dernier souligne les progrès accomplis, il n'en relève pas moins que l'audit des comptes de 2023 s'accompagne de 5 anomalies significatives et de 11 incertitudes. « A l'issue de l'audit des comptes de l'État pour 2023, la Cour a constaté [...] que ceux-ci restaient affectés par des anomalies comptables pour des montants très significatifs (5 au total, pour plusieurs dizaines de milliards d'euros), ainsi que par des incertitudes, c'est-à-dire des situations où il n'est pas possible de confirmer ou d'infirmer la régularité, la sincérité ou la fidélité des chiffres figurant dans les états financiers. »

La DGFiP handicapée par le sous-investissement dans ses SI

Autrement dit, certaines des réserves soulevées par la Cour des comptes il y a près de 20 ans n'ont pas été entièrement levées et des difficultés nouvelles sont apparues (comme l'absence de chiffrage de l'engagement pris au titre du plan de relance européen ou le flou entourant la comptabilisation des garanties des emprunts de Bpifrance). « L'État ne semble pas aujourd'hui sur une trajectoire qui lui permettrait de publier, d'ici quelques années, des comptes 'sans réserve' », tranche le président de la Cour des comptes.

Pour autant, ce dernier accorde quelques circonstances atténuantes à la Direction générale des finances publiques (DGFiP). Notamment en raison des sous-investissements chroniques dans les systèmes d'information que cette direction subit. Pierre Moscovici estime que cette direction devrait disposer « des ressources budgétaires suffisantes pour moderniser certains systèmes d'information dont l'obsolescence est en partie responsable d'incertitudes, par exemple dans le domaine fiscal ». Pour le président de la Cour des comptes, dès le premier exercice de certification des comptes (2006 donc), il était évident « que des points de réserve comme l'évaluation du parc immobilier et du réseau routier, le recensement des stocks militaires ou les systèmes d'information des produits régaliens relevaient de plans d'action pluriannuels. » Or, selon lui, ces plans, quand ils existent, sont très insuffisants et laissés à la seule appréciation des ministères, sans coordination d'ensemble.

PublicitéUn référé resté sans réponse

Pour 'Mosco', ces efforts sont d'autant plus nécessaires que les délais de préparation des états financiers s'imposant à cette administration sont « devenus extrêmement contraints ». Une façon d'attirer, en creux, l'attention sur la responsabilité des politiques qui, à la tête de Bercy, ne n'ont pas accordé à l'administration les moyens nécessaires pour moderniser ses pratiques, entraînant la persistance des réserves des Sages de la rue Cambon sur les comptes de l'Etat. Et, partant, un certain manque de transparence sur ces derniers.

La missive de Pierre Moscovici n'a pas reçu de réponse à date, la Cour des comptes ne publiant que la seule lettre de son président. Et ce, alors que Laurent Saint-Martin, ministre du Budget aujourd'hui démissionnaire, disposait, selon le code des juridictions financières, d'un délai de deux mois pour faire connaître sa réponse au référé de la juridiction financière.

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