Bien préparer la négociation d'un contrat de développement d'application mobile
Sous-traiter la conception d'une application mobile suppose de prendre certaines précautions spécifiques lors de la rédaction du contrat.
PublicitéPour tirer pleinement parti des avantages liés à la mobilité informatique, de plus en plus d'entreprises mettent à disposition de leurs salariés, généralement en parallèle d'une politique de Bring Your Own Device, une application mobile spécifique permettant de réaliser à distance certaines tâches professionnelles (messagerie, calendrier, saisie des temps, accès à une base de données, navigation sur internet...) sur différents types d'appareils électroniques mobiles connectés ou non à internet.
Si le développement d'une telle application peut être réalisé par l'entreprise elle-même, il est souvent plus simple de confier à un prestataire externe la conception, le développement et/ou la mise en ligne de l'application mobile. Dans ce cas, la conclusion d'un contrat est fortement recommandée afin de fixer par avance et par écrit les droits et les devoirs de chacun. À côté des clauses propres aux contrats commerciaux (objet, durée, résiliation, responsabilité, sous-traitance, droit applicable, juridiction compétente...) et aux contrats de développement logiciel (propriété intellectuelle, garanties, échéancier de paiement, réception, gouvernance...), certains aspects opérationnels spécifiques devront également être pris en compte.
Définir avec précision l'application mobile attendue
Même si le cahier des charges rédigé par le client (souvent bien avant le démarrage du projet) n'est généralement pas le seul document de référence, il s'agit néanmoins d'un document structurant qui fixera les contours initiaux du projet. Ainsi, il est recommandé d'inclure dans le cahier des charges des prérequis techniques et juridiques suffisamment précis pour avoir force obligatoire une fois annexés au contrat signé avec le prestataire sélectionné sur cette base. D'un point de vue opérationnel, le cahier de charges doit donc définir le plus précisément possible les fonctionnalités attendues, le type d'appareil auquel est destinée l'application mobile (systèmes d'exploitation, marques, versions), le niveau de sécurité attendu (notamment au regard de la loi du 6 janvier 1978 sur la protection des données à caractère personnel) et le calendrier prévisionnel.
En outre, une phase de conception préalable est souvent nécessaire pour connaître avec précision la réalité de l'application mobile envisagée, en termes fonctionnels mais aussi graphiques et ergonomiques. En pratique, le prestataire réalisera une maquette (ou storyboard) présentant notamment la charte graphique de chaque écran visualisable par l'utilisateur, les principes de navigation ainsi que les spécifications fonctionnelles détaillées de l'application mobile. Véritable point d'étape, l'acceptation du storyboard par le client donne généralement le coup d'envoi du développement de l'application mobile. Aussi le storyboard, document de référence annexé au contrat, doit-il être envisagé comme un livrable et faire l'objet d'une procédure d'acceptation précise (caractère contradictoire, délais, dates, temps de correction...) permettant au client d'exprimer des réserves dont la correction par le prestataire conditionnera l'acceptation définitive du storyboard et le démarrage du développement de l'application mobile.
PublicitéÉvaluer la conformité de l'application mobile
Par rapport aux autres contrats de développement logiciel, le contrat de développement d'application mobile ne présente pas de spécificité majeure au stade de la réalisation des développements proprement dit. Ainsi, la définition du prix (forfaitaire ou en fonction du temps passé), du calendrier (dates impératives, délais, pénalités éventuelles), et des livrables (le storyboard, les différentes versions de l'application mobile, les documents de recette ...) mériteront évidemment une attention particulière.
Une fois développée, l'application mobile devra faire l'objet d'une procédure de recette permettant de contrôler sa conformité aux besoins du client et, le cas échéant, de procéder aux corrections nécessaires.
En plus des principes classiques de recette (caractère contradictoire, suivi documentaire, interdiction de la mise en production sans recette, correction des anomalies par le prestataire...), la vérification de la conformité d'une application mobile suppose aussi de s'assurer concrètement de son bon fonctionnement. À ce titre, il est donc fortement recommandé d'envisager le déploiement de l'application mobile sur un nombre significatif d'utilisateurs pendant plusieurs mois afin de procéder à des tests en condition réelle d'exploitation.
En outre, le bon fonctionnement de l'application mobile devra aussi être vérifié au niveau de la plateforme de distribution en ligne de chaque fabriquant de smartphone auquel se rattache l'application. Il s'agira notamment de vérifier que l'application mobile est réellement mise à disposition du public sur chaque plateforme conformément aux règles de référencements et aux mots-clés convenus.
L'étape de la recette est donc cruciale pour chacune des parties : la signature d'un procès-verbal de recette sans réserves constatera la bonne exécution des obligations du prestataire, l'exigibilité des sommes correspondantes, et transfèrera au client la propriété de l'application mobile (sauf clause contraire).
Anticiper la vie de l'application mobile
Anticiper la vie de l'application mobile
Compte tenu du caractère évolutif des usages informatiques et des contraintes des entreprises, le développement d'une application mobile ne doit surtout pas être envisagé de manière statique, mais au contraire s'inscrire dans un cadre juridique suffisamment souple pour prendre en compte toutes évolutions futures.
D'une part, l'infrastructure back-office devra être capable de s'adapter aux variations (à la hausse comme à la baisse) du nombre d'utilisateurs de l'application mobile, et permettre la fourniture régulière des divers contenus tiers au sein de l'application mobile (réseaux sociaux, plateformes de partage de photos ou de vidéos, notifications push).
D'autre part, les parties veilleront à insérer dans le contrat une clause de cession expresse des droits de propriété intellectuelle afin de donner au client le droit d'exploiter en toute liberté l'application mobile. Rappelons qu'en l'absence d'une telle clause, l'intégralité des droits restera détenue par le prestataire qui devra donner son autorisation préalable avant toute utilisation de l'application mobile, et ce malgré le paiement du prix des prestations par le client. Pour plus de souplesse, la cession des droits de propriété intellectuelle pourra aussi être accompagnée d'une clause de remise des codes sources afin de renforcer la maîtrise du client sur son application mobile.
Enfin, les questions relatives à la maintenance devront également être envisagées le plus tôt possible afin de ne pas freiner l'exploitation de l'application mobile. En effet, il est souvent opportun de sélectionner le prestataire en charge de la maintenance corrective et de la maintenance évolutive dès le stade du développement de l'application mobile afin d'assurer une exploitation continue de l'application mobile tout en limitant les périodes de transitions.
Article rédigé par
Jean-Baptiste Belin, Avocat au cabinet Staub & Associés
Ancien juriste d'entreprise dans une société de services informatiques, Jean-Baptiste Belin est avocat au Barreau de Paris. Membre du cabinet Staub et Associés, cabinet de niche en droit des nouvelles technologies, son activité concerne principalement la négociation et le suivi des contrats informatiques, le droit des données à caractère personnel et la communication sur internet. Jean-Baptiste Belin intervient auprès de sociétés de tous secteurs, en conseil comme en contentieux et aussi bien côté client que côté fournisseur.
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