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Anthony Hié (ESCP Europe) : « Le campus du futur n'est pas 100% numérique mais phygital »

Anthony Hié (ESCP Europe) : « Le campus du futur n'est pas 100% numérique mais phygital »
Anthony Hié a quitté l’Institut Catholique de Paris pour rejoindre ESCP Europe il y a un peu moins d’un an.
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°171 !
IT et Business : le mariage inévitable

IT et Business : le mariage inévitable

A force de parler de la place de l'IT dans l'entreprise, on en oublierait presque que, aujourd'hui, l'IT est consubstantielle aux process d'entreprises. L'IT nourrit le process et vice-versa. Les entreprises qui témoignent ici démontrent cette réalité : le business et l'IT n'y sont plus qu'un.

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Ancien DSIN de l'ICP (Institut Catholique de Paris), Anthony Hié a rejoint il y a un an ESCP Europe (anciennement Ecole Supérieure de Commerce de Paris, la principale école de commerce de la CCI Paris-Ile-de-France) en tant que Chief Information & Digital Officer pour y mener une transformation phygitale, associant physique et digital comme dans la distribution. L'existence même d'un tel plan de transformation n'est pas très fréquente dans les grandes écoles.

PublicitéCIO : Pour commencer, pouvez-vous nous présenter ESCP Europe ?

Anthony Hié : L'école comprend six campus. Paris, bien sûr, est le premier, avec deux sites : le site historique de République où se déroulent désormais les formations initiales comme le Master International de Management, aussi appelé Programme Grande Ecole. Celui-ci est le quatrième au monde dans sa spécialité selon le dernier classement de The Economist, derrière HEC, l'Université de Saint-Gallen (Suisse) et Skema Business School. Le deuxième site parisien est constitué des anciens locaux de Novencia, à Montparnasse, où se déroulent les formations continues. Les autres campus sont situés à Londres, Berlin, Madrid, Turin et Varsovie.
Nous accueillons 6000 étudiants en formation initiale et 5000 en Executive Education [formation continue, NDLR]. Nous comptons pour cela sur 200 collaborateurs administratifs, 250 enseignants permanents et 700 vacataires.
Nous sommes toujours rattachés à la Chambre de Commerce et d'Industrie Paris-Ile-de-France. D'ici l'année prochaine, les subventions de la CCI vont disparaître. Nous avons donc de forts enjeux de développement, du point de vue marque comme en nombre d'étudiants. Le numérique va bien sûr y contribuer via le développement du digital learning. Ma mission étant de Proposer une expérience utilisateur visionnaire, cohérente et unifiée aux candidats et étudiants, et répondre au défi du numérique, contribuer à l'élaboration et la mise en oeuvre de la stratégie de transformation digitale incluant l'innovation technologique (edtech) et organisationnelle.

CIO : Et la DSI de ESCP Europe ?

Anthony Hié :  C'est actuellement une Direction des SI et de la Transformation Numérique mais historiquement, il n'y avait pas de DSI mais plutôt un service informatique. Notre Legacy est encore important, avec beaucoup de développement spécifique. L'hébergement de nos applications (hors cloud) et une partie du support repose actuellement sur une convention de service avec la CCI via un Centre de Service Partagé.
Nous utilisons l'ERP dédié à l'enseignement supérieur Aurion de Auriga et un intranet développé sur une base de Liferay. Les sites parisiens utilisent l'ENT Blackboard mais, faute de vraie DSI centralisée jusqu'à présent, les sites situés à l'étranger peuvent également utiliser Moodle et Canevas. Côté bureautique et messagerie, nous avons choisi la Gsuite Education.
Comme il n'y avait pas de référentiel technologique, et que l'équipe était très restreinte (moins de dix personnes), les bases de données étaient très variées et notre site web sous Drupal n'était pas mis à jour.
Nous menons de nombreux recrutements et nous sommes désormais 19, auxquels s'ajoutent les 5 ETP de l'équipe audiovisuelle qui vient de rejoindre la DSITN.

PublicitéCIO : Jusqu'à présent, en quelle mesure l'enseignement bénéficiait du numérique ?

Anthony Hié : Nous avons développé une série de MOOC en recourant à de la sous-traitance technique. Les cours sont filmés et disponibles sur les ENT. Quelques enseignements sont réalisés avec support en vidéo-conférence via WebEx ou BlueJeans pour les diffuser sur plusieurs amphithéâtres et sites. Nous avons aussi un programme de digital learning en Executive Education [Formation continue, NDLR]. Par exemple, nous proposons un Executive Master in International Business de 18 cours en 3 langues. En partenariat avec NetExplo, nous proposons également un parcours Digital Transformation Facilitator, huit cours-modules sur la transformation digitale des organisations.
Un des objectifs en terme de blended learning est d'atteindre un tiers de digital mais le présentiel est toujours bien présent.

CIO : Précisément, quelle transformation voulez-vous mener et pourquoi ?

Anthony Hié : Nous avons un plan de transformation phygitale baptisé So'School. Ce plan est transverse et multicampus, associant les lieux physiques (les campus) et le digital ubiquitaire. Notre ambition est d'offrir aux étudiants une expérience unique phygitale, de bout en bout. Le terme est habituellement utilisé pour la distribution mais peut également s'employer dans notre contexte.
Notre conviction est que le campus du futur n'est pas 100 % numérique mais phygital, en gommant la limite entre digital et physique.
Nous avons 4 axes et 40 projets dans notre plan de transformation, en matière d'expérience utilisateur, de culture numérique, de nouvelles pédagogies et de fiabilité technologique. Comme 99 % des 18-24 ans disposent d'un smartphone, nos projets sont tous mobile first. Et nous adoptons un mode omnicanal, avec le digital workplace en point d'entrée unique pour tout le parcours étudiant, dès l'inscription.
Nous avons cherché à mettre en place une co-construction pour chaque projet entre le digital leader, le business leader (le métier concerné), le(s) digital champion(s) (les porteurs de la culture digitale, sélectionnés par questionnaires) et les Key Users (experts sur le sujet). Cette co-construction passe notamment par des ateliers.
Notre plan de transformation porte sur quatre ans et a été conçu avec la méthode MAREVA. So'School représente un investissement total de 3,7 millions d'euros.

CIO : Pouvez-vous donner quelques exemples ?

Anthony Hié : Nous allons, avant Noël 2019, créer une Phygital Factory pour développer une culture numérique chez les étudiants comme chez les enseignants. Un vidéomathon permettra ainsi aux enseignants d'enregistrer des microcours (microlearning) en vidéo rapidement disponibles. Nous comptons surtout, ensuite, sur un mouvement lié à un effet d'entraînement.
Nous avons prévu de déployer des balises Beacon, pour améliorer le parcours indoor digital des étudiants, associant le Bluetooth Low Energie et le NFC. Ces balises délivrent un réseau de proche en proche sans avoir à être alimentées mais disposent d'une durée de vie de vingt ans. Ces balises vont contribuer à améliorer l'expérience étudiant.
Bien entendu, nous allons mettre en oeuvre de la pédagogie augmentée pour l'enseignement. Par exemple, le module de social learning de Jalios 1Day1Learn va être déployé. Cela passe aussi par des nouvelles technologies d'Adaptative Learning pour la smart education, c'est à dire la personnalisation du parcours de l'étudiant. Les neurosciences permettent de développer de nouvelles technologies et méthodes afin d'améliorer la réussite aux examens.
Nous développons aussi une visite en réalité virtuelle des campus pour les futurs étudiants.
Un autre de nos objectifs est de développer la collaboration pour les administratifs.

CIO : Vous avez récemment annoncé proposer une certification des diplômes via blockchain. En quoi consiste ce projet ?

Anthony Hié : Pour être exact, ce n'est pas le diplôme seulement (un document non-structuré type PDF) mais bien l'ensemble des informations du diplôme (nom, prénom, type du diplôme, etc.) même si, visuellement, le diplôme est reconstruit dans l'application à la demande. Les informations sont stockées dans une blockchain Ethereum, hébergée sur Azure par BCDiploma.
On génère un lien vers un affichage web de l'information avec la capacité de vérifier la validité du diplôme. Ce lien peut être présenté sous forme de QR code intégrable à un CV. ESCP Europe est la première école à le mettre en production mais d'autres sont intéressées. L'objectif est évidemment de proposer une capacité à prouver la véracité de son diplôme sans que le recruteur ait à appeler l'école.
Dans l'ordre, il y aura tout d'abord la cérémonie de remise du diplôme. Puis on enverra à l'étudiant fraîchement diplômé le diplôme numérique te le flashcode. Nous mettrons également à disposition un outil de micro-learning pour apprendre à utiliser l'outil.

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