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Gilles de Richemond (V-SNCF) : « nous virtualisons tout sauf le business »

Gilles de Richemond (V-SNCF) : « nous virtualisons tout sauf le business »
De gauche à droite : Christophe Caron (responsable exploitation), Philippe Martin (directeur technique) et Gilles de Richemond (Directeur général, Voyages-SNCF Technologies).
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°105 !
La révolution numérique bouscule les entreprises

La révolution numérique bouscule les entreprises

La révolution numérique est devenue une antienne, un mantra, un leitmotiv, une rengaine... Il n'en demeure pas moins qu'elle est une réalité incontournable qui se décline autant sur des thématiques techniques, organisationnelles, stratégiques et humaines. En voici quelques exemples.Tout d'abord,...

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Grâce aux technologies Openstack, Voyages-SNCF Technologies a créé un cloud hybride avec débord chez un prestataire en toute transparence. Agilité et industrialisation sont associées dans le cadre d'une stratégie de SDDC.

Publicité« Notre objectif est le Software Defined Datacenter (SDDC) » indique Gilles de Richemond, directeur général de Voyages-SNCF Technologies (VSCT) et directeur technique de Voyages-SNCF. VSCT est une filiale technologique du groupe SNCF en charge de tous les développements digitaux, en particulier ceux en lien avec l'agence de voyage du groupe, Voyages-SNCF. Elle est donc plutôt en avance de phase sur les emplois de technologies mais utilise les locaux des datacenters de la SNCF.
Désormais, pour compenser les pics de charge comme l'ouverture des ventes d'hiver le 15 octobre avec des pointes de près de 50 billets commandés à la seconde, Voyages-SNCF est capable de déborder des datacenters internes pour occuper de la ressource chez un prestataire. En l'occurrence, le datacenter de Lille est relié au datacenter d'OVH par une liaison dédiée de 10 Go/s. Ce débord, inauguré en production pour le lancement des ventes d'hiver, est réalisé de façon transparente pour tous les utilisateurs des systèmes grâce aux technologies Openstack.
Pour l'heure, le stockage et le calcul sont virtualisés mais pas encore, pour le moment, le réseau. Une fois cette dernière étape franchie, début 2016, le SDDC sera pleinement une réalité. Surtout, l'industrialisation totale de l'exploitation permettra une agilité encore plus grande qu'aujourd'hui. Toutes les opérations pourront être automatisées par des scripts.

Agilité technique et métier

L'étape actuelle est l'aboutissement d'une démarche déjà ancienne. En 2012, les développements agiles ont été généralisés. Sur la période 2013-2014, la SNCF a créé une usine logicielle utilisant la méthode DevOpps et une automatisation poussée de l'exploitation. Enfin, depuis la fin 2014, la société s'est organisée en features teams associant IT et métier avec un double objectif sur tous les projets : d'une part aller au plus vite en production et d'autre part garantir la scalabilité pour absorber tous les types de pics de charge. Trente-cinq applications ont ainsi pu être déployées depuis le début de l'année.
L'agilité technique rencontre l'agilité métier. « Lors de la publication de la Loi Macron autorisant la mise en oeuvre de lignes d'autocars inter-urbaines, nous avons été capables de mettre en oeuvre la vente des billets de l'offre de la SNCF en trois mois contre environ neuf mois auparavant » souligne Gilles de Richemond. Il faut espérer que la livraison des autocars et la formation des chauffeurs aient été aussi rapides...
VSCT a besoin d'une grande agilité technique pour répondre à toutes les exigences des métiers. La logique du test & learn est générale, y compris sur chaque page web des sites. Cela implique de pouvoir modifier rapidement chaque élément afin de réaliser un certain nombre d'expérimentations et de pouvoir réagir tout autant rapidement en fonction des résultats observés.
Gilles de Richemond résume la stratégie par un bon mot : « nous virtualisons tout sauf le business ». En effet, quoiqu'il arrive, tout est fait pour garantir la très haute qualité du service rendu à la SNCF et à ses clients. Avec les coûts que cela implique. Gilles de Richemond concède : « le besoin business, c'est la qualité de service, cela a un coût. »
VSCT réalise ainsi un chiffre d'affaires (revente aux autres entités de la SNCF dont la moitié pour Voyages-SNCF) de 100 millions d'euros par an avec un effectif de 550 personnes dont environ la moitié de développeurs.

PublicitéDes choix technologiques pour la performance

Avant d'entrer dans quelques détails, examinons tout d'abord comment est construit la plate-forme technique actuelle de VSCT. Elle est hébergée dans un datacenter de la SNCF situé à Lille. Celui-ci est divisé en salles répliquées qui peuvent se secourir les unes les autres en cas d'incident localisé. Pour les applications les plus critiques, une réplication en mode actif-actif existe avec un datacenter opéré par IBM en région parisienne. L'architecture technique est la même sur les deux datacenters et comporte, notamment, les mêmes serveurs HP. Philippe Martin, directeur technique de VSCT, insiste : « toute l'architecture est conçue et maîtrisée en interne par la SNCF. »
Les applications non-critiques possèdent un PRA mais pas de véritable PCA. Par contre, pour les applications critiques, un seul des sites suffit à couvrir le besoin business. Si l'un des sites connaissait un incident majeur, les clients finaux ne constateraient aucune conséquence.



Le système ResaRail, coeur stratégique du système voyageurs gérant les réservations, plus connu sous le nom de Socrate, est opéré par la SNCF. Il fonctionne sur des IBM zEntreprise sous TPF. Mais les systèmes de tous les distributeurs -notamment Voyages-SNCF- s'y connectent.
Certains modules sont parfois redéveloppés sur une architecture plus moderne et déconnectés de ResaRail mais aucune migration Big Bang n'est prévue.



Les nouvelles baies déployées, fournies par HP, sont des blades qui remplacent des racks classiques également fournis par HP. « A iso-consommation électrique et iso-encombrement, une blade remplace trois anciens serveurs en multipliant également la puissance de calcul par trois » se réjouit Philippe Martin. Pour l'heure, dix châssis de 16 lames ont été déployés, le solde devant migrer d'ici début 2016.
En six mois, il y a eu l'équivalent de la moitié des déploiements des quinze années précédentes. La plate-forme est ainsi passée de 2000 à 3000 serveurs virtuels (sur 400 serveurs physiques). Chaque serveur physique peut abriter jusqu'à une centaine de serveurs virtuels. Le stockage associé est passé de 20 à 65 To.



Un SAN constitué de baies EMC stocke les bases de données et les images des serveurs virtuels. Par contre, pour les traitements Big Data qui supposent un stockage beaucoup plus rapide, quatre serveurs HP y sont dédiés avec 45 disques de 4 To par serveur, soit 180 To par serveur et un total de 720 To. Le stockage devrait être d'ici peu renouvelé avec, peut-être, des baies full-flash gérant la déduplication. Les offres de PureStorage et EMC semblent attirer les regards.



Industrialisation poussée du cloud hybride

Malgré la récente évolution, VSCT n'a pas fait évoluer la taille de ses effectifs. Un administrateur gère donc simplement trois fois plus de serveurs qu'auparavant. Cela n'est possible que grâce à l'industrialisation et à l'automatisation poussée. Le provisionning est largement automatique et à la charge des équipes de développement qui ont un besoin. Elles peuvent allumer le serveur sans avoir à créer un ticket de maintenance qui sera traité par l'exploitation.
Le provisionning d'un serveur virtuel prend désormais cinq minutes. Celui d'un serveur physique en stock de l'ordre de trente minutes. Dans ce temps est inclus un quart d'heure pour le déploiement de l'environnement SNCF.
Cette industrialisation vaut aussi pour le débord chez OVH lancée à l'occasion de l'ouverture des ventes d'hiver. « La technologie de cloud hybride permet de gérer les ressources OVH comme une extension de l'architecture SNCF » insiste Gilles de Richemond. Pour l'instant, cela n'est possible que pour des pics d'activité prévus (comme l'ouverture des ventes d'hiver). Mais la scalabilité impromptue devrait être rendue possible sous peu, permettant un accroissement des ressources en moins d'une minute (par exemple en cas d'incident d'exploitation ferroviaire, de grève, etc. générant un pic de consultation des sites web). Gilles de Richemond explicite : « l'objectif est que l'infrastructure s'étende automatiquement d'elle-même avant même que les capacités en place ne soient saturées ».

Un changement dans les métiers

Cette industrialisation ne s'est pas faite en un jour, non seulement sur le plan technique mais aussi sur le plan humain. Philippe Martin précise : « le métier des équipes a changé et il est beaucoup plus riche qu'avant, avec plus de projets -par exemple pour créer les outils de provisionning automatisé- et moins d'exécution routinière. » Ce changement a été possible aussi vite d'abord parce que le recrutement de VSCT se basait sur un public d'ingénieurs. Malgré tout, « il a fallu travailler et convaincre » indique Philippe Martin.
De toute évidence, les choix faits s'accompagnent de vrais gains de productivité. Comme s'en réjouit Gilles de Richemond : « passer à quinze minutes pour déployer et cela cinquante fois par jour constitue un très appréciable gain de productivité. »

L'architecture hybrique sépare les problèmes techniques et économiques

L'industrialisation opérée assurant une continuité entre les ressources internes et le débord chez OVH, les problèmes techniques et économiques ne sont plus liés. « Choisir d'accroître nos ressources internes ou recourir à OVH est désormais un choix de sourcing, pas un choix technique » observe Gilles de Richemond.
Les gains d'échelles étant importants en interne vue la taille de l'entreprise, et guère différents de ceux des prestataires externes, la ressource externe coûte systématiquement plus chère que la ressource interne sur une longue durée. Le débord à l'extérieur ne se justifie donc que pour de courtes périodes afin de garantir l'adaptabilité des ressources. Devant la grande croissance des projets Big Data, il n'est pas impossible que VSCT ait aussi recours à un débord externe pour ceux-ci en attendant, peut-être, d'accroître ses capacités internes.
Gilles de Richemond conclut : « nous apprécions de travailler avec OVH parce que nous avons affaire à de vrais techniciens avec qui nous pouvons discuter. » Il semblerait que la standardisation à outrance de certains autres prestataires pour qui même la SNCF n'est qu'un client parmi d'autres n'ait pas convenu.

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