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Christian Paul (PS) : « contre le RGI, les acteurs aujourd'hui dominants veulent faire perdurer leurs rentes de situation »

Christian Paul (PS) : « contre le RGI, les acteurs aujourd'hui dominants veulent faire perdurer leurs rentes de situation »

Le député Christian Paul (Parti Socialiste) réagit à l'interview de Nathalie Kosciusko-Morizet donnée à CIO la semaine passée.

PublicitéQuel serait le rôle attendu du RGI (Référentiel Général d'Interopérabilité), prêt depuis deux ans mais, selon les dires de la secrétaire d'Etat, encore une fois renvoyé en arbitrage au lieu d'être promulgué ? L'adoption du RGI sera, pour peu que ce dernier ne devienne pas le jouet de lobbies aux intérêts très particuliers, une étape importante de l'urbanisation des systèmes d'information de l'état, puis des collectivités territoriales. De quoi est-il en effet question ici ? De décider ce que seront, pour emprunter une métaphore désormais un peu vieillie, les routes et autoroutes de la société de l'information. Formats de fichiers, modes de connectivité sont en effet les "routes" que peuvent emprunter les différentes solutions logicielles. Préconiser, si ce n'est obliger, à l'adoption de formats ouverts, utilisables et implémentables par tout un chacun, permettra de garantir l'existence d'une pluralité de solutions. Elle permettra également d'améliorer la pérennité des données. Si les formats ouverts ne sont pas une potion magique, leur utilisation permet au moins de se donner les moyens d'implémenter bien plus facilement dans 5, 10 ou 50 ans des logiciels de lecture de données produites par des logiciels peut-être alors disparus. Des économies sont également possibles si certaines solutions sont mutualisées. Croyez-vous que le lobbying d'une ou plusieurs sociétés étrangères soit responsable du retard de la publication du RGI ? Quelle leçon en tirez-vous sur le développement de l'emploi numérique en France et que comptez-vous faire ? Difficile d'avoir des certitudes sur ce dossier complexe... L'intérêt des acteurs aujourd'hui dominants à faire perdurer leurs rentes de situation est cependant évident. Il n'est dans ce contexte pas déraisonnable d'imaginer que Microsoft, puisque c'est bien de cette société que l'on parle, veuille se donner les moyens d'influencer les décisions. Le problème n'est pas tant que la société soit étrangère, que son écrasante domination dans certains segments du marché de l'informatique. Le rôle du politique est d'apporter de la régulation, de policer ce qui ne resterait sinon qu'une jungle ultralibérale où le plus fort écraserait de tout son poids financier les plus faibles. La France, mais également tous les autres pays du monde, à l'exception peut-être des États-Unis (et encore...) ont intérêt à plus d'ouverture. D'une manière générale, alors que les membres UMP de l'Assemblée Nationale refusent l'interopérabilité et l'ouverture des normes dans le cadre de la loi dite Hadopi, croyez-vous que le gouvernement est conscient des enjeux de l'interopérabilité et des formats ouverts dans le développement des services numériques aussi bien dans les administrations que dans les entreprises ? Le gouvernement, et au-delà la majeure partie du Parlement, restent éloignés des enjeux politiques du numérique. Les enjeux de civilisation qu'il recèle sont, et cela fait bien sûr le délice des lobbies, trop souvent relégués au second plan sous prétexte de technicité. Le gouvernement fait cependant preuve d'une cécité coupable et inexcusable. Des services compétents existent, des fonctionnaires dévoués produisent des avis éclairés, informent les décideurs du plus haut niveau. L'inculture ne peut pas ici être une excuse. Nous avons affaire ici à des choix, conscients, d'une société taillée pour servir les intérêts de quelques uns plutôt que ceux du plus grand nombre. Que rien ne soit fait en matière d'interopérabilité n'est, hélas, pas étonnant au regard de la faiblesse des investissements en matière de réseau haut débit. Pourquoi le gouvernement serait-il frappé par la grâce lorsqu'il faut urbaniser les systèmes et réseaux alors qu'il ne fait aucun effort pour construire ces derniers, et laisse sur le côté les territoires les plus isolés ?

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